Alors que les enfants de réfugiés ukrainiens commencent à arriver dans le département, les syndicats SNUippFSU et Snudi-Fo alertent sur le manque d’encadrement spécifique aux enfants allophones (qui ne parlent pas le français) dénonçant les suppressions de ces postes spécialisés depuis la rentrée.
Alors que le département comptait environ 35 équivalent temps plein (ETP) d’enseignants spécialisés dans l’accueil des enfants étrangers et l’apprentissage du français renforcé, intervenant dans un peu plus d’une cinquantaine d’UPE2A (unités pédagogiques pour élèves allophones arrivants), cette capacité d’accueil spécifique a été réduite à la rentrée 2021. En raison de la crise sanitaire et de la fermeture des frontières, le nombre d’élèves étrangers arrivant à l’école en France avait en effet fortement diminué en 2021, laissant des places vacantes dans les UPE2A.
A l’occasion de la rentrée scolaire de septembre dernier, 7 équivalent temps plein, qui prenaient en charge 10 UP2A, à raison d’un demi-poste ou d’un poste complet en fonction des écoles, ont donc été gelés malgré les protestations des syndicats enseignants. Ces postes d’enseignants spécialisés ont été réaffectés dans le département.
“On a foutu en l’air un cinquième des postes de professionnels formés”
“On a foutu en l’air un cinquième des postes de professionnels formés”, regrette Thierry Guintrand, délégué 94 du SNUippFSU.
Les fermetures d’UP2A intervenues à la rentrée 2021 en Val-de-Marne
ARCUEIL : fermeture d’un poste
CHAMPIGNY-SUR-MARNE 2 : fermeture d’un demi-poste (poste partagé avec VILLIERS-SUR-MARNE)
CHOISY-LE-ROI : fermeture d’un demi poste (le demi-poste restant interviendra sur ORLY)
CRETEIL 2 : fermeture d’un poste
IVRY-SUR-SEINE : fermeture d’un poste
MAISONS-ALFORT : fermeture d’un demi poste (le demi-poste restant interviendra sur VILLEJUIF)
ORLY : fermeture d’un demi poste (le demi-poste restant interviendra sur CHOISY-LE-ROI)
SAINT-MAUR-DES-FOSSES : fermeture d’un poste
VILLEJUIF : fermeture d’un demi poste (le demi-poste restant interviendra sur MAISONS-ALFORT)
VILLIERS-SUR-MARNE : fermeture d’un demi-poste (poste partagé avec CHAMPIGNY-SUR-MARNE 2)
Depuis la fin 2021, un poste a été dégelé qui a permis de maintenir Villiers à un temps complet et à Bry-sur-Marne de bénéficier d’un demi-poste.
Les autres postes gelés ont été réaffectés dans le département.
“Il n’y a pas eu de suppression de poste UPEAA. Ces postes ont été mis à disposition du département afin de pouvoir s’adapter, sur chaque territoire, aux arrivées des élèves”, réagit la direction académique départementale, sollicitée par 94 Citoyens, avant de rappeler le rôle des UP2A. “Les UPEAA sont des unités pédagogiques pour élèves allophones arrivants. C’est un dispositif inclusif dont l’objectif est de permettre une scolarisation en milieu ordinaire en prenant en compte les besoins spécifiques de ces élèves.
Il permet de favoriser l’apprentissage du français ainsi que la continuité pédagogique. Le principe de l’inclusion scolaire permet un accueil en classe au fur et à mesure des progrès des élèves, la durée et les modalités du dispositif étant adaptés à leurs besoins. Pour exemple, dans un groupe de 15 élèves, certains déjà présents depuis le mois de septembre n’auront pas les mêmes besoins que des enfants nouvellement arrivés. Une vigilance particulière et une mobilisation des équipes est en œuvre pour répondre à tous les besoins de tous les élèves.”
Alors que les frontières ont rouvert, les élèves étrangers ont toutefois commencé à revenir ces derniers mois, faisant largement dépasser le seuil de 15 élèves dans plusieurs UPE2A. Et depuis quelques jours, les premiers enfants de réfugiés ukrainiens sont venus s’ajouter aux élèves allophones déjà présents.
