A Valenton, l’Institut Robert Merle d’Aubigné (Irma) accueille chaque année quelque 3 000 personnes qui s’attellent à reconstruire un projet de vie après avoir subi une amputation. L’un des fondamentaux : le sport, merveilleuse échappatoire pour se sentir toujours aussi vivant. Une des difficultés reste néanmoins le coût des prothèses. Un enjeu rappelé ce jeudi à l’occasion d’une visite ministérielle.
Petits sprints, travail sur la foulée, sauts… Dans le gymnase ce jeudi, trois athlètes enchaînent les exercices malgré une jambe en moins. Ce matin, ils testent de nouvelles lames de courses. “J’ai l’impression de bondir comme un kangourou”, plaisante l’un. “J’ai été amputé il y a maintenant 30 ans. Mon séjour ici à l’époque m’avait redonné envie de faire du sport et a contribué à ce que je mène aujourd’hui une vie sympa”, explique cet employé de banque. Son partenaire d’entraînement, agent à la RATP, est pris en charge depuis trois mois suite à son opération. “Je me prépare à reprendre ma vie d’avant, j’ai un emploi qui est adaptable, confie-t-il. Pour l’instant, j’utilise ma prothèse de marche avec ces quelques exercices. A terme, j’aimerais reprendre la piscine, retourner à la salle de musculation”, se projette déjà ce pompier volontaire. A l’autre bout du gymnase, ce-sont des golfeurs amateurs, debout ou en fauteuil roulant, qui travaillent leur adresse. D’autres encore s’étirent, jouent au ping-pong.
La pratique sportive, à l’Irma, fait partie des fondamentaux de la prise en charge des patients. Le centre, créé en 1969, est du reste le fruit d’une collaboration entre le professeur Robert Merle d’Aubigné, pionnier de la chirurgie orthopédique, et Emilion Michaut et Lucien Rabeux, masseurs-kinésithérapeutes installés à Villeneuve-Saint-Georges et athlètes sélectionnés pour les Jeux Olympiques dans les années 1950.
“Nous accueillons des patients venant pour des problèmes locomoteurs et la majorité sont admis après une amputation. Nos équipes pluridisciplinaires les accompagnent dans un parcours personnalisé de récupération, explique Nicolas Touchon, le directeur général de l’Institut. Nous sommes très engagés dans la pratique du sport et nous adaptons en fonction de leur pratique antérieure.”
Certains fidèles du lieu sont aujourd’hui des célébrités, à l’instar de Philippe Croizon, amputé des quatre membres à l’âge de 25 ans après s’être électrocuté en touchant une ligne à haute tension alors qu’il démontait l’antenne de sa télévision. Depuis, il a enchaîné les exploits, de la traversée de la Manche à la nage au record de plongée profonde. Ici, on croise aussi Nélia Barbosa, kayakiste handi-sport de Champigny-sur-Marne ou le cavalier brésilien Rodolpho Riskalla, tous deux médaillés d’argent aux Jeux Paralymiques de Tokyo 2020. Des modèles d’espoir pour ceux qui démarrent leur long parcours du combattant.
Réputé pour son expertise dans l’appareillage, l’institut accueille essentiellement de patients venus d’Île-de-France mais aussi de toute la France et même de l’étranger. L’Irma dispose par exemple de matériels de prise de mesure numérisée des moignons auxquels adapter des prothèses. La production est confiée à un partenaire industriel extérieur mais les calibrages au cas par cas sont réalisés à Valenton. “Il est nécessaire de changer de prothèse au bout d’un certain temps. C’est un dispositif médical qui s’altère du fait de son utilisation quotidienne. Il faut également l’adapter au corps qui évolue”, détaille Nicolas Touchon.
Le coût des prothèses sportives en question
Si les nouveaux appareillages dédiés au sport font aujourd’hui des miracles, le coût des ces concentrés de technologie reste en revanche extrêmement élevé, ces produits ne faisant pas l’objet d’une distribution de masse. Pour courir lorsque l’on est amputé, les lames coûtent ainsi plusieurs milliers d’euros et ne sont pas prises en charge par l’Assurance maladie, contrairement aux prothèses de ville. Un seuil rédhibitoire pour beaucoup.
“Le gouvernement a récemment validé la suppression de la TVA sur les prothèses de sport mais le reste à charge est lourd, entre 5 000 et 10 000 euros. Il y a un enjeu, notamment dans le cadre des futurs Jeux Olympiques et Paralympiques d’accès au sport. Nous militons pour une meilleure prise en charge de ces prothèses adaptées”, plaide le directeur de l’Irma, qui faisait visiter son établissement ce jeudi à la ministre déléguée au sport, Roxana Maracineanu, et à la secrétaire d’Etat aux personnes handicapées, Sophie Cluzel, à l’occasion de la semaine du sport olympique et paralympique.
Quelques acteurs tentent certes de proposer de l’accessible. Ce matin par exemple, les lames avec lesquelles s’entraînent les coureurs, mises à disposition de l’institut et ses patients dans le cadre d’un partenariat, relèvent d’un projet pensé pour être à hauteur de bourse. C’est la jeune pousse occitane, Hopper acessibility, initiée par un poly-amputé et des ingénieurs de l’école des mines d’Albi, qui a eu l’idée de produire ces lames en réutilisant des chutes du carbone destiné à la fabrication des Airbus. Un exemple prometteur d’économie circulaire. En attendant, beaucoup de prothèses sportives restent hors d’atteinte des porte-monnaie.
Le programme des deux ministres, concocté par le député LREM de la circonscription Laurent Saint-Martin, qui multiplie les invitations ministérielles en ce début 2022, s’est ensuite prolongé dans une école élémentaire de Villeneuve-Saint-Georges, Jules Ferry, labellisée Génération 2024, pour assister à un atelier de Cecifoot et dialoguer avec Ludivine Munos, ex-nageuse paralympique.
Ce matin, visite à l’école Jules Ferry de @Villeneuve94190 où les élèves de CE2, dont plusieurs en ULIS, pratiquent les 30 minutes d’activité physique quotidienne
— Roxana Maracineanu (@RoxaMaracineanu) January 27, 2022
L’occasion de sensibiliser les enfants au handicap grâce à la #SOP2022#Mission30minutes @s_cluzel @LauStmartin pic.twitter.com/xmyTwNCFXT
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