Enseignants du 1er et du 2d degré, personnels de vie scolaire, parents d’élèves des établissements des communes de Garges-lès-Gonesse, Sarcelles et Villiers-le-Bel (Val-d’Oise)… Ils étaient près d’une soixantaine réunis ce jeudi matin sur l’esplanade des Flanades à Sarcelles. Objectif : soutenir la journée de grève des accompagnants d’élèves en situation de handicap (AESH) et partager leur colère contre ce qu’ils estiment être une précarisation de plus en plus forte de leurs conditions de travail.
« J’ai honte de notre système d’éducation », lance une mère. « On nous abandonne ». Main dans la main, enseignants et parents d’élèves, sont venus soutenir la mobilisation et l’appel à la grève lancé par une intersyndicale (CGT éducation, FNEC-FP-FO, FSU, SNALC, SNCL-FAEN, SUD éducation) pour réclamer la valorisation du rôle et du salaire des accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH).
« Je suis AESH depuis deux ans et demi et je peux vous dire que ce n’est pas facile, témoigne Natacha du groupe scolaire Jean Mermoz de Sarcelles. Il n’y a aucune reconnaissance, on est payé environ 790 euros pour 24 heures par semaine. Je tiens parce que j’ai trois enfants que j’élève seule. Mais si une opportunité se présente j’abandonnerai. Et pourtant, c’est passionnant de pouvoir aider un enfant à faire une scolarité malgré son handicap. »
Ces élèves présentent des handicaps d’une grande diversité qui vont de troubles cognitifs ou mentaux à des troubles du développement, de la motricité ou sensoriels, voire d’une combinaison de déficiences. Marie, 62 ans, dit avoir de la chance de s’occuper depuis trois ans du même enfant, âgé de 11 ans, scolarisé en CM1 et qui souffre d’autisme : « Maintenant on se connait bien avec l’enfant et la famille. Il faut savoir gérer parce qu’il est costaud. »
Cette responsabilité, elle l’assume depuis bientôt cinq ans. Or, elle assure avoir débuté sans formation, presque au pied lev,é après avoir été un temps secrétaire dans le privé, puis assistante de vie scolaire (AVS). Aujourd’hui, pour compléter son salaire d’AESH, elle travaille également comme animatrice et fait du soutien scolaire.
Ces conditions de travail déjà difficiles semblent s’être dégradées avec la mise en place des pôles inclusifs d’accompagnement localisés (PIAL). Instaurée depuis 2020, la nouvelle organisation vise à mettre en adéquation les ressources en accompagnement avec les besoins identifiés par l’équipe pédagogique et éducative. Effet pervers, le système induit la nécessité d’une plus grande flexibilité des AESH qui peuvent être amenés à couvrir une zone géographique plus large, à suivre davantage d’élèves et à s’adapter en conséquence au fonctionnement des différentes équipes pédagogiques.
Baisse des dotations horaires générales
Au-delà des AESH, la mobilisation conjointe des personnels d’éducation de Garges, Sarcelles et Villiers-le-Bel a aussi cherché à pointer du doigt la diminution de la dotation horaire globale (DHG) pour la rentrée de septembre 2021, c’est-à-dire le nombre d’heures qui sera attribuée à chaque établissements par la direction académique, afin d’assurer l’ensemble des enseignements (obligatoires et facultatifs) sur la semaine.
« Où est l’égalité des chances dont parle le ministre? », interroge Agnès, mère de deux enfants scolarisés au collège Henri Matisse et au lycée Simone de Beauvoir de Garges-lès-Gonesses. Dans les collèges de cette commune, les DHG passeront de 3 462 en 2020-2021 à 3 300 en 2021-2022 pour environ 2 500 élèves selon les données du rectorat. Avec Fatima, dont les deux enfants sont dans ce même collège, et d’autres parents, elles ont déjà été reçues par le rectorat. Pour quels résultats ? « Quelques heures en plus mais supplémentaires. Des miettes. Nous ce qu’on veut, ces des heures postes pour pouvoir maintenir les effectifs des classes à des niveaux convenables, maintenir les options et les accompagnements individuels. Mais avec ce qu’on nous a présenté, un poste de professeur de français et un de mathématiques devront être supprimés au collège Henri Matisse. Il ne sera plus possible de faire de demi groupe et au collège les classes vont atteindre 30 élèves. »
Ce constat est partagé par les enseignantes du collège Henri Matisse, dont Caroline, professeur d’anglais qui se prépare à devoir sacrifier quatre heures d’option « anglais européen » en 3ème et en 4ème « parce qu’au regard des besoins pour les élèves, on pense qu’il faut donner la priorité au français et aux mathématiques. » Tout cela dans un contexte social dégradé, attesté par l’indice de positionnement social (IPS) attribué par l’éducation nationale aux établissements de Garges-lès-Gonesses (77,3) Sarcelles (75) et Villiers-le-Bel (72,1), à comparer avec l’IPS de 114,7 du lycée-collège Maurice Ravel dans le 20ème. En fait, « c’est l’éducation qu’on abandonne, en particulier dans nos quartiers dits en zone prioritaire », tonne Gwen, enseignante à l’école primaire Jean-Jaurès de Sarcelles.
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