Escape game, débat et atelier Lego… pour faire sortir l’histoire de la démocratie des salles d’archives, les étudiants de l’Université Paris Est-Créteil (UPEC) sont allés à la rencontre du public à la bibliothèque de l’Abbaye Nelson Mandela. Ils racontent.
Représenter la démocratie à travers des objets : voilà l’objectif que s’étaient donné les dix étudiants du master d’histoire publique de l’Upec. Au programme : une exposition, mais aussi un escape game, un débat mouvant, où les participants peuvent changer de place en fonction de l’évolution de leurs opinions, ou encore un atelier de construction du klérotèrion, un instrument de tirage au sort utilisé sous la démocratie athénienne (Ve siècle av. J-C).
“Notre but, c’est de transmettre autrement que par les gros pavés que peuvent écrire les historiens. La question centrale, c’est comment faire pour transposer le discours scientifique en manifestation publique pour les jeunes“, explique Sébastien Malaprade, co-directeur du master d’histoire publique.
“Une passerelle entre l’université et le public“
Créée en 2015, cette filière s’attelle à former les étudiants aux différents modes de diffusion de l’histoire. Rien de mieux donc que d’organiser un événement hors des murs de l’université pour mettre en pratique leur savoir-faire.
D’abord pensé pour avoir lieu dans la bibliothèque universitaire de leur fac, l’événement s’est finalement inscrit dans le cadre des Nocturnes de l’Histoire, série d’événements visant à promouvoir la discipline, accueilli au rez-de-chaussée de la médiathèque de l’Abbaye Nelson Mandela de Créteil. “Exposer à la médiathèque est un plus pour nous, car cela nous permet de nous inscrire dans le territoire pour rencontrer des gens du coin, et de faire de cet événement une passerelle entre l’université et le public“, motive Sébastien Malaprade.
“Recréer des situations du passé pour comprendre leur fonctionnement”
Dans son atelier, les participants ont, par exemple, l’occasion de reconstruire avec des briques Lego cette machine à tirage au sort, utilisée pour désigner les membres du tribunal athénien. L’objet en question : une sorte de boîte rectangulaire bardée de trous, représentant les citoyens, et bordée d’un cylindre dans lequel on insère des dés de couleurs différentes. En fonction de leur ordre d’affichage, les dés colorés désignent ou non une ligne de citoyens qui devra siéger au tribunal.
“L’idée, c’est de recréer le processus d’archéologie expérimentale, c’est-à-dire de reproduire des situations du passé pour comprendre leur fonctionnement”, explique Julien. Une fois la construction finie, les participants ont le droit à une démonstration du fonctionnement du klérotèrion. Comme ces jeunes âgés de 10 à 12 ans venus d’un centre de loisirs de la ville, mais qui a donné du fil à retordre aux étudiants. “Un des deux groupes a été un peu moins réceptif que l’autre pendant l’atelier construction, c’était assez sportif. On s’est rendu compte qu’il faudrait simplifier le plan. En revanche, la démonstration leur a beaucoup plu”, résume Julien.
Rester neutre
Autre défi : rester neutre. La règle est d’autant plus importante que les élections présidentielles se tiennent dans quelques jours.
Pour Sébastien Malaprade, parler de démocratie à travers les objets qui la représentent permet justement d’éviter tout risque de parti pris partisan. Car si l’exposition propose plusieurs incursions sur les objets des démocraties grecque et vénitienne, elle fait également la part belle aux outils de la démocratie contemporaine, comme les médias, la banderole ou encore des symboles de la contestation urbaine comme un pavé. En exposant celui-ci, les étudiants d’histoire publique introduisent le débat sur la légitimité de la violence politique, tout en faisant référence aux diverses révolutions françaises ou à mai 68.
Le même questionnement est posé dans le cadre de l’atelier sur le klérotèrion. Après un quinquennat marqué par les demandes de référendum d’initiative citoyenne (RIC) des gilets jaunes, comment présenter des formes de démocratie alternative de manière sereine ? “À travers cet exemple, on a voulu montrer que le vote n’est pas une fin en soi, que d’autres versions de la démocratie existent : la démocratie n’est pas née en 1789“, estime Virgine Mathé, co-directrice du master. Mais le but reste avant tout de sensibiliser à la démocratie : “Les étudiants ont d’abord pensé à leur public, constitué de futurs ou jeunes électeurs“, insiste-t-elle.
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