Pas question pour les enseignants des écoles maternelles en réseau d’éducation prioritaire de Choisy-le-Roi de se convertir à la méthode de lecture dite Lego (du verbe lire), poussée dans les académies.
Cette méthode de lecture s’appuie notamment sur le repérage des syllabes et des sons qui les composent sur une répétition des exercices jusqu’à ce que l’élève réussisse avant de passer à l’étape suivante. Elle repose sur un travail en petit groupe (4 élèves pour les plus faibles). Concoctée par une équipe de l’Académie de Paris, cette approche par le graphème s’inspire d’un programme d’apprentissage de la lecture développé par l’association Agir pour l’école, présidée par le directeur de l’Institut Montaigne, Laurent Bigorgne, et hébergée au sein du think-tank.
Cette méthode est diversement appréciée des enseignants qui ont généralement pour habitude de jongler entre différentes méthodes pour s’adapter à chacun de leurs élèves. Le protocole strict d’application de la méthode, non compatible avec le panachage des méthodes, et son encouragement spécifique par la hiérarchie de l’Education nationale suscitent la controverse.
Plusieurs syndicats enseignants dénoncent cette incitation à mettre en place cette méthode spécifique comme une remise en question de la liberté pédagogique. Plusieurs laboratoires universitaires d’évaluation pédagogique ont aussi récemment refusé de participer à l’appel d’offre ministériel pour évaluer cette méthode, dénonçant des conditions trop précipitées.
Actuellement, cette méthode est testée dans 370 classes en France.
Pour éclairage, lire ailleurs :
Voir la méthode proposée dans le cadre de l’Education nationale
Lire enquête du journal Libération
Lire la tribune du délégué général d’Agir pour l’Ecole, Laurent Cros, dans Le Monde
Retour d’expérience (sur le Café pédagogique)
Des enseignants inquiets de pressions en faveur d’Agir pour l’école (Le Café pédagogique)
La méthode Lego déjà testée dans 370 classes de CP (BFM TV)
Site de l’association Agir pour l’école
Dans le Val-de-Marne, la méthode Lego a été proposée par l’Académie dans les maternelles du réseau d’éducation prioritaire de Choisy-le-Roi . Présentée lors d’une réunion de directeurs le 11 janvier, elle devait être proposée aux enseignants de grande section pour une mise en oeuvre à partir de février. Une suggestion qui a suscité une mise en garde des syndicats SnudiFo94 et SNUipp -FSU 94, lesquels ont dénoncé dans un communiqué commun un procédé “qui vise à remettre en cause la liberté pédagogique”. Et les syndicats de rappeler qu’ils s’étaient déjà opposés, l’année dernière, à la mise en œuvre du protocole d’apprentissage de l’association Agir pour l’école (protocole qui a inspiré la méthode Lego). “Les enseignants, choqués par la lourdeur du protocole, avaient saisi les syndicats, s’étaient réunis, avaient voté des motions de conseils des maîtres et avaient exposé publiquement leur refus”, rappelle le Snuipp qui dénonce également la méthode pédagogique sur le fond.
Question de méthode
“Coté démarche pédagogique, pas grand chose de nouveau : méthode syllabique à entrée graphémique et non pas phonétique, absence d’illustrations qui sont supposées détourner l’attention de l’enfant lecteur, prégnance des “pseudos-mots” (mots inexistants constitués d’enchaînements de syllabes utilisés comme support pour s’approprier la mécanique du décodage sans référence au sens), conception étapiste de l’apprentissage de la lecture (selon laquelle il faut d’abord s’approprier le code pour ensuite accéder à la compréhension). Le tout se veut comme, c’est la norme maintenant, inspiré des enseignements des neuro-sciences, en réalité d’une lecture extrêmement partiale et restrictive de celles-ci”, tacle le syndicat.
“Apprendre à lire passe par l’acquisition de compétences particulières : la conscience phonologique, la connaissance des lettres, le vocabulaire et la compréhension orale. La progressivité est essentielle, car l’enfant ne peut pas toutes les assimiler simultanément. La répétition, bien que chronophage et rébarbative, est tout aussi indispensable, car elle permet l’appropriation”, défend pour sa part Laurent Cros, délégué général d’Agir pour l’école, dans sa tribune au Monde.
