A la veille du 1er tour de l’élection municipale partielle à Neuilly-sur-Marne, dimanche 13 février, tout l’enjeu est de mobiliser les indécis et les abstentionnistes. Le jeune maire sortant (divers droite), Zartoshte Bakhtiari, fait face à deux listes rivales: celle du candidat socialiste Yannick Trigance qui joue en quelque sorte le match retour, lui qui avait perdu de cinq voix le scrutin annulé de 2020. Et celle de Jamila Aïna qui mène une liste qui se présente comme “citoyenne”.
“Chaque voix compte“, souffle un militant à l’entrée du marché de la patinoire de Neuilly-sur-Marne, où s’affairent les équipes des trois listes qui s’affrontent ce dimanche.
Depuis l’annulation du scrutin de juin 2020 par le conseil d’Etat le 30 décembre, les Nocéens n’ont, en effet, plus de conseil municipal. C’est une délégation spéciale nommée par le préfet de Seine-Saint-Denis qui est chargée d’expédier les affaires courantes et d’organiser une nouvelle élection.
Prime au sortant
Ce mercredi, difficile de rater la campagne politique: entre les étals, chacun y va de son trait d’esprit pour inciter à venir voter dimanche, les tracts vont de main en main. Zartoshte Bakhtiari, le maire sortant, ne passe pas inaperçu. Certains en profitent pour faire passer des doléances: passage piéton obstrué, retard du ralliement à la fibre, problème de fuite d’eau…
“Les gens ont vu le changement, assure l’édile de 31 ans. En dix-huit mois on a réussi à avoir un bilan qui est très étoffé avec des attentes qui étaient fortes dans de nombreux sujets.” L’enfant du quartier des Fauvettes déroule son bilan: “les atteintes aux biens et aux personnes ont diminué d’environ 25%, les rodéos moto ont été divisés par quatre, on a mis un frein à la bétonisation et le nouveau PLU [ndlr, plan local d’urbanisme] sanctuarise les zones pavillonaires…”
Il revendique aussi une gestion des affaires plus dynamique que celle de l’équipe de son prédécesseur, le socialiste Jacques Mahéas qui a dirigé la municipalité depuis 1977. “J’ai fait passer le montant des subventions reçues par la mairie de 607 000 euros en 2017 à 4,7 millions d’euros en 2021, se targue-t-il. Je vais frapper aux portes de tout le monde: le préfet, la Métropole du Grand Paris, la région.“
“Je pense savoir pour qui je vais voter, assure une retraitée qui préfère ne pas donner son nom, mais vous savez il y a forcément une prime au sortant surtout quand il est nouveau dans le paysage.”
Police municipale, bétonnage, jeunesse
Face à lui, le candidat de la gauche, Yannick Trigance, ancien directeur de cabinet de Jacques Mahéas, pointe les maigres accomplissements du maire sortant. “Beaucoup de projets comme la rénovation du centre équestre ou la création de la déchetterie étaient déjà engagés. La seule chose qu’il a fait, c’est la sécurité, avec la mise en place de la police municipale, ce que je proposais aussi. Mais elle n’a pas de feuille de route. Aujourd’hui, elle est très mal perçue par la population, c’est un échec complet.”
Quant à la lutte contre le bétonnage, Yannick Trigance estime que les promesses sont déçues: “les promoteurs sont toujours plus nombreux.”
Face à ce constat, il propose de durcir le PLU, de faire de la jeunesse sa priorité, de réduire de moitié le tarif des cantines et des centres de loisirs, et de créer des “outils de proximité pour apaiser la ville” à côté d’une police municipale réorganisée: “une brigade du respect et du civisme“, en plus d’un “dispositif de médiateurs de rue” et d’une “brigade verte.” Cette mesure est aujourd’hui portée par le maire-sortant qui ironise: “Ça me fait doucement rire, ils ont toujours été contre cette idée de brigade verte tout comme celle de la police municipale. Maintenant, ils sont pour.”
“Démocratie locale malmenée”
Surtout, Yannick Trigance considère que “la démocratie participative a été très malmenée pendant dix mois“. Il accuse même le maire sortant “d’avoir voulu museler l’opposition” et “de judiciariser la vie politique locale.” “Sa politique est de droite mais pourquoi ne le dit-il pas aux électeurs? Moi j’assume mes valeurs de gauche.“
Zartoshte Bakhtiari balaye ces critiques: “Mon parcours est à droite mais ma liste est sans étiquette, corrige-t-il. Ma première adjointe vient du parti socialiste et Djénéba Diaby, mon adjointe à la santé a conduit en 2020 une liste notamment LREM. Je ne vois aucun repère idéologique dans ce que je fais, mon seul cap c’est la réalité du terrain, les besoins des Nocéens.” Toutes deux l’ont d’ailleurs rallié au second tour de l’élection de 2020.
S’agissant des griefs qui lui sont faits sur sa gestion de la ville: “Ils [l’opposition] sont dans le négatif, ils sont contre tout“, rétorque l’ancien édile qui dénonce une campagne hargneuse. Zartoshte Bakhtiari a d’ailleurs eu maille à partir aussi avec un soutien de Jamila Aïna, la troisième tête de liste à se présenter à cette élection municipale. Contactée par téléphone, celle-ci a décidé de ne s’exprimer qu’au soir du premier tour. “Vous savez, personne ne nous attend, mais je suis sûr qu’on va surprendre“, croit savoir l’un de ses militants, reconnaissables aux gilets jaunes qu’ils arborent.
De passage au marché de la patinoire, Dalla, 36 ans, ne sait pas pour qui elle va voter: “Je n’ai pas le temps de penser à politique. C’est vrai qu’il y a eu du changement à Neuilly-sur-Marne, mais ça manque encore de logements. Ça fait 15 ans que je vis ici et presque autant de temps que j’ai fait une demande de logement social. Mais je ne suis pas du genre à me plaindre, alors je pense que je ferai l’effort d’aller voter dimanche.”
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