En ce début d’année, les accompagnants d’élèves en situation de handicap (AESH) du Val-de-Marne ont décidé de durcir leur mouvement de protestation. En butte contre des avenants jugés comme dégradant davantage leurs conditions de travail, ces rouages essentiels de l’inclusion des élèves handicapés à l’école se sont mis en grève illimitée pour demander un véritable statut avec un salaire complet et une seule affectation.
Sous les fenêtres de l’inspection académique de Créteil, ce lundi après-midi, malgré le froid, Djamila Tamarat, s’époumone dans un mégaphone pour encourager ses consœurs à donner de la voix. “Abandon des PIAL (ndlr : Pôle d’inclusion d’accompagnement localisé), retrait des avenants. Un vrai statut, un vrai salaire. Blanquer, ça suffit la misère !” scandent les participants. Certains agitent les drapeaux de leur syndicat ou parti. D’autres brandissent des pancartes et des écriteaux exposant leur situation. “Je suis payée 760 euros par mois pour 21 heures/semaine. Pour travailler au quotidien auprès d’élèves en situation de handicap(s), on m’impose de faire plus d’heures gratuitement. Vous trouvez ça normal ?” interpelle l’une des affiches.
“Dès que mes enfants seront autonomes je quitterai ce métier”
“Au départ, ça fonctionnait plutôt bien. Je m’occupais à l’année d’un petit enfant autiste. Mais au cours de ces deux dernières années, le nombre d’élèves en situation de handicap et de notification de la MDPH a beaucoup augmenté et nous nous sommes retrouvés en sous-nombre pour gérer cela. Il faut ajouter à cela une rémunération faible qui stagne et un manque total de lien avec notre hiérarchie qui nous laisse seule sur le terrain. Dès que mes enfants seront autonomes et que je pourrais chercher du travail ailleurs, je quitterai ce métier”, confie une accompagnatrice de la maternelle Eva Salmon à Vitry-sur-Seine.
“Auparavant, ces enfants en situation de handicap étaient pris en charge par les instituts médicaux-éducatifs (IME). Lorsqu’ils venaient à l’école, ils étaient accompagnés des professionnels de ces structures, qualifiés et payés en conséquence. Aujourd’hui, c’est à nous de tout gérer alors que nous n’avons pas été formés pour cela”, ajoute une enseignante de cette même école.
Déjà mobilisés contre un statut qu’ils considèrent comme trop précaire, les AESH ont amplifié leur mouvement cet automne dernier lorsque leur a été soumis un avenant à leur contrat. Ils expliquent que celui-ci leur demande de travailler une heure de plus à rémunération constante, et d’accepter d’être fléché non plus sur un établissement mais sur les Pôles d’inclusion d’accompagnement localisé (PIAL) qui peuvent regrouper jusqu’à une dizaine d’écoles. Des premiers mouvements qui ont permis d’ouvrir le dialogue et d’obtenir des assouplissements, expliquent les grévistes.
Faute d’accord à Créteil, les manifestants veulent aller au ministère
“Ils nous ont assuré, mais seulement à l’oral, qu’il n’y aurait pas d’augmentation du temps de travail et que les AESH ne seraient plus mis à disposition que pour deux écoles, même si notre objectif ultime est d’avoir un AESH par établissement. Le problème, c’est que ces promesses ne se sont pour le moment pas concrétisées”, résume Luc Bénizeau, délégué Snudi-Fo. “Aujourd’hui, le rapport de force est en votre faveur. Ils n’arrivent pas à recruter, vous leur êtes indispensable. Votre mobilisation inspire les AESH ailleurs en France. Vos revendications impliquent une refonte du statut et pour cela, il faut aller le réclamer ce jeudi, lors de la manifestation au ministère de l’Education nationale”, propose Jérôme Antoine, délégué CGT Educ’Action.
Plusieurs personnalités politiques sont venues témoigner de leur soutien, à l’instar de la députée insoumise Mathilde Panot. ” J’ai vu une femme en train de fondre en larme devant une école maternelle parce qu’elle me disait, [que son] enfant [avait] été notifié à 100% par la MDPH (ndlr Maison départementale des personnes handicapées), et [qu’elle] se retrouvait avec une AESH pour 1h30. En deux ans de scolarité, elle avait eu dix personnes différentes. Pas possible de tisser un lien, de connaître la situation de l’enfant. C’est indigne à la fois pour les enfants et les AESH qui font ce métier parce qu’ils l’aiment”, témoigne-t-elle. “Comme peut-on estimer qu’il est suffisant pour vivre en région parisienne, de percevoir 760 euros ? A ce salaire là, il n’est pas possible par exemple, de se loger dans ma commune”, enchaîne le maire PCF de Vitry-sur-Seine, Pierre Bell-Lloch.
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Bonjour,
Le film de François Ruffin et Gilles Perret , “Debout Les Femmes”, porte sur l’élaboration d’un rapport parlementaire sur la précarité des AESH et AVS , les métiers du lien en général, dans le but de déposer une proposition de loi pour offrir un vrai statut à ces personnels, massivement féminins. C’est un beau film , passionnant , il faudrait en organiser la projection dans tous les sites de luttes et organiser une manif nationale devant l’Assemblée Nationale.
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