La cour administrative d’appel de Paris a suspendu ce lundi le permis de construire du futur bassin d’entraînement pour les Jeux olympiques de Paris 2024 prévu à Aubervilliers, contesté par des défenseurs de l’environnement.
“L’exécution de la présente ordonnance, qui suspend le permis de construire litigieux, implique nécessairement, comme le soutiennent à bon droit les requérants, qu’il soit immédiatement mis fin aux travaux déjà entrepris”, conclut la cour. Il existe des “doutes sérieux sur la légalité” de ce permis, déposé de façon irrégulière par Karine Franclet, la maire UDI d’Aubervilliers, et délivré sans respecter certaines règles d’urbanisme, précise la décision.
Le projet implique notamment la destruction de 67 arbres, “alors que le permis de construire n’envisage au titre de la compensation (…) que la replantation de 47 arbres”, a ainsi détaillé la cour.
“On est soulagés, c’est une reconnaissance. Les travaux de terrassement ont commencé ce matin, ils ont dû s’arrêter”, a déclaré à l’AFP Ziad Maalouf, un des trois jardiniers à l’origine de la requête, avec deux associations de défense de l’environnement.
“Nous continuons à dénoncer le fait que nous pouvions faire autrement”, a martelé Jean-Marie Baty, président du MNLE 93 (Mouvement national de lutte pour l’environnement).
Sollicitée par l’AFP, la municipalité d’Aubervilliers a dit ne pas souhaiter réagir dans l’immédiat. Deux choix s’offrent à elle: régulariser les points litigieux soulevés par le juge administratif ou faire appel devant le Conseil d’Etat.
La suspension en urgence des travaux ne signifie pas l’arrêt total du projet, qui doit faire l’objet d’une nouvelle audience au fond.
La même juridiction avait interrompu en avril les travaux du village des médias, autre projet phare des JO en Seine-Saint-Denis. Mais trois mois plus tard, après l’étude du dossier au fond, elle avait fait machine arrière, autorisant la reprise du chantier.
La suspension du permis de construire intervient alors que les parcelles concernées par les travaux ont déjà été détruites.
Samedi encore, environ 300 personnes ont défilé à Aubervilliers pour dénoncer ce projet contraire, selon eux, à l’urgence écologique. Ils visent surtout le solarium qui doit accompagner le centre aquatique et voir le jour en lieu et place des arbres et potagers.
Les jardins ouvriers des Vertus, enclave centenaire de 2,5 hectares au pied des tours, doivent être amputés de 4 000 m2 pour la construction de cet ouvrage.
La majorité des jardiniers concernés ont été déplacés sur d’autres parcelles voisines par Grand Paris Aménagement, détenteur du terrain.
Bassin d’entraînement pour les nageurs lors des JO, la piscine doit ensuite être accessible aux habitants de cette ville populaire, dans un département où 60% des enfants ne savent pas nager à leur entrée en sixième, notamment faute d’infrastructures suffisantes.
Pour Aubervilliers (87 000 habitants en lisière de Paris), l’enjeu dépasse la seule histoire d’eau car il doit concrétiser un vieux projet d’aménagement du territoire: l’installation d’une piscine olympique fut déjà évoquée lors de la candidature de Paris aux JO-2012.
Le projet est estimé à 33 millions d’euros, dont environ un tiers doit être financé par la Solideo, la société chargée de livrer les ouvrages pour les JO-2024.
Selon le plan initial, ce bassin controversé devait l’être au plus tard le 26 juin 2024, un mois avant le coup d’envoi des JO.
“Si le calendrier ne permet pas que la piscine soit fléchée comme un site d’entraînement, la Solideo posera le débat” de sa participation financière, a averti lundi devant la presse Stéphane Troussel, le président (PS) du conseil départemental de la Seine-Saint-Denis.
Si ce scénario catastrophe devait se réaliser, “je n’ai pas l’intention que la Seine-Saint-Denis perde ses crédits”, a anticipé M. Troussel, qui a fait de “l’héritage” des Jeux une priorité pour doper le développement du département le plus pauvre de France métropolitaine.
Contactés, la Solideo et le comité d’organisation Paris-2024 n’ont pas réagi immédiatement.
par Fanny LATTACH
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