Liberté pédagogique
“Au-delà des querelles de méthode, c’est la conception de l’enseignant véhiculée par cette politique éducative, avançant comme un rouleau compresseur, qui est en jeu. En effet, le point commun de toutes ces méthodes et protocoles c’est qu’ils présupposent un enseignant exécutant et non un enseignant concepteur qui s’approprie les démarches, les adapte en fonction du contexte de la classe, du profil des élèves”, ajoute le syndicat.
Finalement, les enseignants ont tranché et refusé en bloc.
Lorsque j’étais élève, la seule appréciation que je recevais de mes enseignants était “c’est un élève médiocre”. Idem pour mes camarades de classe. Les conseils de classe se résumaient à “c’est une classe de nuls”, “il faut des moyens supplémentaires”. Lorsque des moyens supplémentaires étaient alloués, ils ne servaient qu’à remplacer la machine à café car le délégué CGT s’était aperçu que celle installée au rectorat était plus récente que celle du lycée et il voulait le même modèle pour la salle des professeurs.
Un jour, le proviseur m’a désigné d’office délégué de classe car personne ne voulait se présenter et m’a demandé de lui apporter des éléments pour expliquer une tendance que l’ensemble des professeurs lui remontait : “le niveau est catastrophique, il n’arrête pas de baisser d’année en année !”.
J’ai donc contacté tous les élèves identifiés comme cancres du lycée et leur ai demandé de me montrer leurs dernières copies de sciences physiques et de mathématiques qui sont des disciplines concrètes et dont les corrections d’examen sont indiscutables contrairement aux matières littéraires qui sont beaucoup plus subjectives.
J’ai trouvé de très nombreuses erreurs de correction qui ont été confirmées par un professeur de physique. Les élèves ont de mauvais résultats car les enseignants notent incorrects des résultats qui sont pourtant valables (et inversement, surtout lorsqu’il s’agit de la copie du fils du professeur d’anglais ou de la copie de la fille du proviseur).
L’erreur la plus fréquente est d’estimer fausse la réponse 9 x 6 = 54. La plupart des enseignants de mathématiques pensent que 9 x 6 = 56. Lorsque vous demandez à un professeur de mathématiques de vérifier la multiplication avec une calculatrice, il refuse d’admettre le résultat et prétend très souvent que la calculatrice donne le mauvais résultat puisqu’elle est fabriquée en Asie. Il faut retenir le bon calcul : 9 x 6 = 54.
J’ai confirmé au proviseur que les enseignants avaient raison : “le niveau est catastrophique, il n’arrête pas de baisser d’année en année !”. Et lorsqu’il m’a demandé quelle pouvait en être la raison, je lui ai annoncé que ce n’était pas parce que “les jeunes écoutent du rock anglais sur les stations FM” comme le prétendait le professeur de français, mais car ce qui baisse, c’est surtout le niveau des enseignants. Lorsque les professeurs de mathématiques ne connaissent pas les tables de multiplication et refusent d’admettre leurs erreurs, il ne faut pas s’attendre à avoir des élèves avec un bon niveau.
C’était en 1985 et la situation s’est encore aggravée : le niveau des enseignants est de pire en pire chaque année !
C’est à se demander comment les enfants ont pu apprendre à lire par le passé, sans toutes ces expérimentations diverses et variées, surtout lorsque l’on constate l’effondrement de la capacité de compréhension de plus en plus perceptible lorsque l’on s’évertue à parler “un français correct”
Quant aux neurosciences, c’est bien beau mais, l’humain n’est-il pas créature unique pour ce qui est de l’incidence de son vécu, à commencer chez les petits enfants, sur ses talents et capacités propres face aux divers apprentissages avenirs ?
On en est donc encore au pays de la liberté à tenter l’expérience de vouloir conformer tout le monde dans un moule unique en matière d’apprentissage ?
Les syndicats et les maitresses d’école s’opposent à une innovation ? C’est vraiment très surprenant !!!
Quelqu’un a t’il entendu un syndicat d’enseignants proposer autre chose que “plus de moyens” alors que l’enseignement en France s’effondre ?
Il faut les laisser tranquilles dans leur classe : leur paie ne dépend pas de leur efficacité, c’est tout ce qui compte.
Ce n’est pas une innovation mais une bonne vieille méthode syllabique pure relookée !
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