Plus de la moitié des centres de protection maternelle et infantile (PMI) de Seine-Saint-Denis sont restés fermés lundi, pour protester contre la nouvelle organisation horaire.
“Ils veulent dézinguer les centres de PMI“, souffle Valérie Gila, représentante de la Fédération syndicale unitaire (FSU). “On est en plein dans le sujet, les collègues de la PMI défendent le droit des femmes et le droit à l’avortement.” Avec d’autres syndicalistes, elle est venue interpeller le patron du département, Stéphane Troussel, venu à Bobigny dévoiler une plaque en l’honneur de Gisèle Halimi, avocate et militante féministe, à l’occasion des 50 ans du procès de Bobigny, lors duquel elle avait défendu une jeune femme mineure jugée pour avoir avorté. Un procès dont le retentissement contribua à poser le débat sur le droit à l’avortement qui aboutit à la dépénalisation de l’IVG en 1975 avec la loi Veil.
Pause méridienne et “nocturne”
Les PMI assurent des consultations et des actions médico-sociales de prévention et de suivi en faveur des femmes enceintes, des parents et des enfants de moins de 6 ans. Lundi, 46 centres de Seine-Saint-Denis étaient restés fermés, soit plus de la moitié que compte le département. Les agents remettent en cause la réorganisation du temps travail votée le 7 juillet dernier et qui deviendra effective le 1er janvier 2023. Le conseil départemental doit, en effet, transposer la loi de transformation de la vie publique adoptée en 2019 et plus communément connue sous le nom de loi des “1 607 heures”.
Deux points sont particulièrement contestés: la mise en place d’une pause méridienne et l’extension de l’ouverture des PMI le mardi jusqu’à 19h30.
“On est conscient que cette loi des 1 607 heures n’est pas le fait du département, mais il en profite pour aller plus loin“, explique Marie, infirmière puéricultrice. “On a déjà de gros problèmes d’organisation. Il n’y a pas un centre où il ne manque pas du personnel.”
Selon les syndicats, il manquerait une centaine de postes dont une cinquantaine de médecins.
“Pour qui on fera cette “nocturne”?“, s’interroge de son côté Corinne Corbani, représente de la CGT. “Sans compter que certaines PMI sont au cœur de cités, ce qui est très bien parce que l’on doit être près des gens. Mais étendre les horaires d’ouverture tard le soir, ça soulève des question de sécurité et de garde d’enfant pour les agents qui sont à 90% tous des femmes.”
Sonia Airouche, secrétaire de section FSU à Bobigny, regrette, quant à elle, des décisions “incohérentes” et une méconnaissance de la réalité du terrain. “Ce temps, à la pause déjeuner, nous permet justement de recevoir un public qui ne viendrait pas sur d’autres temps comme des jeunes pour la contraception ou des femmes victimes de violence conjugale.” “C’est aussi sur ce temps que ce font les transmissions”, renchérit une médecin-psychométricienne.
“Logique de souplesse”
Face aux syndicalistes, Stéphane Troussel a réaffirmé la volonté du département de continuer à apporter un service de qualité. “La Seine-Saint-Denis n’a aucune leçon à recevoir en matière de PMI. Il y a 110 centres de PMI (dont 78 en gestion directe par le département). On a le record en France. Il n’y a pas d’autres départements qui fait autant que nous“, pointe-t-il.
Par ailleurs, souligne-t-il, il y a eu des évolutions dans la réorganisation proposée par le département. C’est le cas, en effet, de l’extension des horaires d’ouverture en soirée qui est désormais d’une fois par mois pour les petits centres et de deux fois pour les plus importants. “Je veux un service public qui s’adapte au rythme de vie des gens. Avoir une amplitude horaire un peu plus large une fois par mois permettra à des gens qui ont des vies compliqués d’aller un peu plus tard en consultation“, justifie le président du 93.
“On est dans une logique de souplesse, précise pour sa part Eve Robert, directrice générale adjointe en charge des solidarités, qui indique également qu’il s’agit d’harmoniser le temps de la pause méridienne avec le reste des services de la collectivité. “Mais les agents pourront continuer à recevoir du public entre 12h30 et 13h30 en cas d’urgence.”
Le département reconnait les pénuries de personnel. “Il y a à la fois une crise du recrutement et des départs en retraite. C’est qui explique le trou“, répète-t-on. Mais Eve Robert réfute toute idée de supprimer des postes ou même des centres de PMI. Les syndicats regrettent par ailleurs que la Seine-Saint-Denis n’ai pas adopté des critères de pénibilités aussi avantageux que ceux dont bénéficient les agents du Val-de-Marne. “Je me suis engagé sur ce point: si le contrôle de légalité du Val-de-Marne passe, je m’adapterai et je reviendrai en séance“, a réaffirmé sur ce point le président du conseil départemental.
En attendant, les représentantes de l’intersyndicale, qui devraient être reçus par Nadia Azoug, vice-présidente chargée de l’enfance, de la prévention et de la parentalité, comptent poursuivre la mobilisation.
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