“Ici, c’est gratuit, rapide et on peut téléphoner si on a la moindre question“. Tanguy, 20 ans, connaît bien les locaux du centre de santé sexuelle situé au sixième étage de l’Hôtel-Dieu, à un jet de la cathédrale Notre-Dame.
Il vient régulièrement – tous les trois à six mois – pour effectuer des tests de dépistages des infections sexuellement transmissibles (IST) et être suivi dans le cadre de son traitement “Prep”, un médicament préventif contre le VIH.
“Je fais partie de la communauté LGBT, j’ai plus de risque d’être exposé au VIH que les hétérosexuels”, raconte le jeune homme dans la salle d’attente.
La gratuité des dépistages, le centre de santé sexuelle de l’Hôtel-Dieu, doublement piloté par l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris et la Mairie de Paris, l’expérimente depuis 2019.
“On accueille principalement des jeunes, des hommes homosexuels, des personnes trans, des migrants… Il y a ceux qui viennent pour un suivi de routine et ceux qui veulent consulter parce qu’ils ont des symptômes”, explique Sophie Florence, la co-responsable du centre.
En 2021, le centre a accueilli plus de 16 000 consultations.
Un dépistage des IST gratuit pour les moins de 26 ans et sans ordonnance pour tous, tel est le modèle que le gouvernement veut généraliser à compter de l’année prochaine. Le ministre de la Santé François Braun l’a annoncé en septembre.
Actuellement, ce dépistage ne peut être remboursé que sur ordonnance. Or les IST sont en recrudescence, notamment chez les jeunes. Selon Santé publique France, le nombre de diagnostics d’infection à la chlamydia a augmenté de 29% entre 2017 et 2019, surtout dans la tranche d’âge 15-30 ans.
“On s’est rendu compte que l’idée d’un dépistage facile et accessible était complètement fausse”
A l’Hôtel-Dieu, chlamydia et gonocoque arrivent en tête des infections traitées, suivies par la syphilis, les hépatites B et C et le VIH.
Dans le bureau où il effectue ses consultations, le docteur Camille Pigache reçoit entre 20 et 30 patients par jour.
“Avec l’épidémie de variole du singe l’été dernier, on s’est rendu compte que l’idée d’un dépistage facile et accessible était complètement fausse. De nombreuses personnes venues se faire vacciner contre cette maladie ne s’étaient pas fait dépister depuis longtemps”, regrette-t-il.
Soline Dautheville, technicienne, dispose d’un laboratoire miniature. Avec son microscope et son automate, elle peut traiter certains prélèvements et obtenir les résultats en à peine une heure.
“On réserve les analyses ici aux patients urgents qui ont des symptômes et qui ont besoin de savoir très rapidement de quoi ils souffrent”, explique-t-elle.
En plus de la gratuité des soins, la disponibilité des praticiens et la facilité à prendre un rendez-vous sont des critères déterminants dans la régularité du suivi des patients.
Pour Joyce, 21 ans, qui va effectuer son premier dépistage, “il est plus facile de venir ici que chez mon médecin traitant avec qui il est toujours très long d’obtenir un rendez-vous”.
En outre, nombreux sont les médecins généralistes à ne pas être formés à l’ensemble des diagnostics et des soins en la matière.
“Quand j’ai parlé de la Prep à mon médecin traitant, elle m’a dit ne rien y connaître”, observe Tanguy.
“Un jeune qui vient faire un dépistage est un jeune responsable, il ne doit en aucun cas se sentir jugé lorsqu’il consulte”, souligne Sophie Florence.
Prévention : “le parent pauvre du champ de la santé“
La médecin rappelle l’importance d’un accès aisé au dépistage et à la prévention, et regrette que cette dernière soit le “parent pauvre du champ de la santé”. Elle recommande un dépistage annuel “quand on a plus d’un partenaire”.
par Leslie FAUVEL
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