Redonner vie à un cours d’eau enterré et transformé en égout, c’est le pari fou que le Val-de-Marne et les villes riveraines ont décidé de relever à l’aube du 21ème siècle. Après Fresnes en 2003, L’Haÿ-les-Roses en 2016, la Bièvre s’apprête à renaître entre Arcueil et Gentilly d’ici la fin 2021, et la réflexion est en cours à Paris. Histoire et visite de chantier.
Intensément exploitée par les artisans puis les industries, des meuniers aux blanchisseuses en passant par les tanneurs, les teinturiers, les abattoirs…, la Bièvre, cette rivière de 36 kilomètres qui prend sa source à Guyancourt (Yvelines) et se jetait jadis dans la Seine, a été progressivement canalisée puis recouverte aux abords de la capitale pour des raisons sanitaires, finissant son cours dans les égouts de Paris.
Si une partie de la rivière coule toujours à ciel ouvert, longée en partie par un sentier de randonnée, le GR11, elle plonge sous la banlieue à partir d’Antony. A l’heure de la désindustrialisation et de la préoccupation de la biodiversité et des paysages, cette disparition a été considérée comme n’étant pas une fatalité.
“Au début on nous prenait pour des fous! C’était pour beaucoup une utopie de faire revivre cette Bièvre qui avait si mauvaise presse, mais la première partie à l’Haÿ-les-Roses est très réussie. Les retours sont très bons. Les craintes que les citoyens ont exprimé au début du projet, les questions de sécurité, mais aussi la peur des moustiques, ont disparu”, explique Christian Favier, président du Conseil départemental du Val-de-Marne, maître d’ouvrage de cette renaissance. C’est grâce à une consultation citoyenne, entamée dès 2003, que le projet a vu le jour. “Les enfants ont dessiné des berges avec des saules pleureurs, bien que ce soit un arbre qui ne pousse pas naturellement sur les berges, on en a installé un. Nous avons vraiment essayé de composer avec tous ces éléments”, raconte le chef de projet, Benoit Kayser.
Soigner les eaux
En amont de ce colossal projet qui représente des millions d’euros d’investissement à chaque portion, la première étape a été de soigner les eaux de la Bièvre, pour éviter de créer un égout à ciel ouvert. Ainsi sont signés des contrats Bièvre pluriannuels par le SMBVB (Syndicat mixte du bassin versant de la Bièvre) qui regroupe à la fois les collectivités locales et syndicats intercommunaux d’assainissement des eaux.
Premières ouvertures à Fresnes, L’Haÿ-les-Roses, Massy
Dans le département, une première portion de la Bièvre est d’abord réouverte sur 200 mètres à Fresne, dans le parc des Prés, en 2002, sous l’égide de l’ex-communauté d’agglomération du Val-de-Bièvre. En 2016, c’est un tronçon de 600 mètres qui sort de terre à ‘L’Haÿ-les-Roses. (Voir notre reportage) En 2018, c’est dans l’Essonne, à Massy, que la Bièvre pu revoir le jour sur 240 mètres.
Arcueil-Gentilly, d’ici la fin 2021
Nouvelle étape, le tronçon Arcueil-Gentilly, également de 600 mètres, est désormais en plein travaux, et devrait voir le jour d’ici la fin de l’année. Budgété environ 10 millions d’euros, il a été financé conjointement par le Conseil départemental du Val-de-Marne, maître d’ouvrage du projet, la Métropole du Grand Paris, la région et l’Agence de l’eau.
