Compliqué pour les hôpitaux de Saint-Maurice d’assurer des soins psychiatriques modernes dans un ensemble patrimonial du XIXᵉ siècle. La direction prévoit de déménager des services du site classé Esquirol vers un nouveau bâtiment pour construire logements et locaux d’activité médicale. La CGT et la gauche départementale dénoncent un cadeau aux promoteurs et une dégradation des soins.
Avec ses beaux bâtiments de style néoclassique, sa chapelle aux colonnes doriques, ses patios et ses allées verdoyantes donnant sur la Marne, l’hôpital Esquirol de Saint-Maurice procure un cadre idyllique aux patients et au personnel. Il est du reste partiellement classé à l’inventaire des monuments historiques. Pourtant, l’outil de travail est aujourd’hui à bout de souffle. Il n’offre plus assez de chambres individuelles. Les locaux sont dispersés sur 36 hectares et sont étroits. Certaines unités ne sont plus aux normes, l’accessibilité aux personnes à mobilité réduite fait défaut et le complexe est une passoire thermique. À tel point que dans un rapport à paraître, le Contrôleur général des lieux de privation des libertés a pointé des conditions d’hospitalisation inadaptées en psychiatrie.
C’est dans ce contexte que la direction a décidé de consacrer une partie de son plan d’investissement décennal de 230 millions d’euros à la modernisation du site Esquirol. Plusieurs services de soins de suite et de réadaptation (SSR), qui occupent des unités dans le bas de la parcelle, doivent déménager dans un nouveau bâtiment de 110 lits qui va être construit sur le site voisin de l’hôpital National. L’espace libéré, d’une surface d’environ 24 000 mètres carrés, sera restructuré mais ne sera plus dédié aux soins. “La question s’est posée de l’avenir de ces locaux inadaptés aux soins d’aujourd’hui, mais à forte valeur patrimoniale. C’est pourquoi nous avons engagé une réflexion avec la mairie de Saint-Maurice pour reconvertir ces surfaces en activités tertiaires (logement, universités, bureaux) dans le cadre du développement des usages mixtes ville-hôpital“, expliquent les Hôpitaux de Saint-Maurice.Cette réalisation doit prendre la forme d’un bailemphytéotique pour une durée encore à définir.
L’instruction du dossier débute fin novembre par le Conseil national des investissements en Santé. Suite à cette étape, le concours d’architectes sera lancé. Le groupe hospitalier travaille sur ce projet avec la mairie, la direction régionale des affaires culturelles et les architectes des bâtiments de France pour préparer le programme technique des futurs locaux avec des représentants du personnel et des associations d’usagers.
La CGT veut conserver des soins sur place
Lors d’une consultation réalisée en 2020 sur l’avenir des infrastructures, des représentants du personnel avaient demandé à rester dans le bas du site Esquirol. “Les élus réclamaient une rénovation pour préserver les activités de soin. Chaque service (environ 18 lits) y est organisé autour d’un patio permettant la déambulation des patients dans des espaces plus intimes. Ce qui est propice à la qualité des soins et des conditions de travail en psychiatrie”, justifie la CGT. Le bail à un promoteur est un autre motif d’insatisfaction. “Ces locaux, classés au patrimoine national et contenant de nombreux patios, sont exposés plein sud à flanc de colline avec vue dégagée. Ils seront loués en bail emphytéotique de 30 ans pour un montant de 14 256 000€ soit 0,86 €/m²/mois, et donc 310 €/m² sur toute la période. C’est le cabinet SEGAT, mandaté par la Direction, qui a fixé le montant de la redevance du bail. La Direction refuse, malgré les questions en Comité Technique d’Etablissement (CTE du 18 octobre) et un courrier de relance (du 31 octobre), de donner les informations claires, complètes et compréhensibles dont elle dispose sur la nature du bail et les raisons d’une redevance si faible. Le promoteur qui récupèrera le bien pourrait y développer des activités tertiaires : bureaux, logements, université“, dénonce le syndicat qui joint le schéma ci-dessous à son propos.
Le groupe d’opposition au conseil départemental, Val-de-Marne en commun, s’est aussi mêlé du sujet et partage les inquiétudes de la CGT. “Tenant compte de sa symbolique, pourquoi ne pas faire de cette partie des Hôpitaux de Saint-Maurice un lieu de valorisation des pratiques de la santé mentale en y associant les deux facultés de médecine du Val-de-Marne et Santé publique France dont les locaux se trouvent à 500 mètres ! (…) Enfin, l’investissement envisagé ne doit en aucun cas avoir un impact négatif sur les ressources humaines corrélées aux prises en charge thérapeutiques, compte tenu du déficit dramatique de la démographie des professions de santé“.
Le maire de Saint-Maurice, Igor Semo (LR), qui préside le comité de pilotage, estime pour sa part que la CGT force le trait. “Une cession avait été envisagée au départ pour faire des logements et des activités. Je m’y étais opposé. Depuis, les choses ont évolué. et un dialogue s’est instauré. Les professionnels sont favorables à ce projet. Le changement de destination des locaux va être contraint parce que le site est classé. Qui s’opposerait à la construction de logements sociaux et à l’implantation d’activités en lien avec la santé ?”, questionne l’élu. Le groupe hospitalier estime lui que le chiffrage du syndicat est caricatural et précise que ni la durée, ni le montant du bail ne sont déterminés à ce jour. “Une estimation prudentielle a été réalisée par un cabinet spécialisé. La valeur finale du bail ne pourra être confirmée qu’au moment de la contractualisation”, indiquent les Hôpitaux.
La France est un pays où les mots ‘concertation’ et ‘compromis’ sont considérés comme des aveux de faiblesse ou des insultes …
Ce site classé est magnifique, mais est devenu inadapté aux services actuels, et d’un coût très élevé de remise aux normes. Il faut donc se concerter et trouver un compromis entre les différentes contraintes et obligations, mais déjà les oppositions se lèvent, et bientôt viendront les recours multiples en justice …
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