Le parquet de Créteil a requis mardi de la prison avec sursis contre quatre policiers pour violences sur deux frères. Ces derniers avaient eux-mêmes appelé la police pour les prévenir d’un conflit entre un de leurs amis qui s’était disputé avec sa compagne, et un commerçant qui brandissait un couteau. Les faits, qui se sont déroulés à Vincennes, remontent à il y a dix ans.
Ces quatre policiers, qui appartenaient alors à la Brigade anti-criminalité, sont aujourd’hui gradés ou à la retraite. La procureure a requis à leur encontre cinq mois d’emprisonnement avec sursis, expliquant ce quantum par l’ancienneté des faits. Pour le cinquième prévenu, un stagiaire policier n’appartenant pas à la BAC en 2012, la procureure a préféré “laisser le tribunal apprécier”, sans requérir de peine.
Les cinq ont demandé, par la voix de leurs conseils, la relaxe.
Le 17 mars 2012 à 4H45, Brice, 31 ans, appelle la police pour les prévenir d’un conflit: un ami, qui s’était vivement disputé avec sa compagne, est menacé par un commerçant qui brandit un couteau.
Brice téléphone aussi à son aîné, Franck. En téléphonant à la police, les deux frères ont “agi en tant que citoyens”, selon la procureure, alors que les forces de l’ordre réagissent de “manière tout à fait disproportionnée” à leur égard.
“Je croyais qu’on allait être félicités”
Les deux frères racontent avoir essayé de maîtriser la situation entre leur ami et le commerçant, en attendant l’arrivée de policiers, suivis d’une équipe de la Brigade anti-criminalité (BAC) en renfort.
“Je croyais qu’on allait être félicités” par les policiers mais tout a basculé, selon eux, quand l’un d’entre eux a donné “un coup de poing” à leur ami, décrit Franck.
21 jours d’ITT (Interruption temporaire de travail)
“En deux secondes”, lui et son frère, 34 et 31 ans, sont aussi menottés. “On a fait en sorte que mes doigts touchent mes avant-bras”, dit encore Franck. Des constatations médicales feront état d’un arrachement osseux et d’une vertèbre cassée.
Bilan : 21 jours d’ITT pour Franck, 2 pour Brice. Le lien de causalité entre l’action des policiers et ces blessures est contesté par la défense.
“On passe du calme au Far West”
Pour le président de la chambre correctionnelle, “il y a deux phases” dans cette scène: “on passe d’une situation calme”, avec les premiers effectifs de police arrivés sur place, “à une situation où ça part dans tous les sens” avec l’arrivée de la BAC. “On passe du calme au Far West“, dit-il encore, citant un témoin.
Ces policiers étaient dans “un effet tunnel”, dénonce l’avocat des victimes, Arié Alimi.
Un problème de communication entre les premiers agents sur place et l’équipe de la Bac
L’un des policiers, à qui est reproché des coups de matraque télescopique, affirme “ne pas avoir eu l’information” que la situation avait déjà été maîtrisée, agissant “dans l’urgence” en pensant “intervenir pour des violences sur une femme avec un porteur de couteau”.
Cette “absence de communication” et de recherche d’information de la part des policiers est déplorée par le parquet.
Pour les policiers, à qui l’accusation reproche aussi des coups de tonfa et une clef d’étranglement, les deux frères étaient virulents. Le but du menottage “était de figer la situation pour ne pas qu’il y ait de blessé de part et d’autre”, affirme l’un d’entre eux.
“Ce n’est pas du tout une horde qui vient frapper quelqu’un”, plaide Laurent-Franck Liénard, un avocat de la défense, pour qui “il y a usage de la force, mais pas de violences”.
Ce 17 mars 2012, les frères ont ensuite été démenottés, sans suite judiciaire. Une particularité “pas fréquente” relevée par le président. “Même pas de convocation rien, pas d’outrage, pas de rébellion…”, note-t-il.
Décision le 18 août
Après neuf heures d’audience, le tribunal a mis sa décision en délibéré au 18 août.
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