Environnement | | 05/04/2023
Réagir Par

Quand les légumes pourris du Min de Rungis nourrissent les terres de la plaine Montjean

Quand les légumes pourris du Min de Rungis nourrissent les terres de la plaine Montjean

En pleine semaine du compost, la PME Upcycle a présenté ce mardi un prototype de super broyeur de gros volume pour alimenter le compostage. Un concept expérimenté depuis plusieurs mois sur le marché de Rungis, pour nourrir les terres agricoles de la plaine Montjean. Reportage.

Un empilement de cageots de bananes trop mûres, des pommes de terres germées, des aubergines flétries. Autant de fruits, légumes et leur cagette, engloutis en quelques minutes par ce broyeur unique en son genre. Pour Upcycle, la valorisation des déchets est une raison d’être depuis sa création en 2011. À l’époque, cette jeune pousse, parmi les pionnières de l’économie circulaire, avait ouvert des champignonnières au MIN (Marché d’intérêt national) de Rungis pour faire pousser des pleurotes à partir de marc de café. (Voir notre article). Désormais, la société, qui dispose de bureaux au Cresco de Saint-Mandé mais a installé son siège social à Versailles, propose des solutions de compostage comme par exemple les bornes sécurisées d’apport volontaire de compost, installées dans plusieurs villes. (Voir, dans Transitions urbaines #5, notre retour sur l’implantation de nouvelles bornes le week-end dernier, à Maisons-Alfort).

Pour faciliter le compostage, Upcycle a cette fois imaginé un broyeur mélangeur en amont, relié à des containers de compost. Un nouveau concept baptisé le BRM 1000 (acronyme de broyeur remueur mélangeur avec une cuve de 1000 litres). “Mélanger simultanément des cagettes et des biodéchets, accepter les noyaux de mangue, la figue d’artichauts pour en faire de la matière parfaite à composter, demande des tas d’ajustements”, résume Grégoire Bleu, le président de la PME du compost, qui teste sa machine sur le MIN depuis plusieurs mois.

Grégoire Bleu, président d’Upcycle

Pour cette expérimentation, Upcycle a noué un partenariat avec l’Association nationale des épiceries solidaires (Andes) qui dispose d’un chantier d’insertion sur place, Les Potagers de Marianne, qui recycle les invendus au profit de l’aide alimentaire. L’association a ajouté une nouvelle étape, le tri, séparant les fruits et légumes encore à consommer des éléments pourris, à composter. “Avant, nous n’acceptions que les beaux invendus pour alimenter notre réseau d’épiceries solidaires. Maintenant, nous pouvons aussi valoriser les mauvais invendus. Le tri nous permet d’être plus flexibles vis-à-vis des grossistes et de les encourager à nous donner davantage“, motive Nathan Bardin, directeur du chantier d’insertion des Potagers de Marianne. Pour les employés du chantier d’insertion, c’est aussi une nouvelle compétence acquise, pour manipuler les machines et s’aguerrir à la gestion des biodéchets.

Au total, le super broyeur peut traiter 160 kg de biodéchets par jour. Sa cuve est vidée au fur et à mesure dans le composteur électromécanique. Les biodéchets y sont ensuite dégradés pendant quinze jours par des bactéries thermophiles avant d’être placés dans des caisses pour maturer le compost durant huit semaines.

Qui récupère le précieux engrais ? La plaine agricole de Montjean, située à deux kilomètres du marché de Rungis. “Nous avons reçu ce lundi les premières livraisons de compost sur cet espace à 36 hectares. C’est un beau projet de territoire en circuit court“, s’en réjouit le maire de Rungis, Bruno Marcillaud.

Le défi du compostage à grande échelle

Pour le Min de Rungis qui produit encore 30 000 tonnes de déchets par an, cette expérience ouvre une alternative à l’incinération et à la méthanisation. “Quand je suis arrivé à Rungis (ndlr, 2012), il y avait 80 000 tonnes de déchets. Aujourd’hui, grâce à l’action de tous, nous en sommes à 30 000 tonnes. L’essentiel est composé de déchets qui se brûlent mais une partie part au compostage, en méthanisation ou en biogaz”, explique Stéphane Layani, président de la Semmaris, la société qui exploite le marché. “Ce test préfigure le marché d’économie circulaire du XXIe siècle“, poursuit le patron du MIN. Concernant le compostage, la Semmaris a, pour sa part, passé un contrat avec la Sede, filiale de Veolia, début 2022, pour valoriser 5 000 tonnes de déchets par an, transférés par camions sur cinq sites de traitement.

De son côté, Upcycle prépare déjà la seconde version de son broyeur et s’apprête à lancer sa production sur son usine de Mayran, en Aveyron.

Abonnez-vous pour pouvoir télécharger l'article au format PDF. Déjà abonné ? Cliquez ici.
Aucun commentaire

    N'envoyez que des photos que vous avez prises vous-même, ou libres de tout droit. Les photos sont publiées sous votre responsabilité.

    Ajouter une photo
    Ajouter une photo

    Laisser un commentaire

    Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

    Vous chargez l'article suivant