“On attend de voir ce que les jours prochains nous réservent”: le service de réanimation médicale de l’Hôpital Henri-Mondor de Créteil (AP-HP), garde un œil sur l’évolution de la quatrième vague de Covid-19 avec une inquiétude: qu’elle frappe l’hôpital en plein été.
“Chaque vague [de Covid-19] a eu son défi spécifique. Sur celle-ci, l’élément qui va être le plus déstabilisant sera le moment de survenue. Est-ce que c’est en plein été, où nos capacités de mobilisation de personnel sont de facto réduites? Ou est-ce que c’est un peu plus tard, en automne, où on aura un peu plus de marge pour organiser les choses?”, explique à l’AFP le Pr Armand Mekontso Dessap, chef du service de médecine Intensive-Réanimation de l’hôpital de l’AP-HP situé à Créteil.
Nous attendons “les modèles qui vont sortir pour pouvoir anticiper”, ajoute-t-il, se disant “fatigué mais toujours déterminé”.
En ce mois de juillet, l’unité Covid de son service n’accueille “plus” que cinq cas de Covid “récents”. “Qui peut nous aider ?”: un patient maintenu en coma médicamenteux doit être retourné sur le dos. Surblouses bleues, tabliers blancs, charlottes, gants et masques canard, les gestes sont parfaitement synchronisés aux sons des “1, 2, 3: on est good” du médecin.
Dans la chambre d’à-côté, plus au calme, un interne pose un cathéter dans la veine fémorale d’un patient. Un geste “assez technique” mais nécessaire car le malade, admis pour Covid il y a un mois, doit maintenant être mis sous dialyse. Mais un autre, hospitalisé lors de la troisième vague, va bientôt partir pour un service de réadaptation.
Pour l’heure, il s’entretient avec une psychologue. Avec ses traitements lourds, ses bips incessants, sa lumière constamment allumée… la “réa” est source d’agressions physiques et psychologiques et peut entraîner un syndrome post-traumatique. Il faut prendre soin “de la qualité de vie du survivant“, explique le chef du service.
“En fonctionnement normal, nous avons 32 lits ouverts mais cet été nous sommes passé à 26”, note Armand Mekontso Dessap. L’objectif: que les personnels puissent prendre trois semaines de vacances. “Je ne sais pas si on va pouvoir le réaliser de manière complète”, avoue le réanimateur qui a l’espoir que “la vitesse de vaccination remporte son combat sur la vitesse de propagation du virus”.
Mais si ce n’est pas le cas, “nous ferons comme d’habitude. On poussera les murs, on rappellera le plus de gens possible”, ajoute le professeur.
Emidio Da Silva Leite fera “une fois de plus, sauter ses jours de repos, ses jours de vacances”. “Mais l’entrain ne sera pas aussi fort qu’il a pu l’être il y a un an et demi”, avoue l’infirmier.
Pour le moment, le service semble calme, les bips des constantes réguliers. Mais, à bien y regarder, tout le monde est occupé. A faire une échographie, informer un patient, nettoyer une chambre…
Car à l’aube du deuxième été Covid, le service est plein. Si le nombre de malade du coronavirus a reculé, les patients habituels, les malades qui font des décompensations graves de pathologies sont bien là.
Comme cette jeune femme, atteinte d’un cancer du sang. Dans sa chambre, pas de bips agressifs. Son cœur, son rein et ses poumons sont remplacés par des machines. “Un cas classique dans la catégorie des très graves”, note Armand Mekontso Dessap. “Beaucoup plus compliqué qu’un Covid”.
“La difficulté particulière du Covid, c’est son volume, mais médicalement ça correspond à une détresse respiratoire aiguë, on en fait tous les jours”, relève le médecin, reconnaissant que “pourtant c’est lui qui laissera des traces”.
Mais combien de temps tiendront les équipes au rythme des différentes vagues ?
“Il y a de tout: des personnes qui restent motivées et d’autres qui se posent certaines questions sur leur devenir”, note Damien Carras, cadre de santé. “Heureusement la grande majorité tient bon”.
Depuis 12 ans dans le service, Emidio Da Silva Leite se dit fatigué et un peu résigné. “On sait comment faire, on tiendra forcément. Après, ce sera en post-crise qu’il faudra recoller les pots cassés”.
par Laurence COUSTAL
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