Détection des signaux faibles, boite aux lettres, élèves ambassadeurs, mallette des parents… À Créteil, le collège Plaisance s’est attaqué au harcèlement scolaire depuis plusieurs années. Retour d’expérience.
“Je suis enseignante et maman, et je trouve inconcevable d’avoir face à moi un élève qui souffre tous les jours en venant à l’école sans que l’on se doute de rien“, explique une prof de math du collège Plaisance de Créteil. Volontaire pour recevoir une formation pour traiter les cas de harcèlement, elle a participé au lancement de la cellule de l’établissement il y a plus de trois ans.
Cette cellule, convoquée par la conseillère principale d’éducation, applique le principe de la préoccupation partagée importée de Suède. Ecoute de l’élève harcelé, entretiens individuels avec le harceleur, les témoins, les parents… pas question de laisser passer. Il s’agit de faire comprendre aux élèves que la situation est prise au sérieux. “C’est souvent suffisant pour casser la dynamique de groupe et entraîner une remise en question“, illustre Eric Metzdorff, conseiller auprès de la rectrice sur les questions de harcèlement.
Selon la principale, Geneviève Justin, 90 % des cas soulevés devant la cellule sont réglés de manière pacifique en associant l’auteur de l’intimidation à la résolution. “Les 10 % restants débouchent sur des procédures disciplinaires scolaires, voire des conseils de discipline avec des écrits au parquet.” En 2021, cinq jeunes filles de quatrième qui harcelaient une élève depuis deux ans ont ainsi été convoquées en conseil de discipline et l’une d’elles a été exclue définitivement.
Des collégiens ambassadeurs
“Plus tôt une situation est signalée, plus tôt elle est traitée“, insiste la principale. Pour prévenir ces situations, une vingtaine d’élèves sont devenus ambassadeurs pour relayer les messages de prévention et être à l’écoute du climat scolaire, et reçoivent une formation adaptée de dix heures. “Parfois, les auteurs des violences physiques ou verbales ne se rendent pas compte des conséquences de leurs actes. Il faut faire comprendre à l’auteur ce qu’il fait subir et redonner confiance à la victime pour qu’elle ose parler“, synthétise Imène, une jeune ambassadrice de sixième.
Boite aux lettres et carnets de liaison adaptés, mallette des parents
Par ailleurs, le collège propose une boîte aux lettres pour déposer de discrets signalements. Les carnets de liaison, eux, contiennent des coupons de demande d’aide pour soi ou un camarade. Ils présentent aussi le protocole de gestion des cas de harcèlement.
L’établissement adresse également aux familles une “mallette des parents“, un ensemble de documents pour s’impliquer dans la scolarité de son enfant, notamment sur le sujet du harcèlement. “Le harcèlement est protéiforme et évolutif. Il y a en matière d’atteinte à autrui au moins autant de créativité que de réponses éducatives“, ajoute la principale qui incite le personnel, les parents et les enfants à veiller à toute nouvelle forme de violence ou d’intimidation.
“Le harcèlement et le cyber-harcèlement sont des enjeux du quotidien et vous illustrez parfaitement l’alliance que nous avons tous vocation à former entre équipes des établissements et élèves pour se protéger de ce phénomène“, salue la rectrice, Julie Benetti, venue visiter l’établissement ce jeudi à l’occasion de la Journée nationale de lutte contre le harcèlement scolaire.
Questionnaire d’autoévaluation, et déploiement du programme Phare
Au niveau national, un questionnaire d’autoévaluation a été mis en place, à faire remplir par les élèves du CE2 à la terminale, pour évaluer s’ils sont susceptibles d’être harcelés. Deux heures banalisées de sensibilisation ont été prévues sur ce sujet, à effectuer entre le 9 et le 15 novembre. Depuis la rentrée 2022, tous les établissements doivent par ailleurs progressivement adhérer au programme Phare. Celui-ci généralise concrètement le dispositif pilote testé à Créteil, avec des ambassadeurs, une dizaine d’heures de sensibilisation, des référents académiques…
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