C’est à Issy-les-Moulineaux, à l’ouest de Paris, que Nina Métayer, cheffe élue “Pâtissière mondiale 2023”, a installé son laboratoire il y a trois ans. “J’ai la vie que je voulais“: dès 05h00 du matin, dans ce local spacieux d’un immeuble industriel, la pâtissière teste de nouvelles recettes et prépare les gâteaux commandés en ligne.
Les commandes explosent depuis que, fin octobre, la pétillante cheffe de 35 ans a été élue “Pâtissière mondiale 2023”, devenant la première femme à obtenir ce titre, décerné par l’Union internationale des boulangers et pâtissiers. Une revanche pour cette boulangère de formation qui a vite vu “les portes se fermer” et s’est tournée vers la pâtisserie, où les choses n’étaient “forcément pas plus faciles” pour une femme il y a 15 ans.
“Éviter les pertes” et être proche des clients
Tout juste rentrée de New York où elle présentait sa collection de desserts pour le 1931 Café de l’horloger de luxe Jaeger-LeCoultre, elle fait dans son laboratoire à Issy-les-Moulineaux, un essai de sa nouvelle tarte à la mangue. Dès 05h00 du matin, la pâtissière française Nina Métayer, “meilleure au monde“, est sur le pont pour livrer les gâteaux de sa boutique en ligne, un concept rare et innovant.
Après avoir travaillé dans des grands restaurants avec les chefs Yannick Alléno, Amandine Chaignot ou Jean-François Piège et forte de ses titres de “pâtissière de l’année 2016” du magazine Chef et “pâtissière de l’année 2017” du guide Gault et Millau, Nina Métayer s’est installée, il y a trois ans, dans des locaux spatiaux d’un immeuble industriel pour développer sa propre entreprise.
Ses gâteaux se commandent en ligne pour être livrés ou récupérés à Issy ou dans quelques corners à Paris. Un business model qui permet “d’éviter les pertes” et… d’être plus proche des clients, avec des gestes personnalisés et des discussions “sur le produit et pas sur le paiement” au moment du retrait de la commande, souligne la pâtissière.
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“Elle fait progresser la profession“
“On a été trois, on est trente maintenant“, raconte fièrement cette mère de fillettes de trois et six ans, dont le mari, Mathieu Salomé, travaille désormais avec elle en tant que directeur général de l’entreprise. Depuis le sacre fin octobre, le succès est total : “on a dû monter (notre production), mais on est quand même limité parce qu’on est des artisans, pas des industriels”, dit-il.
“Nina représente tout ce que la pâtisserie moderne peut concentrer. Son parcours est exemplaire, elle fait progresser la profession“, commente pour l’AFP Marc Esquerré, responsable de la rédaction du Gault et Millau, en saluant sa vision “extrêmement ouverte” et sa carrière menée de façon “libre et excellente“. Jean-François Piège, qui a ouvert en 2015 avec Nina Métayer son “Grand Restaurant” aujourd’hui doublement étoilé, qualifie ses créations de “délicates, différentes et singulières”.
“Quand on mange un gâteau, c’est pour se faire plaisir“
De son côté, la cheffe précise ne pas chercher “des recettes incroyables que personne n’a faites” mais préfère apporter son petit twist. “On va le faire avec l’instinct, mais toujours millimétré : tout est pesé, calculé, le diamètre, l’épaisseur… on a une micro-balance pour être à un zeste près, pour qu’on puisse le reproduire“.
Elle n’est pas non plus dans une démarche de moins de gras, vegan ou sans gluten. “Je pars du principe qu’il ne faut pas mentir aux gens, ni à son cerveau. Quand on mange un gâteau, c’est pour se faire plaisir. Je préfère un bon gâteau avec du beurre, du gluten, des œufs, mon cerveau a eu sa récompense et il n’en redemande pas plus que ça“. Et quand les ingrédients ont du goût, cela réduit naturellement le sucre, assure-t-elle.
“Une équipe soudée et une femme-cheffe“
La pâtissière, qui est de tous les salons gastronomiques, fait partie de jurys des concours culinaires et a des projets à l’étranger, publie souvent sur les réseaux sociaux des vidéos où elle prépare des pâtisseries avec ses filles. “J’aurais aimé avoir ce modèle de femmes-cheffes, entrepreneuses, avec des familles heureuses“, explique-t-elle. La pâtisserie, où “les cinq sens sont en éveil“, c’est “important pour l’évolution de l’enfant, pour apprendre à compter, à peser, la gestuelle… C’est tellement chouette de transmettre ça“.
Dès le petit matin, ses cheveux cachés sous une coiffe, Nina Métayer est à l’œuvre, entourée de ses sous-cheffes et collaboratrices qui pochent des pavlova mangue-passion et tartes tatin. “Une ambiance pareille, une équipe soudée et une femme-cheffe, cela rassure beaucoup les jeunes filles qui commencent la pâtisserie, parce que ce n’est pas partout pareil“, confie Lucie Martin-Pierrat, 30 ans. “C’est inspirant. La cheffe Nina est là, mais les autres postes à responsabilité sont aussi tenus par des femmes. On n’a pas de plafond de verre“, résume Mathilde Jeannes, 27 ans.
Par Olga NEDBAEVA
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