Longtemps attendu, le lancement de la rénovation de la cité de l’Abreuvoir, un quartier enclavé à l’est de Bobigny, est maintenant sur les rails. Au total les quelques 1 500 logements seront rénovés ou restructurés. Avec la promesse d’un grand changement pour les 3 000 habitants de la cité.
Il faudra encore patienter avant les premiers coups de pioches. “Ils pourraient intervenir au deuxième trimestre 2023“, précise Emilie Marre. “C’est un des plus gros projets de Seine-Saint-Denis Habitat. Plus de 1 000 logements seront réhabilités, 195 restructurés et près de 300 démolis“, décrit la cheffe de projet du bailleur social départemental.
250 millions d’euros
Situé principalement sur la commune de Bobigny (une partie étant à Drancy), l’Abreuvoir fait partie des 216 quartiers d’intérêt national où est déployé le nouveau programme de rénovation urbaine (NPNRU). C’est aussi l’un des plus pauvres d’Ile-de-France avec un revenu médian de moins de 9 000 euros par an, par famille.
“L’objectif c’est changer l’image du quartier et d’améliorer le cadre de vie des habitants“, souligne Emilie Marre. A ses côtés Olivier Klein, ancien président de l’Anru (Agence nationale de rénovation urbaine), tout juste nommé ministre de la ville et du logement, a fait le déplacement à Bobigny.
Au total 250 millions d’euros doivent être investis à l’Abreuvoir, dont 110 millions sur financement de l’Anru (à Est Ensemble qui pilote le projet, la ville de Bobigny et Seine-Saint-Denis Habitat, le bailleur des logements concernés) qui soutient par ailleurs à hauteur de 2,8 millions d’euros la rénovation de quatre tours de Seine-Saint-Denis habitat du quartier Chemin-Vert à Bobigny.
“On a été abandonné“
Selon les estimations de Seine-Saint-Denis Habitat, 5 millions d’euros supplémentaires seraient nécessaires. “Il y a une clause de revoyure avec l’Anru. Nous comptons sur votre action au gouvernement pour qu’on n’oublie pas le quartier de l’Abreuvoir“, rappelle Morad Agrebi, conseiller d’opposition (LREM) qui craint que le projet de rénovation soit limité. “Rien n’a bougé entre 2017 et 2022, maintenant il faut aller jusqu’au bout“, ajoute-t-il.
“L’Anru met 140 millions d’euros à Bobigny, ça veut dire qu’on va dépenser tous ensemble plus de 400 millions. C’est plus que se qui est engagé à Clichy-sous-Bois“, réagit Olivier Klein, maire de Clichy depuis 2011.
En attendant, Anne-Claire Mialot, directrice générale de l’Anru, pointe l’attente suscité par le projet et invite les maitres d’œuvre à engager les opérations.
“Ça fait longtemps qu’il y a urgence. Il y a des fissures partout, c’est mal isolé, les murs sont en carton, il y a des fuites, de l’humidité… Alors, bien sûr qu’on attend les travaux, mais c’est surtout qu’il faut ramener de la vie ici. On a été abandonné“, souffle une habitante du quartier, la cinquantaine.
Son dépit reflète la lente dégradation qui a marqué la cité sortie de l’imagination de l’architecte Emile Aillaud il y a 60 ans. A l’époque il impose le concept d’un “parc habité”. Les immeubles en forme de serpentin, les tours cylindres ou tripodées font sensation.
Mais très vite les façades souffrent d’infiltrations et les dégradations de tous ordres se multiplient. Les surfaces internes des logements, trop petites (51 mètres carrés pour un T3) attire une population à la recherche de faibles loyers.
600 familles à reloger
Les premières études du projet de rénovation urbaines avaient été lancées en 2017 avant sa validation par l’Anru début 2020. Mais la nouvelle équipe municipale du maire communiste Abdel Saadi, élue cette même année, change certains aspects du projet initial en demandant notamment le maintien de la salle des fêtes Edouard Vaillant. “On a dû relancer des études urbaines. Maintenant on travaille à signer le traité de concession avec l’aménageur ce qui sera fait en fin d’année“, précise Sandra Fraissine, directrice du projet pour Est Ensemble.
La réhabilitation d’une grande majorité des logements doit permettre de refaire les façades et les toitures ainsi que leur isolation, de reprendre les balcons, de rénover les halls d’entrée et les caves, de remplacer les portes palières, etc… En moyenne, le coût de l’opération est évalué à 85 000 euros par logement.
Plus coûteuse, la restructuration de 194 logements vise a recréer des habitations plus adaptées en termes d’espace, en rassemblant par exemple des T2 avec des T3. Surtout, elle implique de reloger les familles. En ajoutant le plan de démolition de 298 logements qui devrait débuter par les immeubles “équerre” au sud-est du mail, elles sont 600 dans ce cas là. A ce jour, 58 ont déménagé dont 13 à l’Abreuvoir et 8 dans d’autres quartiers de Bobigny.
Contrainte majeure, la cité de l’Abreuvoir étant labellisée “patrimoine du XXème siècle” et “architecture contemporaine remarquable”, tout changement est supervisé par les bâtiments de France.
Par ailleurs 390 logements nouveaux doivent également être construits pour diversifier l’offre de logements. Seine-Saint-Denis Habitat a ainsi obtenu une dérogation de l’Anru pour reconstruire 100 logements sociaux au sein de la cité. Près de 50 autres seront ouverts à l’accession sociale à la propriété et 165 à l’accession libre à la propriété. Action logement proposera, de son côté, 75 logements intermédiaire à la location.
Le projet de rénovation du quartier de l’Abreuvoir prévoit aussi la création d’un parc public de 4 hectares au cœur de la cité (dont 3 hectares seront rétrocédés à la ville par le bailleur), la construction de deux écoles maternelles (de 10 et 11 classes chacune) et la démolition de l’actuelle école Robespierre, la réhabilitation des écoles élémentaires Edouard Vaillant et Eugène Varlin (avec 6 classes supplémentaires) ainsi que de la Maison de l’enfance Guy Moquet, et la reconstruction de la crèche Danielle Casanova au sein d’un pôle petit enfance (avec 20 berceaux en plus). Les travaux doivent s’étaler en deux phases (la première étant concentrée au nord du mail) de 2023 à 2026 et de 2026 à 2028.
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