“Pour le moment l’eau a été déviée de Cachan à Issy, mais à un moment on ouvrira le robinet et l’eau sera là. On n’est pas dans le lit naturel de la Bièvre, on lui redonne un parcours. La promenade sera séparée de l’eau et de la route par des murs, qui retiendront la Bièvre. Le débit de la rivière sera contrôlé, afin d’éviter toutes sortes d’inondation”, explique Benoît Kayser. La Bièvre, qui passera sous le gymnase Raspail, nécessite un aménagement particulier. “cela va entraîner une certaine bétonisation de l’espace, mais qui est nécessaire. On est dans un milieu urbain très dense, il faut une construction en profondeur pour pouvoir ancrer profondément et solidement les berges. On a bien sûr fait plusieurs études de sol avec des professionnels. La logique environnementale et hydraulique sont respectées”, assure le chef de projet. La renaissance de la Bièvre s’accompagne du retour “d’un habitat naturel avec une faune et une flore particulière, qui sera attentivement entretenue et surveillée. On espère que dans ce milieu humide les espèces vont revenir.”
A quand la Bièvre à Paris ?
A quand la Bièvre de retour à Paris ? Ce serait évidemment la suite logique de cette renaturation. Dans la capitale, la rue de Bièvre, où passait la rivière, a été surtout connue ces dernières décennies pour y avoir abrité la demeure de l’ancien président de la République, François Mitterrand, dans le Vème arrondissement. Aujourd’hui, la question ne relève toutefois pas de la science fiction, et la renaissance parisienne de la Bièvre fait partie des promesses de campagne de la maire socialiste Anne Hidalgo. Une étude de faisabilité sur la réouverture de la Bièvre dans la capitale doit être lancée cette année.
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Je découvre tardivement cet article et je fulmine.
Les fonctionnaires ne se lasseront jamais de gâcher l’argent public et de considérer “les autres” (traduisez “les anciens, ces pauvres types incapables”);
En réalité la Bièvre a été canalisée en raison des nuisances que son cours lascif provoquait alentours; Odeurs et moustiques en particulier.
Désormais l’écologie punitive étant aux manettes on va dépense des millions d’euros pris dans les poches sans fond des contribuables pour défaire ce qui a été fait et ainsi recréer des invasion de moustiques qui désormais seront “tigres” et vecteurs autrement plus dangereux qu’autrefois… mais qu’importe, puisque les écolos qui décident et théorisent n’habitent pas, au contraire de ma famille, dans la vallée de la Bièvre.
La Bièvre était un égout à ciel ouvert jusqu’à la fin du XIXème siècle, du fait des tanneries, peausseries, teintureries et boucheries industrielles qui étaient installées le long de son cour, et y rejetaient tous leurs déchets. C’est pourquoi elle a été enterrée.
Il n’y a plus aucune industrie le long de cette rivière, qui peut partiellement être remise à ciel ouvert, et faire l’objet d’une balade aménagée.
Vous avez certes raison quand aux abus du 18eme et du 20eme siècle mais surement pas du coté de l’Hay; Plus en aval oui, mais enfant, là ou se trouve le collège, je collectais des têtards et les tritons sans risquer ma vie et sans devoir me boucher le nez;
Mais habitez vous près de la bièvre là ou elle a été remise à l’air libre et ou je jouais étant enfant ?
Les nappes d’hydrocarbure s’y voient régulièrement; En été l’odeur n’a rien de bucolique et les moustiques sont devenus si présents que des désinsectisations a grand renfort de fumées probablement pas si inoffensives que cela pour l’environnement et les humains qu’on nous le dit doivent être effectuées…. Ha que voila de belles balades en perspectives !
” A l’heure de la désindustrialisation …, cette disparition a été considérée comme n’étant pas une fatalité.”
La désindustrialisation qui est un vrai drame pour notre pays, présentée comme une opportunité.
S’agit-il d’une maladresse ou d’un lapsus révélateur ?
Je me permets une petite rectification par rapport au texte de votre article, par ailleurs excellent :
L’emplacement de la rue de Bièvre à Paris ne correspond pas au tracé de la rivière. Son nom proviendrait peut-être d’un canal de dérivation alimenté effectivement par cette rivière mais très différent de son cours “naturel”. De fait, après avoir traversé les jardins des services du museum d’histoire naturelle situés du côté impair de la rue Buffon, la Bièvre se jetait dans la Seine à peu près au niveau de l’actuelle gare d’Austerlitz.
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