Alors que le manque d’électricité risque de se faire sentir au début 2023, avec de possibles délestages, les préfectures ont achevé de s’organiser pour lister les usagers à épargner. Désormais, elles se préparent à gérer les coupures, notamment la circulation si les feux de signalisation sont éteints. En parallèle, l’heure reste à la recherche d’économies d’énergie. Le point en Val-de-Marne.
“Le message de sobriété énergétique est très bien passé. La semaine dernière, nous avons annoncé un recul d’environ 10% de la consommation d’électricité par rapport à la moyenne des années précédentes (2014-2019). Elle se manifeste notamment dans le secteur résidentiel (habitat pavillonnaire et collectif) et le tertiaire. C’est une bonne nouvelle”, se félicite Séverine Legrand, responsable des affaires publiques chez RTE (Réseau de transport d’électricité), à l’occasion d’un point presse de la préfecture du Val-de-Marne sur la situation énergétique.
Nonobstant, les risques de délestage sont plutôt annoncés pour le début d’année 2023, lors des pics de froid. C’est dans ce contexte que chaque préfecture a été invitée à définir un schéma de délestage définissant les sites à préserver sur le territoire pour concilier baisse de consommation et maintien des installations essentielles. Un casse-tête que nous avons expliqué dans un article précédent.
Lire : Coupures d’électricité cet hiver en Val-de-Marne : casse-tête pour préparer le schéma de délestage
À noter que les crèches, écoles, collèges et lycées ne figurent pas parmi les sites prioritaires qui sont les hôpitaux, commissariats, prisons… Leur nombre et leur répartition sur l’ensemble du territoire ne permettrait plus de remplir les objectifs de réduction de consommation du département, fixés à 50% dans le Val-de-Marne. “Pour des raisons de sécurité, et même si la coupure ne dure que deux heures, les établissements devront être fermés toute la journée. L’Éducation nationale et les collectivités travaillent déjà à des systèmes pour prévenir les familles”, indique la préfète, Sophie Thibault.
“Aujourd’hui, l’heure est plutôt à la sérénité. L’application EcoWatt permet de savoir à trois jours, s’il y a alerte et s’il faut adapter la consommation. Si nous sentons qu’un problème arrive, nous passons en voyant orange et nous prenons des mesures de prévention. Nous pouvons notamment demander aux grands consommateurs, type aciéries et autres industries lourdes, d’arrêter de produire. Nous pouvons même jouer sur le tension. Si ce n’est toujours pas suffisant, nous déterminerons, vers 15 heures la veille, les départements où délester. Puis, à 17 heures, nous désignerons les rues. Cela permet d’anticiper la coupure de deux heures maximum qui interviendra le lendemain”, détaille Pascal Mangin, responsable chez Enedis Île-de-France, l’exploitant du réseau électrique.
Pourquoi seulement à 17 heures la veille ? Parce que la météo peut évoluer et que l’on doit s’assurer des possibilités d’importation d’énergie produite dans d’autres pays européens, détaille l’exploitant. En cas de délestage, la préfecture du Val-de-Marne actionnera son centre opérationnel d’urgence. La police sera mobilisée pour faire la circulation suite à l’extinction de feux de signalisation dans les quartiers concernés.
Pour rappel, le délestage sera susceptible d’intervenir au moment des pics de consommation, entre 8h et 13h le matin, et entre 18h et 20h le soir. La coupure sera limitée à deux heures et les foyers concernés seront prévenus un jour avant. Le délestage ne devrait pas concerner les mêmes quartiers deux fois.
Lien vers le site national d’information sur la situation électrique
Travail avec les municipalités
Les villes seront pour leur part invitées à activer leur plan communal de sauvegarde pour veiller sur les personnes vulnérables et isolées. Pour les personnes sous assistance respiratoire à domicile, l’Agence régionale de santé dispose de listes confidentielles et elle contactera les personnes ou leurs familles pour trouver une solution. Une réunion en visio-conférence avec les maires et parlementaires du département s’est tenue récemment, pour évoquer la crise énergétique, alors que les élus ont manifesté leur colère face à la hausse de leurs dépenses d’énergie, non compensées par des coups de pouce de l’Etat.
Lire : Manifestation des maires du Val-de-Marne et journée sans services municipaux au Kremlin-Bicêtre
Pour la préfète, plusieurs mesures de la loi de finance 2023 devraient néanmoins répondre aux besoins exprimés par les maires, comme le dispositif d'”amortisseur électricité” qui permet à toutes les collectivités, sans condition de taille, de faire payer par l’État les coûts de l’électricité dès lors qu’ils dépassent un certain seuil. Une autre mesure dite “filet de sécurité” permet d’obtenir une compensation des dépenses d’énergie quand le budget des collectivités est trop alourdi par les factures énergétiques. Une dizaine de communes du Val-de-Marne ont d’ores et déjà obtenu des avances, a indiqué la préfète, tout en saluant les initiatives des communes pour réduire leur consommation d’énergie, dans le cadre de plans de sobriété.
