Jusqu’au 5 novembre, la galerie parisienne Mathgoth accueille une rétrospective des œuvres du street-artiste Jeff Aerosole, dont les géants pochoirs en noir et blanc ornent les mures des capitales depuis maintenant quarante ans.
C’est en 1982 à Tours, où il venait d’être nommé professeur d’anglais, que Jean-François Perroy, son vrai nom, a réalisé son premier pochoir sauvage à la bombe aérosol. “Je ne connaissais personne… J’ai balancé sur les murs ma carte de visite sous forme d’un autoportrait grimaçant et un peu punk tiré d’un photomaton… A chaque coin de rue, c’était une façon d’aller à la rencontre des gens…”, raconte l’artiste, en marge de cette rétrospective à l’invitation de la galerie Mathgoth.
Inspirés par une multitude d’anonymes, ses pochoirs consacrent aussi des stars de la musique, son autre passion: Elvis Presley, Jimi Hendrix ou Nina Simone. En 2011, Paris lui offre un immense mur à deux pas du Centre Pompidou, au pied de la Fontaine Stravinsky. Jef Aérosol y réalise l’un des plus grands pochoirs au monde, d’une superficie de 350 m2.
En très gros plan, son autoportrait aux yeux écarquillés faisant “chuuuttt!”, invite les passants à écouter “des bruits inattendus de la jungle urbaine comme des musiciens de rue ou le bruit des talons des demoiselles au printemps…”.
“Le pochoir a cette capacité de rendre réalistes les portraits, presque vivants. Mon travail le plus intéressant, c’est le prochain. Ma ville préférée, c’est la prochaine. Le jour que j’attends avec impatience, c’est demain!”, ajoute Jef Aérosol, 65 ans.
Pour fêter les 40 ans de son premier pochoir, la galerie Mathgoth propose jusqu’au 5 novembre une exposition hors normes sur deux sites “bruts de béton” pour illustrer le “chaos urbain”.
Sonorisée par des bruits de la ville (crissements de pneus, sirènes de police…), une installation regroupe quelque 200 silhouettes de quidams grandeur nature, autant de pochoirs placardés depuis 1982 dans de nombreuses villes.
“C’est un exemple de la jungle urbaine qui m’inspire. On est entre le terrain vague de Brooklyn, des squats et les rues de Paris ou d’ailleurs…” explique Jef Aérosol. “Cette jungle urbaine, je l’aime et je la déteste. Elle m’a aiguillonné au début. On n’était pas très loin de cette époque nihiliste qu’ont été les années punk”.
“Il y a une esthétique du chaos… Avec le temps qui passe, je reste attaché à la ville mais je ne pourrai plus y vivre”, ajoute-t-il.
Sur un second site, le visiteur découvre le travail d’atelier de l’artiste avec de nombreuses œuvres sur toile passant en revue ses autres sujets de prédilection dont les enfants.
“Plus poétique que politique, le message de Jef Aérosol est avant tout humaniste. L’émotion qui passe par les yeux de ses personnages, reflète le regard que l’artiste pose sur l’époque”, souligne Mathilde Jourdain, co-fondatrice de la galerie Mathgoth.
En accès gratuit, cette rétrospective est réservée chaque matin aux scolaires.
par Jean-François GUYOT
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