Féminicide | | 02/03/2023
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A Bondy, une foule pour rendre un dernier hommage à Flora, tuée par son mari

A Bondy, une foule pour rendre un dernier hommage à Flora, tuée par son mari © CH

Près de 250 personnes ont marché dans les rues de Bondy en mémoire de Flora, aide-soignante à l’hôpital Mondor de Créteil, tuée par son mari le 11 février. Elle est une des trois victimes de féminicide depuis le début de l’année en Seine-Saint-Denis.

Flora, c’est une femme battante qui souriait toujours, elle ne se plaignait jamais, elle prenait sur elle et faisait tout pour ses enfants“, confie sa sœur, Ornella, venue d’Orléans pour la levée du corps qui s’est déroulée mardi. “C’était la yaya [l’ainée], on est là pour elle.”

Dans la foule de quelque 250 personnes qui s’est élancée du parvis de la mairie de Bondy, elle accuse encore le coup. “Ce n’est pas facile de se réveiller le matin et de se dire que ta sœur est morte. Mais c’est encore plus dur parce que ce n’est pas une maladie qui l’a emportée. C’était une mort brutale. Elle laisse quatre enfants, une fille et trois garçons dont un de deux ans. Ils sont traumatisés. Je n’accepterai jamais. Aujourd’hui je veux comprendre comment il a tué ma sœur, comment il l’a laissé mourir.”

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Le portrait de Flora Bissard, victime de féminicide le 11 février.

Aucun indice de violence

A 34 ans, Flora Bissard est morte étranglée par son mari le 11 février dans leur domicile de la rue Roger Salengro à Bondy. Son corps sera inhumé à Bangui (République Centrafricaine) où elle est née. Elle était aide-soignante à l’hôpital Henri Mondor depuis 2020.

Pour ses anciennes collègues de la maison de retraite La Ceriseraie à Gagny où elle avait travaillé auparavant, son décès reste inexplicable. “Le jeudi précédent sa mort on avait encore parlé au téléphone. On est restées amies après son départ de la maison de retraite. Nos enfants jouaient ensemble. Aujourd’hui ma fille me demande pour elle. Je ne lui ai pas encore dit“, relate Nathalie. “Si sa sœur réussit à obtenir la garde des enfants, ils pourront continuer à se voir“, ajoute-t-elle au bord des larmes.

En tête du cortège, un portrait lumineux de Flora Bissard orne la banderole que porte à bout de bras les membres de sa famille, des élus dont le maire de Bondy, Stephen Hervé, et des militants d’associations.

Est-il possible que ces gens, ces bourreaux qui frappent et tuent nos filles sont véritablement malades? Continuerons-nous à voir le féminicide sous cet angle et croire que les bourreaux sont malades mentalement?“, a interpelé Michèle Natikali, l’une de ses tantes qui a pris la parole à l’issue de la marche silencieuse. “De grâce, si vous constatez que vous êtes menacée par votre conjoint ne prenez pas ça à la légère, ne négligez jamais ces menaces, c’est une préméditation“, a-t-elle alerté, avant de confier par la suite: “Flora était timide, on ne savait pas, c’est pour cela que j’appelle les femmes à passer par un tiers pour dénoncer ce qu’elle vivent.”

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Près de 250 personnes étaient réunies mercredi soir à Bondy pour rendre hommage à Flora.

Trois féminicides en quinze jours

Ça peut toucher n’importe qui“, a souligné Marie-Christine Mourgue, présidente de l’association SOS Femmes 93. “Flora était bien insérée socialement, elle travaillait, elle avait une famille qu’elle voyait régulièrement, elle avait des enfants qui jouait au foot dans le club local. Apparemment, il n’y a pas eu de sensibilité pour percevoir des indices qui auraient pu être signalés aux proches, des collègues, de la famille, du personnel scolaire ou associatif, qui laissaient présager qu’il y avait de la violence conjugale.

En quinze jours, trois femmes sont mortes sous les coups de leur conjoint en Seine-Saint-Denis. Quelques jours après Flora, Valéria, 51 ans, avait été retrouvée le 13 février dans une chambre d’hôtel à Sevran poignardée par de multiples coups de couteaux. Ce même jour, le corps démembré d’Assia était découvert Buttes-Chaumont (Pari 19ème arrdt). Plusieurs semaines plus tard, le mari de cette habitante de Montreuil avouait l’avoir tuée.

C’est le troisième féminicide depuis le début de l’année. C’est glaçant“, observe Ernestine Ronai, responsable de l’Observatoire départemental des violences envers les femmes de Seine-Saint-Denis. “Il faut permettre aux femmes de révéler les violences et donc il faut former les professionnels, dans la police, mais aussi les services sociaux à questionner ces violences. Il faut ensuite les croire et les protéger tout de suite avant la sanction. Notre société doit comprendre la dangerosité des hommes violents et leur imprévisibilité“, analyse-t-elle. “Par ailleurs, le père, violent conjugal, qui a fait que ses enfants se retrouvent orphelins, est privé de l’autorité parentale. Et les enfants de Flora ont été pris en charge par un protocole, avec des soins pour le psycho-trauma“, relève-t-elle.

Ce protocole dit “féminicide” a également été déclenché pour apporter un accompagnement d’urgence au fils de Valéria qui avait assisté à la mort de sa mère.

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