Plan de sobriété énergétique de la préfecture
Car, en parallèle de la préparation à gérer les délestages de deux heures, l’objectif reste de réduire la consommation d’énergie pour soulager le réseau. “Dernièrement, j’ai discuté avec la direction régionale des routes (Dirif) qui prévoit d’éteindre les lumières sur l’autoroute A4 autour de la porte de Bercy“, indique la préfète. Concernant les activités de l’Etat en Val-de-Marne, un plan de sobriété a été décliné localement, qui reprend les préconisations gouvernementales. Voir les principales mesures ci-dessous.
- 19 °C comme température maximale de chauffe dans les bureaux. Baisser la
température la nuit à 16 °C et à 8 °C degrés lorsque le bâtiment est fermé plus de 3 jours - Décaler de 15 jours le début et la fin de la période de chauffe, quand cela est possible
et quand la température extérieure le permet - Réduire l’utilisation de l’eau chaude sanitaire dans les bureaux. En dehors des usages
pour lesquels l’eau chaude est indispensable et lorsque les conditions le permettent, les
gestionnaires auront la possibilité d’arrêter l’eau chaude sanitaire - Favoriser le covoiturage grâce à une prime de 100€, pour les conducteurs qui se lancent
dans le covoiturage courte distance dès le 1er janvier 2023 lors des trajets domicile-travail - Diminuer le chauffage de 19°C à 18°C et travailler en horaires décalés les jours de forte
tension sur le système électrique lorsque le signal d’ÉcoWatt est rouge - Inciter au télétravail pour réduire la consommation de carburant notamment
- Limiter la vitesse à 110 km/h sur l’autoroute pour les agents employant leur véhicule de
service lors de trajets professionnels non urgents - Réduire la consommation d’électricité liée à l’éclairage public, qui représente, en
moyenne, 30% des dépenses d’électricité d’une collectivité. Éteindre les lumières à
certaines heures, réduire l’intensité lumineuse, passer aux éclairages LED avec pilotage
automatisé permettrait une économie d’énergie, dès les premiers mois, de 40 à 80% avec
un retour sur investissement entre 4 et 6 ans - Réduire le chauffage des équipements sportifs : en diminuant de 2°C la température
des gymnases et d’1°C la température de l’eau des piscines, comme le recommande
l’Association nationale des élus du sport - Réduire le nombre de mètres carrés chauffés en regroupant les services publics dans
les locaux les mieux adaptés, quitte à les utiliser sur de plus grandes plages horaires - Les entreprises s’engagent, une plateforme qui recense les entreprises qui prennent 15
engagements et sont accompagnées dans leur déploiement : éteindre l’éclairage intérieur
des bâtiments dès l’inoccupation, réduire l’éclairage extérieur, notamment publicitaire, et
l’éteindre au plus tard à 1h, piloter chauffage, climatisation et ventilation ou encore
regrouper les déplacements et supprimer ceux inutiles - Réduire de près de 50 % le temps d’éclairage avant et après les matchs professionnels
se déroulant en journée et de plus de 30 % pour les matchs en soirée - Mise en place d’un bonus sobriété pour valoriser les économies d’énergie et faire
baisser les factures. Les ménages qui maîtrisent leur consommation énergétique pourront
recevoir une prime sur les factures de gaz et d’électricité. Plusieurs énergéticiens
s’engagent à proposer cette offre. - Jusqu’à 9 000 euros d’aide pour passer d’une chaudière au gaz à une pompe à chaleur
en logement individuel et des aides permettant un reste à charge de 250 euros en
moyenne par appartement pour raccorder un bâtiment de logement collectif à un réseau
de chaleur, grâce à MaPrimeRenov’ - Informer les Français sur la météo de l’électricité (signal ÉcoWatt), en partenariat avec
RTE, par les médias audiovisuels et radiophoniques.
La préfecture : une passoire thermique
“Nous travaillons aussi le sujet du bâtiment de la préfecture, je dois rencontrer le président du conseil départemental à ce sujet“, a précisé la préfète. Le monument qui abrite une partie des services du conseil départemental, notamment la salle de séance plénière, et les services centraux de la préfecture, face au lac de Créteil constitue, en effet, une passoire thermique. Problème, le coût d’isolation de ce bâtiment classé est stratosphérique par rapport au budget ordinaire de la préfecture. “Rien que pour remplacer une vitre, sur mesure, cela coûte 12 000 euros”, chiffre une source préfectorale. De quoi donner une idée du montant global. Pour ceux qui se demandent pourquoi des parties d’étages complètes restent allumées quand il n’y a plus personne, la réponse tient elle à l’absence d’interrupteur. À l’époque, ce magistral paquebot, qui a abrité des tournages de films et séries comme Le Bureau des Légendes, était, de fait, d’abord pensé comme objet architectural. Face à la montagne de travaux à mener, il convient donc de parer au plus pressé, comme par exemple l’étanchéité des terrasses afin qu’il arrête de pleuvoir dans la salle des fêtes.
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