A l’instar d’autres pays européens, dont l’Allemagne et l’Italie, la France a décidé lundi de suspendre l’utilisation du vaccin anti-Covid d’AstraZeneca, un nouveau coup dur pour la campagne de vaccination, au moment où l’Ile-de-France est menacée de reconfinement.
Emmanuel Macron, qui a lui-même fait l’annonce lors d’une visite à Montauban, a dit “espérer reprendre vite” la campagne de vaccination avec le produit du laboratoire anglo-suédois, “si l’avis de l’autorité européenne le permet”. Le chef de l’Etat a évoqué la date de mardi.
Peu après, l’Agence européenne des médicaments (EMA) a annoncé qu’elle examinerait bien mardi “en détail les informations” sur des craintes liées à des caillots sanguins chez des personnes vaccinées, sans lien avéré à ce stade, avant une “réunion extraordinaire” jeudi.
Malgré les assurances de l’EMA, qui réaffirme que les avantages de ce vaccin l’emportent toujours sur les risques, c’est un nouveau contretemps susceptible de miner un peu plus la confiance à l’égard de ce vaccin, qui a déjà enchaîné les déconvenues, entre retards de livraison, hésitations sur son efficacité chez les personnes âgées et effets secondaires chez les plus jeunes.
“Une catastrophe”, résume une source gouvernementale, pour qui la France “se retrouve à la traîne des autres” pays européens en prenant cette décision.
Selon un dernier bilan samedi, 1,3 million de personnes (sur 5 millions au total) ont reçu en France une première injection du vaccin d’AstraZeneca, le troisième autorisé en Europe après ceux de Pfizer/BioNTech et Moderna.
Le gouvernement compte sur la campagne de vaccination pour promettre un retour à une vie plus normale, alors que le Covid-19 pèse toujours lourdement sur les vies quotidiennes: couvre-feu à 18h en métropole et confinement le week-end dans les territoires les plus touchés, restaurants, bars, lieux culturels et salles de sport privées fermées depuis plus de quatre mois, étudiants accueillis au compte-gouttes dans les universités.
Dans l’immédiat, “nous aurons à prendre dans les jours qui viennent sans doute de nouvelles décisions” pour lutter contre l’épidémie de Covid-19, a annoncé lundi Emmanuel Macron, en revendiquant des restrictions prises “de manière adaptée et proportionnée” selon les territoires.
“L’Île-de-France est clairement en sursis” car “le variant anglais (du virus), majoritaire, n’est pas seulement plus contagieux, il est aussi plus mortel”, et “nos capacités de réanimation sont saturées”, avait exposé quelques heures plus tôt sur France 2 la présidente de la région, Valérie Pécresse, disant ne pas s’opposer à des mesures “justifiées, si elles sont proportionnées et accompagnées”.
Dans cette région, la plus peuplée du pays (12 millions d’habitants), les autorités sanitaires comptent sur une centaine de transferts de patients Covid soignés en service de réanimation vers d’autres régions d’ici la semaine prochaine pour soulager les hôpitaux, qui ont déjà dépassé le total de leurs capacités initiales de lits de réa, avec 1 152 malades lundi, plus qu’au pic de la 2e vague en novembre.
Au total, il y avait lundi plus de 4 200 (4 219) patients dans ces services de soins réservés aux cas les plus graves sur toute la France.
Et la situation épidémique n’annonce pas de détente. En région parisienne, le taux d’incidence grimpait, au 12 mars, à 404 nouveaux cas pour 100 000 habitants sur sept jours, contre 348 huit jours plus tôt. Trois départements d’Ile-de-France (Seine-Saint-Denis, Val d’Oise, Val-de-Marne) dépassent désormais le taux d’incidence du Pas-de-Calais (421), où des confinements le week-end sont en vigueur.
Lire : Baromètre du coronavirus en Ile-de-France: point au 15 mars
Au niveau national, après un tassement du nombre de cas détectés durant la première semaine du mois de mars, ils sont repartis à la hausse : 115 270 personnes ont été testées positives entre lundi et jeudi derniers, contre 103 747 les mêmes jours de la semaine précédente.
Par ailleurs, un nouveau variant du virus a été détecté en Bretagne, a annoncé lundi la Direction générale de la santé (DGS). Il a été classé dans la catégorie “à suivre” par les autorités, celle qui regroupe la plupart des milliers de variants qui apparaissent naturellement dans le monde, et dont seule une petite proportion poseront finalement des problèmes particuliers de santé publique, par exemple s’ils s’avèrent plus transmissibles.
Dans ce contexte, l’exécutif continue d’être critiqué par des médecins, qui le jugent trop attentiste sur le confinement.
“J’entends beaucoup dire qu’une semaine sans confinement est une semaine gagnée (…) pour moi c’est une semaine perdue“, a jugé sur France Inter le directeur médical de crise de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), Bruno Riou.
“Pas seulement sur le plan sanitaire, elle est aussi perdue pour les étudiants, pour les artistes pour les restaurateurs”, a-t-il ajouté, en pointant aussi les “conséquences considérables” en termes de décès, de séquelles pour les malades ou de déprogrammations d’autres soins.
La semaine dernière, l’Agence régionale de santé (ARS) d’Ile-de-France avait donné l'”ordre ferme” aux hôpitaux et cliniques de déprogrammer 40% de leurs activités médicales et chirurgicales.
Le Conseil scientifique, qui n’avait pas été suivi par l’exécutif fin janvier, lorsqu’il avait préconisé un confinement strict de quatre semaines pour faire face aux variants du virus, a remis jeudi un nouvel avis au gouvernement, qui ne l’a pas encore rendu public.
Lundi, 333 malades atteints du Covid-19 sont décédés à l’hôpital, pour un total depuis le début de l’épidémie de quelque 90 750 morts.
par Andréa BAMBINO
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