“Nous avons interpellé en vain la direction académique à chaque CTSD (comité technique réunissant la direction et les représentants du personnel)”, insiste Cyrille Micheletta, délégué SNUippFSU qui dénonce une dérive de fonctionnement des UP2A, hors du cadre légalement fixé. “Selon la circulaire de 2012, une UP2A doit disposer d’au minimum 9 heures d’enseignement or il y a plusieurs situations où cela n’est pas le cas en Val-de-Marne. Il y a peu, une enseignante, qui est déjà à mi-temps à Choisy-le-Roi, intervenait en parallèle sur 3 écoles à Villeneuve-le-Roi !” développe l’enseignant.
C’est dans ce contexte que le syndicat a écrit à la préfète pour lui demander de “dégeler” les postes. De son côté, le syndicat Snudi-FO a écrit à la directrice académique avec la même requête. Fin 2021, les syndicats avaient par ailleurs obtenu le soutien du député LREM Jean-François Mbaye, lequel avait déjà écrit à la directrice académique pour l’alerter sur la situation à Choisy-le-Roi – Villeneuve-le-Roi.
Non respect des 9 heures minimum dans certaines UPE2A
Dans leurs courriers aux représentants de l’Etat et de l’Education nationale, les deux syndicats détaillent les situations de tension dans plusieurs villes du Val-de-Marne.
“À Maisons-Alfort, le demi dispositif d’UPE2A de l’école Parmentier accueille 15 élèves allophones dont les familles sont hébergées dans les communes de Maisons-Alfort et de Saint-Maurice par le SAMU social, la Croix Rouge ou France Terre d’Asile. Depuis le retour des congés d’hiver, 4 nouveaux élèves ont intégré l’UPE2A : un élève primo- arrivant du Venezuela inscrit en classe de CM2 et 3 élèves primo-arrivants d’Ukraine inscrits en CM2 et CP, portant les effectifs du dispositif à 19 élèves allophones. Un nouvel élève, originaire de Colombie, est attendu dans les jours prochains. Ce jour, la mairie de Maisons-Alfort nous a par ailleurs fait état de l’inscription de 2 nouveaux élèves primo-arrivants d’Ukraine dans les écoles de la commune. Vous vous étiez pourtant engagée à rétablir un dispositif à temps complet à partir de 15 élèves”, détaille Snudi-FO 94.
Même cas de figure à Villejuif où l’une des UPE2A, réduite à un mi-temps en début d’année, accueille déjà 23 élèves, dont 2 réfugiés d’Ukraine. A l’école Jean Macé de Choisy-le-Roi, qui ne compte également qu’un demi-poste et a déjà dépassé les 15 élèves, plusieurs nouveaux arrivants, dont un Moldave et un Ukrainien, ont dû aller dans des classes banales sans bénéficier de cet accompagnement, poursuit le syndicat qui énumère les situations de saturation, évoquant également Villeneuve-le-Roi, Vincennes, Nogent-sur-Marne…
“Nous demandons également de la transparence, et notamment le nombre d’élèves accueillis dans les UPE2A du département”, reprend Cyrille Micheletta.
“Un regard attentif est porté à chaque dispositif et un dialogue avec les inspecteurs de circonscription permet de faire les ajustements nécessaires”, assure pour sa part la direction académique.
De leur côté, les syndicats entendent mobiliser les enseignants d’UPE2A pour mener des actions dans les semaines qui viennent.
Enseignante à Créteil, j’ajoute qu’un élève égyptien est arrivé en CM2 la semaine dernière, hier un péruvien, dans les mêmes conditions, il y a quelques mois un colombien…ces enfants allophones nouvellement arrivés n’ont pas été testé et ne bénéficient pas du dispositif UPE2A (l’unique du secteur est saturée nous dit-on). L’Etat français est par conséquent dans l’illégalité, puisqu’elle a le devoir selon la circulaire d’octobre 2012, d’assurer au moins 9h/semaine de français langue seconde à ces élèves.
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