Société | | 04/03/2021
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Alfortville: contre le harcèlement de rue, demandez Angela

Alfortville: contre le harcèlement de rue, demandez Angela © Charles Henry

Un lourdaud se fait fait franchement insistant alors que vous êtes tranquille au bar avec des copines? Demandez à un serveur où est Angela, il comprendra. A l’occasion de la Journée internationale des droits des femmes, Alfortville a décidé de relayer largement l’initiative Où est Angela dans ses bars mais aussi ses commerces et espaces publics. Une première en Ile-de-France.

L’idée, germée outre-Manche, consiste à proposer cette phrase code pour signaler discrètement que l’on est harcelée. Crier au secours alors qu’on est importunée par un type collant peut être gênant ou paraître disproportionné. Le code permet de partager son problème avec un tiers qui va aider à se dégager de cette situation de harcèlement, en allant jusqu’à appeler la police si nécessaire. Importée en France par un collectif féministe d’étudiants rouennais, l’initiative s’est ensuite développée à Reims sous l’impulsion de l’association He for She, affiliée à l’Organisation des Nations Unies, avec le soutien du bureau des élèves de l’école de commerce Neoma, mais aussi à Caen, Amiens, Nîmes. Le dispositif a même été repris par Marlène Schiappa, secrétaire d’État chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes, dans le cadre d’un plan gouvernemental de lutte contre le harcèlement de rue annoncé en mai 2020.

Au plan municipal toutefois, rares sont les mairies à s’être saisies du dispositif comme instrument de politique publique. « J’ai dû l’adapter car à l’origine il cible spécifiquement les bars », note Catherine de Rasilly, maire-adjointe en charge notamment de la politique de la ville et des droits des femmes. « J’ai voulu l’élargir à l’ensemble des commerces, mais aussi aux établissements publics comme le centre communal d’action social (CCAS) ou le kiosque de la gare. »

© Charles Henry
Catherine de Rasilly, adjointe au maire d’Alforville

Au-delà du pragmatisme de l’initiative dans les situations de harcèlement, elle vise aussi à sensibiliser sur ce fléau, encore relativement toléré socialement. En juillet 2020, un sondage Ipsos chiffrait ainsi que 81% des femmes en avaient déjà été victimes en France, mais aussi que 20% d’entre elles indiquaient ne pas avoir été aidées. 86% expliquaient par ailleurs ne pas savoir comment réagir lorsqu’elles sont témoins de harcèlement.

Pour sensibiliser, la ville a donc décidé de communiquer largement, avec un slogan bien flashy rose sur noir, répliqué sur des affiches, flyers, et macarons autocollants pour les vitrines, et elle s’est appuyée sur le Capa, l’association des artisans, commerçants et professions libérales de la ville, pour les inviter à s’y associer. « J’ai tout de suite accepté », confie le patron de la brasserie de l’Hôtel de ville, Robert (photo de une). « En voyant cet autocollant, la personne pourra se sentir rassurée. Elle saura qu’elle trouvera une écoute. » Dans la rue principale, Paul Vaillant Couturier, les autres commerçants ne sont pas encore au courant de l’opération. Certains s’interrogent un peu sur la nature du dispositif. « Il faudra une forte communication de la mairie auprès des commerçants mais aussi des habitants pour que ce soit vraiment efficace », relève Guillemette qui expose cette semaine ses créations à la boutique éphémère.

« C’est une initiative intéressante » commente pour sa part Ema, 21 ans, qui fait une pause, entre deux cours en visioconférence, square François Mitterrand devant la mairie. Depuis une mésaventure qui lui est arrivée avec un inconnu en province, elle se montre très méfiante à l’égard des hommes lorsqu’elle est dans la rue. « Ça m’arrive souvent de changer de trottoir dès que je ressens le poids d’un regard trop insistant », explique-t-elle. « Comme vous le voyez, il y a du monde sur cette place, mais ça n’empêche pas des mecs bizarres de nous accoster. » Elle témoigne même d’insultes qu’elle a reçues ou de s’être faite suivre jusque chez elle. Son amie, Andréa, étudiante comme elle dans une université parisienne, a d’ailleurs déjà songé à se munir d’une bombe lacrymogène.

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