Au début des années 2010, ce-sont des dizaines et des dizaines de jeunes femmes nigérianes, mineures, qui se sont retrouvées exploitées sexuellement dans le bois de Vincennes.
Plusieurs proxénètes, condamnés en première instance en 2020, ont fait appel. Durant la deuxième semaine de janvier, un nouveau procès s’est donc tenu durant quatre jours avant d’être ajourné pour cause de Covid. Une épreuve particulièrement douloureuse pour les victimes qui tenaient à être présentes pour témoigner, pour raconter l’horreur de ce qu’elles ont vécu, depuis le moment où des micro-réseaux organisés sur place ont fait croire à leurs parents qu’elles auraient un travail en France, jusqu’à une prostitution sordide et forcée dans le bois de Vincennes.
Entre temps, il y a eu ce serment, le “juju”, un rite consistant à se soumettre à ses passeurs sous peine de mauvais sort. Puis le long périple pour rejoindre la France. Parmi les victimes, un groupe de neuf jeunes filles fera route ensemble, réparties dans trois zodiacs au moment de traverser la Méditerranée, “car on ne met pas toute la marchandise dans le même bateau par précaution”, relève l’avocate de l’une d’entre elles, Catherine Delanoë Daoud (interviewée suite au report du procès en janvier). Lorsqu’un des bateaux chavire, les jeunes filles ne savent pas nager. L’une d’elles se raccroche comme elle peut à une corde, par les pieds, les mains, les dents. Elle survivra, récupérée par un bateau italien. Les deux autres meurent noyées. Une fois dans le camp de migrants, elles ont un numéro à appeler et on vient les chercher. “80% des filles nigérianes qui arrivent dans ces camps sont destinées à cette issue”, indique l’avocate. Pour d’autres filles, le périple s’est arrêté avant la traversée de la mer, vendues dans des maisons closes en Lybie.
Dans l’affaire qui devait être jugée à Créteil, les jeunes filles sont arrivées à bon port, aux franges de Paris. C’est là que commence le véritable esclavage sexuel, dans le bois de Vincennes. Parfois, une fille se retrouve enceinte. C’est ce qui arrive à la cliente de Catherine Delanoë Daoud. S’en suit un avortement sauvage sur la jeune fille de 14 ans.
Durant les quatre premières et longues journées du procès en appel, du 4 au 7 janvier dernier, plusieurs victimes ont rassemblé leur courage pour être présentes, raconter leur calvaire. Mais le lundi 10, date à laquelle l’avocat général devait faire son réquisitoire, le procès a été reporté car l’un des accusés avait contracté le virus de la Covid-19. Une épreuve de plus pour les victimes car le report d’un procès lors d’une nouvelle session d’assises, avec d’autres jurés et juges, implique de tout recommencer, et prolonge d’autant l’anxiété liée au procès.
Audiencé à nouveau ce 27 septembre, le procès en appel devait donc démarrer ce mardi. Côté accusés, trois hommes et une femme dont un couple, déjà condamnés en première instance entre 10 et 19 ans de prison pour traite d’êtres humains et proxénétisme aggravés en bande organisée. Pour cette affaire, 16 victimes avaient été identifiées dont les deux qui sont mortes noyées. Las, le procès a été reporté à nouveau. Cette fois, c’est l’avocate de l’un des accusés qui était malade.
Une nouvelle épreuve pour les victimes.
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