Au procès pour corruption à la prison de Fresnes (Val-de-Marne), dans lequel quatre personnes dont Arnaud Mimran comparaissent, l’ancien directeur de détention a regretté mardi devant le tribunal correctionnel de Créteil des “fautes gravissimes” mais pas d’infractions pénales.
Ce chef de la division 3 de Fresnes, Khalid El Khal, 53 ans, est poursuivi pour avoir touché de l’argent en échange d’avantages accordés à ces détenus. Il est jugé pour corruption passive et association de malfaiteurs pour des faits allant de janvier 2016 à mars 2018.
Des téléphones en cellule, moins de fouilles, plus de douches, de parloirs et de “liberté en détention”… Trois détenus, dont deux figures de l’arnaque à la “taxe carbone”, Arnaud Mimran et Fabrice Touil, sont soupçonnés d’avoir bénéficié d’un régime de détention privilégié grâce aux faveurs de ce directeur de détention de l’aile où ils étaient incarcérés.
L’ensemble des prévenus contestent les faits.
Interrogé mardi par le tribunal sur le fait d’avoir vu à plusieurs reprises Fabrice Touil à sa sortie de prison, le fonctionnaire, rentré en 1997 dans l’administration pénitentiaire, a déclaré “regretter profondément” des “fautes gravissimes” et des “errements déontologiques”.
Dans ce métier “très enrichissant” et “très humain” où il devait gérer 900 détenus dans sa division, il a reconnu avoir “failli” à sa “mission”: “Je n’ai pas respecté le code de déontologie”, a-t-il affirmé dans un flot de paroles, contestant cependant toute infraction pénale.
“Quand un détenu rentre en détention, l’objectif est de le réinsérer, j’ai fait ce métier avec humanité”, souligne Khalid El Khal, à qui l’accusation reproche une forte proximité avec des détenus de confession juive liés à des “dossiers à forts enjeux financiers”, comme l’affaire de la taxe carbone.
Sur la question des parloirs prolongés, des douches, des “cantines parallèles casher”, des procédures disciplinaires, l’ancien directeur de détention a assuré “n’avoir aucun pouvoir” ni “autorisation juridique” sur ces missions.
“Je n’ai pas la compétence de ces avantages, mon seul avantage, c’est mon écoute, ma présence”, a-t-il ajouté.
Il a notamment expliqué “multiplier les audiences avec les détenus” pour désamorcer d’éventuelles violences entre détenus ou éviter des suicides, évoquant les conditions “extrêmement” difficiles à la maison d’arrêt de Fresnes.
A ses côtés, trois anciens détenus de la prison de Fresnes sont considérés comme “les corrupteurs” et jugés pour corruption active.
Actuellement détenu à la prison de la Santé, Arnaud Mimran, cheveux courts noirs et barbe de quelques jours, est apparu détendu mardi dans le box des prévenus. L’ancien trader doit être entendu mardi après-midi.
Dans son cas, le fonctionnaire est soupçonné notamment d’avoir joué un rôle dans son transfert à la prison du Havre, mais aussi de lui avoir accordé des “conditions de détention favorables”.
Placé sous contrôle judiciaire, Éric Robic, chauffard français ayant écrasé une femme de nationalité israélienne à Tel-Aviv en 2011 avant de prendre la fuite, comparaît libre.
L’ex-directeur lui aurait accordé “une bienveillance particulière” dans la gestion de plusieurs incidents, mais aussi des faveurs comme l’attribution d’un poste d’auxiliaire de sport “sans respecter la procédure d’attribution”.
Le troisième détenu, Fabrice Touil, sous contrôle judiciaire mais absent à l’audience, aurait bénéficié également de nombreux avantages. Comme une douche quotidienne au lieu des trois hebdomadaires. Il est également soupçonné d’avoir remis de l’argent directement à M. El Khal à sa sortie de prison.
Selon l’accusation, “l’objectif annoncé par ces échanges est de poursuivre le schéma de corruption déjà mis en place”.
L’enquête avait débuté en février 2017, après un signalement de l’administration pénitentiaire. Ce signalement faisait suite à une note du Contrôleur général des lieux de privation de liberté sur l’existence d’un possible système de corruption et de traitement de faveur à Fresnes.
Le procès doit se tenir jusqu’à jeudi.
par Alice LEFEBVRE
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