A peine ouvert ce mardi à 11 heures, le point d’accueil de jour situé au centre sportif Marie-Thérèse d’Eyquem de Créteil a vu défiler par dizaines les réfugiés d’Ukraine. Ce lieu, mis à disposition par la mairie et géré par la Croix-Rouge, permet notamment d’aider les familles dans leurs démarches administratives. Il doit monter en puissance dans les prochaines semaines mais l’inconnue demeure sur les flux de personnes à venir.
“Vous êtes ukrainiens ? C’est par là qu’il vous faut passer”, guide un agent de police municipale de Créteil à un couple arrivé devant l’entrée principale du complexe sportif Marie-Thérèse Eyquem. Aux abords de ce centre, dans le quartier de l’Echat, plusieurs panneaux bilingues, aux couleurs du drapeau ukrainien, ont été installés pour indiquer la présence de l’accueil de jour. Des familles, des personnes seules ou accompagnées pénètrent sans rendez-vous dans une grande salle où on les fait patienter avec des boissons et des gâteaux. Sur deux thermos et une carafe ont été collés des post-it où l’on devine les mots “lait”, “thé” et “café”, en cyrillique.
En attendant que l’un des trois bureaux d’enregistrement se libère, les réfugiés patientent. Un petit coin ludothèque a été aménagé pour que les jeunes enfants puissent se distraire. C’est le cas d’Alica, âgée de 5 ans. “Nous avons passé 49 heures en voiture de Kiev jusqu’ici. Ce n’était pas facile”, explique en anglais sa maman, Olena, qui travaillait dans une agence de voyage de la capitale ukrainienne. “Dès qu’il y a eu l’invasion, ils nous ont averti que les choses commençaient à se gâter. Nous avons décidé de partir pour aller les chercher”, explique Victor qui habite Thiais avec sa femme qui a la double nationalité. Le papa a dû rester sur place. Olena ne se voit pas rester en France et espère rentrer chez elle mais souhaite en attendant apprendre le français pour tenter de reprendre son activité professionnelle. La scolarisation de sa fille est également une priorité. Au salarié de la Croix-Rouge qui va établir un diagnostic social et ouvrir leur droit au séjour, ils comptent notamment demander des informations sur le remboursement des frais de santé. “Une visite chez le dentiste s’impose déjà”.
Assise à une autre table, Alina est accompagnée de Rémy. Cette jeune maman qui ne parle ni anglais, ni français est amie avec la femme de ce Nogentais. Il s’est déplacé pour l’aider. “Elles ont quitté Kiev en auto-stop et sont arrivées jusqu’en Slovaquie. Là-bas, elles ont réussi à prendre un bus jusqu’à Prague où la famille de ma femme les ont récupérées en voiture”, explique-t-il. Venue pour entamer ses démarche de permis de séjour, elle compte exercer sa profession de coiffeuse à domicile. “Nous allons pouvoir compter sur tout le réseau de la communauté ukrainienne locale”, assure Rémy.
Près de 500 propositions d’hébergement en cours d’étude
L’organisation de ce centre d’accueil et d’orientation a été décidée en fin de semaine dernière après une sollicitation de la préfecture du Val-de-Marne. Une fois l’équipement mis à disposition par la mairie de Créteil, il a fallu l’aménager et mettre du personnel à disposition. “Cet accueil collectif, les diagnostics sociaux, l’ouverture des droits, c’est notre cœur de métier, nous le faisons à l’année avec le public des sans-abris. La difficulté pour nous est d’organiser tout cela à l’aveugle. Nous ne savons pas comment la situation va évoluer ni combien de personnes nous allons pouvoir accueillir. En 1h30, nous avions déjà reçu une quinzaine de ménages. Aujourd’hui, pour cette première journée, nous n’avons pas trop fait attention au nombre de personnes accueillies, nous nous en sommes sortis parce que nous étions suffisamment nombreux, mais il faudra peut être mettre en place une jauge”, résume Sandrine Cardoso, directrice adjointe du pôle lutte contre les exclusions de la Croix-Rouge.
Le président de la délégation territoriale de la Croix-Rouge en Val-de-Marne, Philippe Garcia-Marotta, explique que ce centre est appelé à monter en puissance. “Aujourd’hui nous assurions seuls la gestion mais dès demain, les services de la préfecture vont venir nous épauler. Nous devons également recevoir des agents de l’Office français de l’immigration et de l’intégration, voire de la CPAM (Assurance maladie) ou de la CAF (Allocations familiales). Parallèlement à ce centre, nos salariés travaillent également sur les recensements de solutions d’hébergement par les collectivités et les particuliers. Nous devons nous assurer qu’ils correspondent aux besoins. Nous réaliserons des contrôles pour veiller à ce qu’il n’y ait pas d’abus”.
“Nous allons nous ajuster au fur et à mesure”
Pour faciliter les démarches d’accès aux droits de séjour, la préfecture du Val-de-Marne doit mettre en place des créneaux spécifiques pour recevoir les ressortissants ukrainiens. Près de vingt jours après le déclenchement du conflit, le nombre total de personnes accueillies en Île-de-France s’élève à environ 4500 personnes. La cellule de crise gouvernementale table sur un accueil en niveau national d’au moins 100 000 personnes.
Le défi de la montée en charge des structures d’accueil va donc se poser rapidement. La ministre du Logement, Emmanuelle Wargon, en visite ce mardi pour l’ouverture de ce centre d’accueil a assuré que la collaboration entre les services de l’Etat, les collectivités, et la participation citoyenne seraient la clé. “Nous allons faire preuve de solidarité vis-à-vis des pays de premier accueil que sont la Pologne, la Moldavie ou la Roumanie. Il va falloir accueillir plus de personnes. Nous devons être en capacité de nous ajuster et de faire preuve d’anticipation. Le couple maire-préfet est incontournable”.
A l’instar du directeur territorial de la Croix-Rouge, la ministre a également averti que les contrôles des modalités d’hébergement seraient mis en place rapidement pour vérifier qu’il s’agisse “d’une vrai solidarité” et pas “de profiter de la vulnérabilité de ces familles”.
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