Si les collectifs de citoyens se montent spontanément pour s’opposer à tel ou tel projet, faire se déplacer les habitants vers les urnes, dans le cadre d’une consultation formelle, est une autre affaire. Ce dimanche, seulement 4,42 % des électeurs ont pris part à la seconde édition du référendum annuel du Kremlin-Bicêtre, contre 6,5 % l’an dernier.
La tenue d’un référendum annuel figurait dans les promesses de campagne de Jean-Luc Laurent, maire MRC de la ville, lors des municipales de 2020. Il s’agissait donc de la deuxième édition. Après un premier scrutin fin 2021 sur le déplacement du marché, objet de controverses, les habitants étaient cette fois interrogés sur le passage à 30 km/h de plusieurs rues de la ville. Sur près de 15 000 électeurs, seulement 648 personnes se sont déplacées pour donner leur avis, dont les deux tiers, 66,6 % ont répondu favorablement. Une participation décevante.
Pour rappel des enjeux, lire : Faut-il limiter la vitesse automobile à 30 km/h ? Le Kremlin-Bicêtre consulte par référendum
Dans le détail, 15 bureaux ont voté oui. Seul le numéro 16 a voté non, à 69 %. Il s’agit du bureau correspondant au quartier pavillonnaire du haut de la ville, indique-t-on en mairie.
Le bureau n° 15 a pour sa part concentré le moins de votants, 2,67 % tandis que le bureau 1 en a obtenu 7,42 %. Détails ci-dessous
“Cela nécessite un temps plus long“
“Depuis bientôt 20 ans, il n’y a pas eu de référendum en France. Notre système politique a pris le pli de déposséder les citoyens de leur pouvoir de décision concrète. Avec le référendum kremlinois annuel, nous voulons prendre l’habitude démocratique du débat public et de la décision collective au Kremlin-Bicêtre. Au 49.3 permanent, nous opposons la délibération citoyenne. Cela nécessite un temps plus long, car c’est un processus qui veut impliquer tous les Kremlinois“, défend le maire MRC du Kremlin-Bicêtre, Jean-Luc Laurent, dans un communiqué, conscient que les “détracteurs” ne “manqueront pas de railler” cette faible participation.
Un résultat faible qui s’explique aussi par le choix de procéder à un “référendum local” formel, sur une journée, uniquement dans les bureaux de vote et à partir des listes électorales. En Seine-Saint-Denis, La Courneuve, qui s’est fixé le même défi depuis les élections, mais procède à une votation et non un référendum, a de son côté fait le choix d’étendre la consultation sur une semaine, et propose trois questions au lieu d’une.
Lire : La Courneuve : participation en légère hausse pour le second référendum
Pour Jean-Luc Laurent toutefois, le formalisme fait partie intégrante du dispositif. “Le fait de passer dans un isoloir crée un autre rapport à l’exercice citoyen. C’est un rite“, défend l’élu, joint au téléphone. De fait, le référendum local peut avoir un réel impact. En cas de participation de plus de 50 % par exemple, le choix des électeurs s’applique sans nécessiter de vote en conseil municipal.
Voir le mode d’emploi du référendum local
Construire la question de manière plus participative
Dès lors, quelle marge de manœuvre pour améliorer la participation ? “Travailler plus en amont sur le choix du sujet en lien avec les conseils de quartier, suggère l’édile. On a déjà commencé cette année. La question venait du reste du conseil de quartier de la mairie. Elle prolongeait la commission extra municipale sur les déplacements.” Une autre piste serait de “pouvoir poser plusieurs questions, à l’instar des votations en Suisse, mais la loi l’interdit“, regrette le maire.
Et pourquoi n’avoir pas choisi comme sujet celui de la suppression de la piste cyclable sur la RD7, qui a suscité de fortes mobilisations ? “Cela ne relève pas du seul champ communal et ne peut donc pas faire l’objet d’un référendum municipal“, explique l’élu.
Du côté de l’opposition, Lionel Zinciroglu, ex LREM, président du micro parti local Ensemble, changeons le KB, fustige pour sa part l’initiative, l’estimant trop coûteuse. “À l’heure où les finances de la ville vont très mal, la municipalité refuse de nous donner le montant exact du coût du référendum qui a atteint un taux de participation à 4,42 %. Nouveau record d’abstention suite à un taux de près de 6,5 % pour le premier référendum de Jean-Luc Laurent en 2021. La proposition de la réduction de la vitesse à 30 km/h sur les voiries communales a donc été approuvée à 66,1 % des 4,42 % de participants. Une décision qui aurait aussi pu être prise par la majorité par une concertation publique sans engendrer des frais importants supportés par le contribuable, que nous estimons à près de 50 000,00 €, surtout au vu du nombre de voies concernées par cette limitation (moins de 10 voies communales). Ça fait cher pour le remplacement de moins de 10 panneaux de limitation de vitesse“, tacle l’élu sur sa page Facebook.
“Cette forme démocratique est intéressante mais les habitants n’ont pas l’habitude d’être concertés et cela se fait de manière trop brutale, prolonge l’élu, joint au téléphone. On leur sort deux épisodes avec des sujets qui ne semblent pas être au centre de leur attention, alors que les habitants voulaient que cela porte sur la sécurisation des voies et des pistes cyclables. Ce qui me gêne est d’imposer une question sans vraiment concerter la population avant”, reprend l’opposant, tout en indiquant que, “beaucoup d’études montrent que, même avec du temps, c’est un outil démocratique difficile à mobiliser”. Le conseiller municipal prévient que son groupe ne voter ni pour ni contre sur le sujet lors du prochain conseil.
Vote formel en conseil municipal le 15 décembre
La participation n’ayant pas atteint les 50 %, la limitation à 30 km/h sera en effet votée formellement lors du conseil municipal du 15 décembre, dans le cadre du schéma de mobilité. Elle devrait entrer en vigueur courant 2023.
Concernant le coût de l’opération, la ville indique pour sa part un montant de “40 000 euros“.
Le problème d’un Référendum classique ? La réponse est soit oui, soit non (ou sinon, blanc, ou nul, ou abstention). La question est bloquée, décidée sans l’électeur, qui doit répondre en bloc. Souvent, il répond non, ou ne répond pas.
Le projet de traité européen (2004) constitue une sorte de sommet indépassable de la complexité : 448 articles, à la question soumise au vote global.
Que faire ?
Première piste participative, suggérée dans l’article : plusieurs sujets, plusieurs votes (pas un seul)
Au-delà, c’est-à-dire la participation à l’élaboration même des questions, construire le texte soumis au vote de façon pluraliste (avec options) reste à inventer.
En France, la ‘culture’ sociale consiste le plus souvent à s’opposer, à critiquer, à vouloir éliminer l’adversaire. La recherche de compromis par la négociation est trop souvent considérée comme de la faiblesse, voire de la lâcheté. De plus, E. Macron qui a mis le ‘grand débat’ aux archives pour en interdire de fait l’exploitation a discrédité toute notion de consultation populaire, et il s’oppose au Référendum D’Initiative Populaire qui aurait force de loi.
Il suffit de voir un syndicat important contester des accords syndicaux majoritaires et déclencher des grèves ayant un fort impact sur le public avec un très faible nombre de grévistes …
Nous sommes très très éloignés de la démocratie Suisse, qui devrait nous servir de modèle …
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