Manque de candidats admissibles en maths, en allemand, en lettres ou pour les postes de professeurs des écoles: les concours d’enseignants sont loin de faire le plein cette année en Ile-de-France. Y-aura-t-il des professeurs à la rentrée ? Pourquoi cette pénurie ? Conséquence ponctuelle de la réforme du concours ou crise des vocations ?
Les chiffres, qui tombent au fur et à mesure, donnent des sueurs froides aux syndicats enseignants: 816 candidats admissibles pour 1 035 postes au Capes externe de mathématiques (contre 1 706 admissibles l’an dernier), 83 admissibles pour 215 postes en allemand (179 en 2021), 60 pour 134 postes en Lettres classiques, 720 pour 755 postes en Lettres modernes, désaffection dans certaines académies au concours de recrutement des professeurs des écoles (CRPE)…
“La situation pour la prochaine rentrée est inquiétante (…) Des personnels vont manquer pour la rentrée 2022”, résument-ils dans un courrier intersyndical adressé mercredi à la nouvelle Première ministre, Elisabeth Borne.
Cette situation est particulièrement marquée dans certaines disciplines mais aussi certaines académies, comme celles d’Ile-de-France pour le premier degré, où le recrutement est traditionnellement plus difficile. On compte ainsi 180 admissibles pour 219 postes de professeurs des écoles à Paris, 521 pour 1 079 à Créteil et 484 pour 1 430 postes à Versailles.
La rectrice de Versailles Charline Avenel a d’ailleurs annoncé cette semaine une vaste opération de recrutement de plus de 2 000 contractuels pour la rentrée prochaine, dont 700 enseignants de primaire et 600 professeurs en collèges et lycées. “Vous recherchez un emploi, un nouveau métier qui a du sens? L’académie de Versailles recrute”, explique-t-elle dans une vidéo sur les réseaux sociaux.
Le ministère de l’Education nationale se veut cependant rassurant. Jean-Michel Blanquer a récemment affirmé qu’il y aurait “le vivier nécessaire” de professeurs de mathématiques à la rentrée prochaine dans les lycées, laissant les syndicats dubitatifs.
“On parle d’un vivier. (…) Tant mieux si c’est vrai, mais nous on ne sait pas de quoi on parle”, a commenté cette semaine Bruno Bobkiewicz, secrétaire général du principal syndicat des chefs d’établissement (SNPDEN).
Pour le ministère, cette baisse est essentiellement conjoncturelle, due à la réforme des concours de recrutement d’enseignants, qui pouvaient être passés auparavant dès le master 1 et ont lieu désormais en master 2.
Ajustement ponctuel ou crise des vocations ?
Une partie des étudiants de master 2 les ont ainsi déjà réussis l’an dernier, d’où une année de transition. “Ca nous amène à une baisse mécanique qui était anticipée”, a assuré Vincent Soetemont, directeur général des ressources humaines du ministère.
Pour les syndicats cependant, les raisons de cette désaffection sont aussi plus profondes, liées notamment à la faible attractivité salariale de l’enseignement.
“Il y a deux pistes: celle de la question salariale et celle des conditions d’entrée dans le métier”, avec une partie des stagiaires à plein temps devant les classes à la rentrée. “Et c’est seulement en répondant à ces questions que l’on va restaurer l’attractivité du métier d’enseignant”, estime Sophie Vénétitay, secrétaire générale du Snes-FSU, principal syndicat des collèges et lycées.
“Les explications sont multiples. Forcément, quand on a aujourd’hui une image dégradée du métier d’enseignant du fait du discours ambiant, ça ne fait rêver personne”, juge Bruno Bobkiewicz, qui pointe aussi “le niveau de recrutement à Bac+5”, pas forcément en adéquation avec “le niveau de rémunération en début de carrière”.
“Pour les scientifiques, quitte à choisir entre un métier d’ingénieur où on peut gagner facilement 3 000 euros et un métier de prof où on nous cantonnera toujours à 2 000 euros, le choix se fait assez facilement”, résume Flavie, 23 ans, qui a réussi le Capes de Lettres modernes l’an dernier.
“C’est sûr que la réforme a participé au fait qu’il y ait moins de candidats”, analyse cette enseignante stagiaire. Mais elle met en avant aussi une “crise” plus ancienne, liée à “plein de contraintes, notamment financières” et au “manque de reconnaissance” du métier.
Face à cette pénurie, les syndicats ont appelé la Première ministre à des mesures “de toute urgence”, dont “une revalorisation ambitieuse des salaires”. Pour Guislaine David, secrétaire générale du SNUipp-FSU (premier syndicat du primaire), il faut aussi “urgemment un concours exceptionnel” qui viendrait s’ajouter à la session actuelle.
par Sophie LAUBIE / Anne-Sophie MOREL
Étrange, pour un “métier de privilégiés” “tout le temps en vacances”.
Les clichés ne seraient-ils finalement pas si fondés que ça ?
Les enseignants, à niveau égal, sont nettement moins bien payés que des ‘cadres’, mais tout dépend du type de diplôme … Il y a de nombreux masters rigoureusement inutiles !
Il y a 900 000 enseignants en France, mais beaucoup sont contraints à l’exil, car issus de régions sans travail. Et les débutants se retrouvent toujours dans les banlieues où tout est très difficile, surtout pour les très jeunes femmes qui constituent l’essentiel des candidates pour le primaire et les collèges …
Finalement, restent surtout la sécurité de l’emploi et, oui, les nombreux congés en semaine ou dans l’année. Ceci compense-t’il cela ?
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