Ils étaient nombreux et de tous âges à s’être déplacés samedi 21 mai pour découvrir le nouveau centre aquatique Claire Suppiot. Pour les habitants de Pierrefitte (Seine-Saint-Denis) c’est un vrai changement, la ville n’ayant pas de piscine jusqu’à présent. Reportage.
Fini les déplacements à Saint-Denis ou Stains pour nager. “C’est super“, s’exclame Shayma, 10 ans, un peu intimidée. Survêtement de l’AS Pierrefitte sur le dos, la jeune fille est sportive. A ses côtés, Samia, sa maman, est aussi ravie : “Je l’emmène à La Baleine à Saint-Denis. Ici se sera bien sûr plus près et puis c’est un bel équipement. J’espère qu’il restera propre“, commente-t-elle.
Savoir-nager
Wahiba, 40 ans est venue avec ses quatre enfants dont l’ainé à 12 ans. “Avant, on allait à Villetaneuse, mais la piscine a fermé. Depuis on va à Saint-Denis. Il faut compter trois quart d’heure aller, trois quart d’heure retour. Maintenant, il faudra seulement dix minutes. C’est un vrai changement.”
Jean-Claude habite lui à 10 minutes à pied de la nouvelle piscine où il va inscrire sa fille Jennifer, 12 ans, qui se rend, elle aussi, une fois par semaine à la piscine La Baleine à Saint-Denis: “C’est important parce que savoir nager est une compétence essentielle que l’on n’a pas forcément eu l’occasion d’acquérir. Ça fait partie des bagages pour devenir autonome“, explique-t-il. Lui aussi compte d’ailleurs s’inscrire à des cours de natation. “Je veux être plus habile dans l’eau et même pouvoir me débrouiller si un enfant se trouve en difficulté“, témoigne-t-il.
“J’ai appris à nager parce que 19 enfants s’étaient noyés dans ma commune“
Venue d’Angers où elle s’entraine, la nageuse Claire Supiot s’est dit honorée que son nom ait été choisi par les habitants pour baptiser le centre aquatique. “J’ai appris à nager parce que 19 enfants s’étaient noyés dans ma commune de Juigné-sur-Loire (Maine-et-Loire), c’était en 1969“, témoigne-t-elle.
Championne de natation, Claire Supiot s’était qualifiée en 1988 aux jeux olympiques avant d’être atteinte de la maladie de Charcot à 30 ans. Un handicap qui ne l’a pas empêchée de poursuivre sa carrière. A 53 ans, elle s’est qualifiée pour les jeux paralympiques de Tokyo en 2021 et elle aspire maintenant à concourir au JOP de Paris 2024. “Avec cette piscine, vous allez tous pouvoir vous retrouver, partager le plaisir d’être ensemble dans l’eau que ce soit avec votre famille, avec vos potes, c’est ça le plus important“, enjoint-elle.
17 millions d’euros
“Ça fait des années qu’on se bat pour avoir ce centre aquatique. Nous avons près de 80% des enfants qui rentre en 6ème qui ne savent pas nager, c’est 60% sur le territoire. Ça vous donne une idée de l’importance de cet équipement“, observe Michel Fourcade, maire de Pierrefitte.
C’est pour rattraper le retard en matière de piscines en Seine-Saint-Denis que le département a lancé en 2016 un plan d’investissement de 40 millions d’euros, explique Stephane Troussel, son président. La construction du centre aquatique Claire Supiot en représente même une part substantielle puisque sur 17 millions d’euros d’investissements, le département en assume la plus grande part, soit 15,4 millions d’euros, le reste étant abondé à parts égales par la région Ile-de-France et l’Agence nationale du sport (ANS), soit 800 000 euros chacun.
Dans le cadre de ce plan piscine, le département a également contribué à la construction de la piscine Odyssée à Aulnay-sous-Bois inaugurée en juillet 2021 et à celle de Marville qui sera achevée pour les jeux olympiques en 2024. Neuf bassins existants ont également été rénovés soit près d’un tiers du parc.
“Après ce plan piscine n°1, j’espère vous présenter un nouveau plan piscine à la rentrée prochaine pour continuer notre effort pour rattraper le retard“, a promis Stéphane Troussel.
Vers une mutualisation des lignes d’eau
En dépit de l’enthousiasme général pour le nouvel équipement, certains habitants ont néanmoins exprimé leur inquiétude concernant le coût que sa gestion, confiée au groupe Prestalis, pourrait entrainer pour la commune. Celui-ci serait évalué à 800 000 euros par an.
“C’est très bien la piscine, mais rien n’est fait pour attirer les entreprises. Ces équipements coûtent chers et c’est nous qui finissons par les payer“, se plaint une habitante.
“Le fonctionnement du site est actuellement pris en charge par la collectivité. Mais il y a une volonté que les lignes d’eau du territoire soient assumées par Plaine commune [l’intercommunalité] parce que s’il y a bien un secteur qui doit être mutualisé c’est celui-là. La chambre régionales des comptes l’a d’ailleurs préconisé“, indique Michel Fourcade. Des discussions ont été engagées dans ce sens avec l’établissement public territorial que le maire de Pierrefitte espère bien voir aboutir d’ici 2023.
Des riverains de la rue Jules Vallès voisine pointent également l’absence de prise en compte de l’environnement dans lequel a été implantée la piscine. “Les élus font de grands discours sur la Seine-Saint-Denis et leur volonté de rattraper le retard. C’est très bien cette piscine mais à 50 mètres vous avez une rue qui est digne du tiers-monde, avec des garages sauvages et une casse squattée tous les week-end par des restos clandestins“, souffle un habitant excédé. Un incendie qui a s’est déclenché dans un de ces garages pourrait même amener le gérant de la piscine à construire un mur pour protéger le site.
la piscine est un bel équipement implanté juste derrière une rue où règne le n’importe quoi…garages et casses sauvages, salle des fêtes illégale, friche abritant des restos clandestins où on cuit des viandes improbables sur des grilles crados… et au milieu de ce décor dystopique et apocalyptique, une dizaine d’habitants abandonnés par les autorités…
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