Justice | | 11/11/2022
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Corruption à Fresnes: prison ferme requise contre Mimran et un ex-directeur de détention

Corruption à Fresnes: prison ferme requise contre Mimran et un ex-directeur de détention © CD

“Une affaire hors norme par le contexte et par les acteurs”: quatre ans de prison ferme ont été requis jeudi contre un ancien gradé de la prison de Fresnes et deux ans contre l’ex-homme d’affaires et ancien pensionnaire de l’établissement Arnaud Mimran, poursuivis pour corruption.

Alors chef de la division 3 de Fresnes (Val-de-Marne), Khalid El Khal, 53 ans, est jugé devant le tribunal correctionnel de Créteil pour “corruption passive” et “association de malfaiteurs”, poursuivi pour avoir touché de l’argent en échange d’avantages accordés à trois détenus de la prison de janvier 2016 à mars 2018, dont le très médiatique Arnaud Mimran.

Ce fonctionnaire n’a pas seulement “franchi la ligne jaune de la déontologie, mais la ligne rouge du droit pénal”, a assuré le procureur Stéphane Le Tallec en requérant quatre ans de prison ferme avec mandat de dépôt à effet différé et une interdiction définitive d’exercer dans la fonction publique.

“Des réquisitions arides”, pour l’avocat de M. El Khal, Me Philippe Ohayon, qui souligne que le ministère public “ne veut faire que du mal, ajouter de la douleur à la douleur” et fonde ses accusations “sur rien”.

Khalid El Khal “s’est peu à peu éloigné du serment, il lui a tourné le dos pour fouler aux pieds les valeurs de ce serment”, a tancé le procureur dans son réquisitoire.

Selon le magistrat, le contexte “dégradé” à Fresnes, deuxième maison d’arrêt de France et connue pour sa surpopulation, ses “rats” et “punaises”, sa cour de promenade “exiguë” ne peuvent “justifier le comportement” de l’ex-directeur de détention, qui gérait près de 900 détenus.

Les anciens détenus de l’établissement, dont deux acteurs de l’arnaque à la taxe carbone Arnaud Mimran et Fabrice Touil, sont considérés eux comme “les corrupteurs”.

Ils sont jugés pour avoir bénéficié d’un régime de détention privilégié grâce aux faveurs de M. El Khal.

Outre les deux ans d’emprisonnement ferme requis contre Arnaud Mimran, des peines de quatre ans ferme ont été requises contre Fabrice Touil, en fuite et absent à l’audience, et deux ans ferme contre Eric Robic, un chauffard français qui avait tué une Israélienne à Tel-Aviv en 2011 avant de prendre la fuite.

Les quatre prévenus de cette affaire nient les faits.

Des téléphones en cellule, moins de fouilles, plus de douches et de parloirs… “Les récompenses n’ont pas de prix, dans le cadre contraint de la détention”, a commenté le procureur, évoquant des “relations interpersonnelles privilégiées”.

En prison, une douche, un parloir, une circulation plus souple, “ça n’a pas de prix”, a-t-il insisté, et la gestion carcérale de Khalid El Khal a contribué à “rompre l’égalité de traitement entre détenus”.

“Il y a une rupture d’égalité dans l’infamie du traitement des détenus”, a lancé Jean-Marc Fedida, avocat d’Arnaud Mimran, qui espère que “l’indignation” du tribunal ne “sera pas portée sur une douche ou une promenade” mais sur les conditions de détention difficiles à Fresnes. 

Dans le cas d’Arnaud Mimran, l’ex-directeur est soupçonné notamment d’avoir joué un rôle dans son transfert à la prison du Havre, en plus d’autres avantages en détention.

Concernant Eric Robic, le fonctionnaire lui aurait accordé “une bienveillance particulière” dans la gestion de plusieurs incidents et obtenu un poste d'”auxiliaire sport”, lui garantissant deux douches quotidiennes. 

Son avocat, Me Samuel Habib, qui a assuré qu’il y avait “aucune preuve” de corruption, a demandé sa relaxe.

Le troisième, Fabrice Touil, est accusé d’avoir remis 5.000 euros à sa sortie de prison à l’ex-directeur contre des renseignements sur son dossier, nourrissant ainsi “un pacte de corruption”, selon des écoutes versées au dossier.

Son avocat, David-Olivier Kaminski, n’a pas plaidé.

Mercredi, Khalid El Khal, avait invoqué à de nombreuses reprises des “fanfaronnades”, quand la présidente l’avait confronté à ses discussions avec M. Touil.

“On pourra toujours dire que ce sont des fanfaronnades” mais “je trouve un peu court de s’en sortir avec un haussement d’épaules en disant +on déconnait+”, a estimé le procureur.

La décision sera rendue le 11 janvier.

par Alice LEFEBVRE

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