Histoire | | 31/03/2023
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À Créteil, les étudiants en histoire font revivre Hollywood sur Marne

À Créteil, les étudiants en histoire font revivre Hollywood sur Marne © Sébastien Malaprade

Connaissez-vous l’histoire d’Hollywood-sur-Marne ? Bry-sur-Marne, Joinville-le-Pont, Saint-Maurice… Dès les débuts du septième art, de nombreux studios et laboratoires de développement élisent domicile dans le Val-de-Marne, prisé autant pour ses espaces que sa proximité à la capitale. Cette histoire, les six étudiants en histoire publique de l’Université Paris Est Créteil la racontent en exposition, à découvrir ce week-end à la médiathèque Nelson Mandela.

L’occasion de mettre en valeur l’évolution de métiers du cinéma parfois oubliés, tout en montrant l’impact de cette industrie sur le territoire. De la recherche historique à la scénographie en passant par la recherche de financement, tout dans cette exposition a été réalisé par les étudiants – et ce sont eux qui nous font la visite guidée.

Derrière l’écran, des professions invisibles

L’exposition s’intéresse d’abord aux différents métiers de studio, souvent méprisés, souvent féminins.“Nous avons voulu faire une histoire sociale du cinéma, en se donnant la tâche de montrer ceux qui sont invisibilisés, avec un sous-fil directeur axé sur les femmes”, explique Castille, une des étudiantes. À l’aide d’archives photographiques issues du tournage de La Belle et la Bête de Jean Cocteau (1946), on découvre le travail de fourmi des “HMC” (“Habillage, Maquillage, Coiffure”). Pour transformer Jean Marais en monstre, ce ne sont pas moins de cinq heures de maquillage qui furent nécessaires pour chaque jour de tournage.

Les étudiants de l’UPEC font découvrir l’exposition.

Un travail majoritairement occupé par des femmes, mais aussi par les “russes blancs”, ayant fui le pays après la Révolution bolchevique de 1917. Pour beaucoup d’acteurs, l’arrivée du cinéma parlant à la fin des années 1920 révèlera leurs accents, les forçant à passer dans les coulisses. Même situation pour les script-girls, sortes de secrétaires de tournage, essentielles pour éviter les faux raccords, et pourtant très souvent oubliées dans les génériques de fin, encore aujourd’hui. Avec le témoignage de Sylvette Baudrot, script-girl légendaire ayant commencé en 1950 et encore active de nos jours, on découvre la manière dont les questions de genre s’accumulent à la précarité subie par les métiers du spectacle : “J’ai été une bonne script, mais je n’ai pas forcément été une bonne mère”, confesse ainsi Sylvette Baudrot.

Hollywood-sur-Marne

L’exposition s’attache également à retracer l’histoire du cinéma dans le territoire, qui ne s’appelle pas encore le Val-de-Marne. Si les premiers studios de France sont fondés en 1897, par les frères Méliès à Montreuil-sous-Bois, en lisière du Val-de-Marne, c’est à Vincennes qu’ouvre la première usine de production de pellicules, un an plus tôt. Les Méliès sont ensuite suivis par les frères Pathé, qui s’installent quant à eux à Vincennes. Par la suite, c’est dans le département que la plupart des studios et industries suivantes éliront domicile. Une histoire que les étudiants ont souvent eux-même découvert en préparant l’exposition : “Moi-même qui habite dans le Val-de-Marne depuis 25 ans, je n’étais pas au courant de tout ça”, s’amuse Mériadec, un des étudiants. Rapidement, le gros de l’industrie jette l’ancre à l’est du Bois de Vincennes, avec la création des usines et laboratoires de Joinville-le-Pont en 1906, ainsi que les studios de Saint-Maurice et de Joinville-le-Pont, respectivement lancés en 1913 et 1921. Pour les studios de Saint-Maurice, la consécration arrivera en 1930, avec le rachat par la Paramount. À l’époque, le cinéma parlant et le doublage n’en sont qu’à leurs balbutiements. C’est donc dans l’Est parisien que les films sont entièrement tournés à nouveau, avec costumes et décors identiques. L’idylle ne durera que trois ans, écourtée par l’émergence du doublage.

Petit projecteur commercialisé à destination des familles dans les années 1930.

Après-guerre, la donne change. Les exigences artistiques des réalisateurs de la Nouvelle Vague, ainsi que l’arrivée du Nagra III, permettant de réaliser des enregistrements sonores de qualité quasiment partout, accélèrent le déclin des studios val-de-marnais, délaissés pour les tournages en extérieur. Les usines et laboratoires de Joinville-le-Pont ferment en 1969, suivis par les studios de Saint-Maurice en 1971. Mais à partir de 1987 et l’ouverture des studios de Bry-sur-Marne, le secteur connaît une véritable renaissance. Initialement prévus pour les tournages de télévision, les locaux sont rapidement courtisés par le monde du cinéma, puis des séries. Jusqu’à accueillir des tournages pour Netflix, ou encore les décors du dernier film “Astérix et Obélix : l’Empire du Milieu”. Bref, l’histoire est riche – il y aurait sûrement de quoi en faire un film !

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