Deux enseignes de livraison rapide, dont les locaux sont surnommés “dark stores”, ont obtenu un premier succès judiciaire face à la mairie de Paris en faisant suspendre par référé neuf procès-verbaux d’infraction au code de l’urbanisme, le tribunal administratif leur reconnaissant un “intérêt collectif”.
Les mises en demeure adressées en juin et juillet par la ville aux sociétés Frichti et Gorillas, sommées de remettre “dans leur état d’origine” neuf locaux sous peine d’une astreinte administrative de 200 euros par jour de retard, sont suspendues, a décidé le tribunal administratif de Paris dans une ordonnance rendue mercredi, dont l’AFP a eu copie vendredi.
Ces locaux, où sont stockés des produits courants commandés sur internet et livrés en quelques minutes à domicile, “présentent un intérêt collectif” en ce qu’ils permettent “d’optimiser en milieu urbain le délai et le mode de livraison” et donc de “diminuer le trafic de camions et le nombre de points de livraison dans Paris intramuros”, a estimé la juge des référés.
“Le juge des référés a estimé qu’il existait un doute sérieux quant à la qualification des locaux de Frichti et Gorillas, car ceux-ci pourraient être qualifiés d’-espaces de logistique urbaine- qui, contrairement à la destination d’entrepôt, n’est pas interdite par le PLU de Paris dans le cadre de la transformation de locaux existants en rez-de-chaussée sur rue”, a réagi Gorillas dans un communiqué.
“C’est une mauvaise nouvelle dans notre combat contre les dark stores, dont nous ne doutons pas qu’il aboutira”, a commenté devant la presse l’adjoint à l’urbanisme Emmanuel Grégoire.
En première ligne face à ce phénomène avec une centaine d’adresses répertoriées, Paris attend la publication de l’arrêté promis début septembre par le gouvernement pour mettre fin au “flou” sur le statut de ces locaux, confirmés comme des entrepôts et non comme des commerces.
Mais “le tribunal administratif ne s’est pas appuyé sur un arrêté qui n’est pas sorti”, a encore regretté M. Grégoire en déplorant une “décision aberrante sur le plan du droit”.
“France urbaine soutient la ville de Paris car le risque de jurisprudence est réel”, a assuré dans un communiqué cette association qui regroupe 108 collectivités. “L’instabilité juridique n’aidera pas les collectivités à mettre en œuvre un cadre stable et concerté d’implantations commerciales dans les centres-villes et centres-bourgs”.
“Le juge a indiqué que les locaux exploités par Frichti et Gorillas sont destinés à la réception et au stockage ponctuel de marchandises (…), à la mise à disposition de ces commandes aux livreurs à bicyclette, que l’entreposage des marchandises est voué à être temporaire, dès lors que la stratégie de vente (…) repose notamment sur la fraîcheur des produits”, s’est encore félicité Gorillas.
La mairie, qui venait juste de notifier des astreintes financières sur quatre de ces neuf adresses, objets des recours de Frichti et Gorillas, va se pourvoir en cassation devant le Conseil d’Etat, a indiqué M. Grégoire.
Si cette décision “va nous faire prendre du retard”, a encore déploré le premier adjoint, la ville va poursuivre l’instruction de ces procès-verbaux, une quarantaine à ce stade, “malgré le flottement juridique”, a assuré le bras droit d’Anne Hidalgo.
L’adjointe au commerce Olivia Polski anticipe des actions judiciaires de riverains “qui n’en peuvent plus”, excédés par les nuisances provoquées par le ballet des livreurs.
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