Pour faire face à la crise sociale consécutive de la crise sanitaire, le Potager de Marianne, ce chantier d’insertion de l’Andes (Association nationale des épiceries solidaires) qui recycle des primeurs invendus au profit de l’aide alimentaire depuis le Min de Rungis, a doublé ses effectifs et traite deux fois plus de marchandises. Reportage.
Oignons d’un côté, patates douces de l’autre, une dizaine d’employés préparent des cageots de légumes sur une ligne d’emballage flambant neuve. Un peu plus loin, d’autres composent des paniers pour la start-up Hors-Normes qui propose des paniers de légumes dont les normes ne correspondent pas à celles des supermarchés, à des prix plus attractifs. “Jusqu’à maintenant, nous étions sur un rythme plutôt artisanal. Au mois d’octobre nous avons reçu deux nouvelles lignes de production pour passer à un stade industriel. Cela permet aux employés de travailler dans les mêmes conditions que les entreprises de l’agroalimentaire. Notre chantier d’insertion devient ainsi plus compétitif avec une capacité de traitement de 2 tonnes de fruits et légumes par heure, soit 1300 paniers”, résume Cédric Péchard, le directeur du site. Cet investissement de 250 000 euros a été financé par le Fonds départemental d’insertion, la fondation Carrefour et Kelloggs.
Nouvel espace, doublement de la production
En parallèle, le chantier a quitté le vieil entrepôt vétuste occupé jusqu’à la fin de l’année 2020 en périphérie du marché pour s’installer dans un espace de 1500 m2 au cœur des pavillons de grossistes. Objectif : doubler l’effectif et le volume de marchandises traitées. Le défi a été relevé. Désormais, près de 2000 tonnes de fruits et légumes transitent par le Potager de Marianne qui propose 40 postes emplois en insertion (contrat à durée déterminée d’insertion de 26 heures par semaines).
Un chantier d’insertion avant tout
“Nous accueillons des publics très éloignés de l’emploi. A travers notre accompagnement, nous veillons à éliminer les difficultés (santé, logement, financières,…) qui empêchent ces personnes d’être pleinement mobilisées sur un projet de construction ou de reconstruction professionnelle. Ils passent en moyenne neuf mois parmi nous et leur CDDI peut être renouvelé jusqu’à quatre fois. Tous veulent avancer et nous leurs proposons de passer des certifications, le permis de conduire, ou encore de réaliser des stages”, explique Sophie Constantinidis, chargée d’accompagnement socio-professionnel.
200 épiceries solidaires approvisionnées
Sur les 550 structures d’aide alimentaire en Île-de-France, 200 sont aujourd’hui approvisionnées par le chantier d’insertion du Potager de Marianne, dont un tiers d’organisations affiliées au réseau Andes. Une flotte d’une dizaine de camions transporte les cargaisons de fruits, légumes et autres produits de consommation vers ces épiceries sociales autres structures d’aide alimentaire.
Ce lundi, plusieurs dizaines de bénévoles d’épiceries de l’Andes étaient présents sur place pour une réunion. “Nous avons créé L’Envol à Saint-Ouen-l’Aumône il y a dix ans. Au départ, nous étions tributaires des dons de nos partenaires locaux et ça n’était pas régulier. Après avoir adhéré à l’Andes, nous avons commencé à recevoir des arrivages fréquents de produits variés”, reconnaît Jean-Luc Savary, le président de l’association basée dans le Val-d’Oise. “Nous recevons une feuille Excel avec les produits proposés et nous pouvons faire notre commande en fonction des disponibilités, de la saisonnalité et des besoins. Les produits nous sont livrés sous 48 heures”, explique Bernard Camilleri, bénévole pour l’association La Boutique de Conflans-Sainte-Honorine.
Les services de l’État dans la région Île-de-France, comptent énormément sur les acteurs de ce secteur pour lutter contre l’insécurité alimentaire. “Nous travaillons avec l’Insee (Institut national de la statistique) pour affiner les chiffres mais nous estimons qu’il y a eu une hausse de 20% des bénéficiaires de l’aide alimentaire en Île-de-France. Sur les 12 millions d’euros du volet associatif du Plan de relance, nous avons consacré 70% à des projets de lutte contre la précarité alimentaire. Du développement d’épiceries à la création de structures mobiles ou à des outils numériques”, chiffre Cécile Tagliana, commissaire à la lutte contre la pauvreté auprès du préfet de la région Île-de-France.
Objectif : 300 nouvelles épiceries solidaires en France
“Nous vivons un moment charnière du développement de notre association qui coïncide, hélas, avec une hausse des besoins en aide alimentaire. Après avoir doublé nos capacité de production, nous comptons ouvrir deux à trois nouveaux chantiers d’insertion dans des régions où nous ne sommes pas encore présents. De même, nous nous sommes engagés auprès du ministère de l’Agriculture, via le plan France Relance, à créer 300 nouvelles épiceries solidaires dans toute la France”, annonce le directeur général de l’Andes, Yann Auger.
Une cabane pour faciliter le dépôt des invendus par les grossistes
“Au marché de Rungis, nous aimons le Potager de Marianne parce que nous détestons le gaspillage alimentaire et le chômage. C’est le grossiste des épiceries solidaires. L’année prochaine, nous y ferons installer une unité de compostage de la société Upcycle et nous projetons également de créer une cabane pour que des entreprises du marché puissent venir déposer des produits”, propose Stéphane Layani, le président de la Semmaris, la société d’économie mixte qui gère le Min de Rungis.
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