Installée à Villejuif Biopark depuis l’année dernière, Innoverda trace sa route dans la chimie verte. Cette pépite de la ChemTech propose une alternative aux réactifs toxiques et corrosifs grâce à l’électricité. Rencontre avec sa co-fondatrice, Irène Erdelmeier.
Arrivée d’Allemagne pour effectuer un postdoctorat au CNRS, Irène Erdelmeier travaille depuis une trentaine d’années pour l’industrie pharmaceutique et nutritionnelle. C’est dans ce contexte que la chimiste a eu une intuition. “Tout est parti d’une réflexion sur les nouveaux modes de production de molécules, confie-t-elle. Car l’approche classique consiste à utiliser des réactifs corrosifs, toxiques, des matériaux non renouvelables, des solvants, de la chaleur. Et cela impacte fortement l’environnement.” Irène Erdelmeier a alors eu l’idée d’utiliser l’électrosynthèse comme procédé alternatif.
Ce procédé permet, en effet, de transformer un élément chimique à l’aide d’électrodes. Dans le schéma ci-dessous, par exemple, un colorant jaune passe à travers deux électrodes et en ressort bleu grâce à un faible courant électrique qui a provoqué un transfert d’électrons.
Le temps des tests
Avec Sylvain Daunay, chimiste rencontré dans sa précédente entreprise et devenu depuis son associé, Irène Erdelmeier teste son hypothèse. Pour expérimenter, les associés louent un espace à La Paillasse, un laboratoire collaboratif à Paris. Ces essais permettent de valider plusieurs réactions chimiques pour lancer leur catalogue. Concrètement, la startup, créée fin 2017, développe deux innovations pour verdir la chimie l’électrosynthèse et l’électrodialyse.
Cet article s’inscrit dans le cadre d’une série de portraits d’entreprise du Val-de-Marne réalisés avec le soutien de la Chambre de commerce et d’industrie. La CCI 94 accompagne la société Innoverda en l’accueillant à la pépinière d’entreprises de Villjuif Biopark, propriété de Wacano (filiale de la CCI), opérée et animée par la CCI.
Après les débuts à la Paillasse, les entrepreneurs passent ensuite un an à l’université Paris-Cité avant de poser leurs valises à la pépinière d’entreprises Villejuif Biotech, dédiée à la santé et aux biotechnologies. Outre la proximité de Paris et les locaux neufs, l’équipe souhaite s’inscrire dans son écosystème. “Nous avions déjà des projets de collaboration dans le cadre de recherche anti-cancéreux avec une équipe de l’Institut Goustave Roussy à Villejuif, et le Biopark fait partie du Cancer Campus“, motive la présidente.
“Dès notre arrivée, nous avons loué deux unités, une que nous avons équipée en laboratoire de recherche, l’autre que nous avons conçue comme un atelier pilote. Nous avons ainsi pu développer de nouveaux procédés de production et montrer que l’on peut monter en échelle avec des productions de quelques dizaines de kilogrammes“, développe Irène Erdelmeier.
Aujourd’hui, l’équipe d’Innoverda compte six personnes.
Une chimie plus verte et moins chère
Pour convaincre de l’intérêt de cette technologie, la jeune pousse étudie l’impact de l’électrochimie sur les productions envisagées par ses clients et leur détaille le bilan comparatif entre l’approche classique et électrochimique. Cette technique permet non seulement de réduire les émissions de CO2 mais aussi la quantité de déchets produits, et également de réduire les coûts, insiste la présidente.
Ces dernières années, la ChemTech a travaillé sur des produits peu connus du public mais qui entrent dans la composition de biens de grande consommation : les médicaments, les bioplastiques, les compléments alimentaires ou la cosmétique.
Si, en 2017, à la création d’Innoverda, l’électrochimie restait encore confidentielle, elle gagne aujourd’hui en notoriété, se réjouit la fondatrice. “Il y a une volonté de réintégrer la production industrielle en France et c’est un bon compromis pour développer des procédés plus éco-compatibles, sans être plus cher.”
Objectif accélération
Disposant d’une technologie éprouvée et d’un marché potentiel d’ampleur, Innoverda a désormais besoin d’accélérer sa croissance. La société, qui s’appuyait jusqu’à présent sur de l’auto-financement, réfléchit donc à ouvrir son capital pour aller plus vite. “Certains appels lancés dans des projets de réindustrialisation en Europe nous sont actuellement inaccessibles“, motive Irène Erdelmeier.
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