A l’hôpital psychiatrique Paul Guiraud, ce vendredi 25 juin, c’est ensemble que patients et soignants ont fait leur propre fête de la musique. Au programme : déambulation carnavalesque, spectacle de marionnettes, exposition de sculptures…
Une fête qui n’est pas née spontanément. A l’initiative de Didier, ergothérapeute au sein de l’hôpital, un groupe de batucada (musique de percussions traditionnelles) Batuk’H organise tous les vendredis un atelier musical pour les patients volontaires. Le but ? “Faire sortir les patients de leur enfermement, en créant un rythme où chacun doit être à l’écoute des autres”, explique-t-il. “Ces activités ont bien sûr un but thérapeutique, car elles permettent à tous de partager un moment de convivialité”, explique Thierry, chef d’orchestre pour la journée. Une quinzaine de patients sont réunis derrière lui et le suivent dans les allées de l’hôpital. Chacun porte un instrument et joue en rythme avec des variations, comme si les membres de l’orchestre se connaissaient depuis toujours.
“casser les barrières soignants-soignés“
Le personnel soignant participe aussi et fait office de public, applaudissant généreusement. Même s’ils ne sont que quelques-uns, “leur présence est importante” explique Thierry, car “les patients ont besoin de repère, et les soignants donnent un cadre, une structure à l’activité.” La présence d’une assemblée de spectateurs pour écouter les patients permet de “casser les barrières soignants-soignés, et contribue à valoriser les patients, qui manquent parfois d’estime d’eux-mêmes” explique Didier qui souligne l’impact très concret de ces activités artistiques sur les patients. “La musique permet de créer de la vie en eux !” Une patiente, qui n’est plus hospitalisée, est revenue exprès en ambulatoire pour participer aux festivités, preuve que ces activités sont “déterminantes dans le processus thérapeutique.”
Dans le cadre de ces festivités annuelles, le groupe Batuk’H était accompagné par deux comédiens de la Compagnie D’Ailleurs, qui ont joué un spectacle de marionnettes mêlant conte philosophique et musicalité. Vêtus de costumes fleuris, ils ont revisité des histoires traditionnelles comme L’île des sentiments ou Le petit garçon qui sauvait les étoiles de mer. Une autre façon, plus introspective, de faire réfléchir les patients pour les amener à s’écouter eux-mêmes. Des activités créatrices qui “participent de la réhabilitation cognitive” et permettent aux patients de réapprendre le monde dans lequel ils vivent, défendle directeur de l’hôpital, Didier Hotte, joint au téléphone.
“Déstigmatiser les patients des hôpitaux psychiatriques”
Elles aussi répondent à un besoin des patients de “continuer les activités thérapeutique, même après les soins” explique Feli Barbera, arthérapeute et référente culture au sein de l’établissement. “J’y tiens beaucoup, c’est absolument nécessaire”, confie Didier Hotte. “C’est assez émouvant de voir que même dans les services les plus difficiles, les patients y participent assez volontairement.” La déambulation musicale permet de créer une cohésion entre des patients aux horizon parfois très différents. En effet, sur les sept unités que compte l’hôpital, on trouve aussi bien un Centre d’Accueil Thérapeutique à Temps Partiel (CATTP) qu’une Unité de Soin Intensifs (USI), où sont aussi admis des prisonniers dont l’état de santé est jugé incompatible avec l’univers carcéral. “Ces projets sont inter-secteurs, et mobilisent donc chaque unité de l’hôpital, chaque service” souligne Feli Barbera. “L’objectif, c’est de créer un aspect fédérateur”, car “certains patients restent parfois plus de deux semaines, cela leur permet de se réadapter à un monde qu’ils pensaient hostile.”
Et pour fédérer le plus possible, ce sont les patients qui, à leur tour, ont été invités à présenter une création artistique. A l’initiative de Catherine, une ancienne patiente du Centre Médico-Psychologique (CMP) de Vitry-sur-Seine, chaque patient a réalisé une créature en papier de soie éclairée par des LED, et accompagnée d’un texte qui raconte l’histoire du personnage. “C’est l’aboutissement d’un travail de 18 mois” confie Catherine. Pour le directeur, ces festivités vont de soi car “le mouvement vers l’art est consubstantiel de la psychiatrie.” “Tout cela aide à déstigmatiser les patients de ce genre d’hôpital, qui ont souvent une image très négative dans les médias et auprès du grand public” ajoute Didier, le musicien. “L’idéal, bien sûr, ce serait que les patients eux-mêmes créent leurs propres animations, mais ce n’est pas encore le cas”, songe Didier Hotte. En attendant, alors que la batucada résonne devant le pavillon où sont exposées les œuvres, personnels et patients continuent de jouer, ensemble, leur propre chanson.
bravo pour cet article ;il met en lumière le travail accompli par des soignants peu valorisés et des êtres humains qui devraient avoir une place protégée et non stigmatisée dans notre société…
L’article et les photos sont un hymne à l’espoir!
N'envoyez que des photos que vous avez prises vous-même, ou libres de tout droit. Les photos sont publiées sous votre responsabilité.