De nombreux élèves du collège Paul-Eluard de Bonneuil-sur-Marne n’ont pas repris les cours depuis la rentrée des vacances de Toussaint. Depuis de longs mois, un conflit oppose la direction de l’établissement au corps enseignant. Une grève a éclaté lundi 7 novembre. Les parents d’élèves excédés par l’enlisement de la situation ont envahi le collège. Une plainte a été déposée.
Malgré la pluie, les personnels grévistes du collège Paul-Eluard de Bonneuil-sur-Marne sont venus manifester sous les fenêtres de l’inspection académique ce mardi matin. Les enseignants dénoncent un climat délétère avec leur direction et réclament à leur hiérarchie le départ du chef de l’établissement. “Les premières plaintes de collègues ont commencé il y a trois ans, puis petit à petit, elles se sont généralisées. Depuis février, plus personne ne veut être professeur principal, pour ne pas avoir à travailler avec la principale, résume Jean-Michel Harvier, enseignant en histoire-géographie également secrétaire national du Snes-FSU en charge de l’activité juridique. Il y a des brimades, des intimidations, des décisions sans concertation qui sont imposées à ceux qui n’osent pas dire non. Il y a de la peur. L’inspection académique connaît le problème et est venue à plusieurs reprises. En septembre, une enquête interne a été lancée. Nous attendons les résultats qui nous sont promis pour jeudi. Dans ce contexte, la direction nous a réclamé à la rentrée de réaliser une évaluation pédagogique de l’établissement. Le personnel a refusé dans sa grande majorité car il est impossible de travailler avec elle. La grève a donc été votée”.
Face à cette situation de blocage, les parents d’élèves confient leur désarroi. Ils ne veulent pas s’immiscer dans le conflit interne mais réclament à l’inspection académique une résolution rapide du problème. “Nos enfants sont pénalisés par ce mouvement qui dure depuis la rentrée. Ils ont quelques heures de cours de temps en temps, rien le reste du temps. Nous exigeons une reprise des cours rapidement”, expliquent les parents de la liste d’indépendants. Plusieurs dizaines de parents d’élèves se réunissent régulièrement devant le collège pour dénoncer l’enlisement de la situation. Excédés, ils ont décidé ce lundi après-midi de s’introduire dans l’établissement.
Un rassemblement devant le commissariat de Créteil
Selon plusieurs témoins, ils sont entrés dans les locaux. Un enseignant a tenté de les contenir. La police a été prévenue. Deux agents sont venus demander aux parents de quitter les lieux. Une plainte a été déposée par la direction contre un père de famille. “Ce mardi matin, nous étions réunis devant le collège à nouveau quand les policiers se sont présentés pour interpeller le papa. Nous l’avons entouré pour nous y opposer, le maire est arrivé et nous sommes parvenus à leur faire comprendre qu’il se rendrait lui-même à sa convocation à 11 heures”, résume une représentante des parents d’élèves. Un rassemblement a été organisé spontanément devant le commissariat de police de Créteil où était convoqué le père de famille, entendu pour intrusion dans un établissement scolaire. “C’est incompréhensible. L’inspection académique aggrave la situation. Qu’ils retirent leur plainte ou qu’ils portent plainte contre toutes les personnes qui ont participé à l’envahissement du collège“, ajoute l’élue des parents.
Le maire, Denis Oztorun (PCF), dénonce pour sa part une gestion conflictuelle de cette situation par les services départementaux de l’éducation nationale. “Notre présence devant ce commissariat n’est en rien contre la police. Elle fait son travail. En revanche, l’inspection académique prend une grande responsabilité en envenimant les choses à travers cette plainte. Ils ont décidé de jouer le rapport de force. Les enseignants ne font pas grève par plaisir mais pour offrir de meilleures conditions de travail et d’apprentissage pour leurs élèves. La colère des parents est légitime parce que nous avons des gamins de Bonneuil-sur-Marne qui traînent en ville depuis la rentrée plutôt que d’être en classe. Nous ne lâcherons pas tant que nous n’aurons pas de solution et ce, quoi qu’il en coûte, comme dirait le président Macron”.
L’inspection académique a demandé le dépôt de la plainte
“À la demande du recteur, nos services ont mené une enquête. Nous avons convenu de nous réunir le 17 novembre avec une délégation de personnels et avec des parents le 21. Les conclusions d’enquête ne seront toutefois pas communiquées. Seul le recteur en est destinataire. Nous respectons le droit de grève même si nous avons du mal à la comprendre étant donné qu’une date a été proposée pour échanger. Concernant l’intrusion des parents d’élèves de ce lundi, j’ai donné pour consigne à la direction de déposer plainte et j’encourage le personnel agressé verbalement à faire de même”, réagit Anne-Marie Bazzo, directrice académique, pour qui cette situation rappelle celle du lycée Léon Blum de Créteil, en septembre dernier. Concernant l’agression verbale évoquée par la directrice, les parents démentent toute agressivité et évoquent une occupation paisible.
Un membre du corps enseignant, souhaitant rester anonyme, estime que les grévistes véhiculent un récit faussé. “Le collège Paul Eluard présente 40% des enseignants avec plus de 8 ans d’ancienneté dépassant de plus de 12 points le score moyen des établissements du département du Val-de-Marne. Là où l’éducation prioritaire tend en général à être assurée par des équipes jeunes et mobiles, le collège de Bonneuil sur Marne met en avant un véritable phénomène de sédentarisation des enseignants dont l’ancienneté peut dépasser la vingtaine d’année. Ceci n’est pas sans conséquence sur le rapport que ces enseignants ont face au changement (…) L’arrivée de la cheffe d’établissement dont le but était de construire les réponses à une situation scolaire inquiétante tant en termes de résultats scolaires que du développement personnel des élèves ne pouvait qu’entrer en conflit avec cette équipe enseignante déjà bien installée”. D’autre part, cet enseignant signale des pressions de collègues pour faire grève ainsi que des refus réitérés à deux reprises de travailler avec l’institution pour un retour au calme.
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