Plus petite commune de Seine-Saint-Denis, Coubron devra payer 134 000 euros de pénalité en 2024. Alors que la loi solidarité et renouvellement urbains (SRU) lui impose 25% de logements sociaux, elle n’atteint que 9% environ. Une décision qui suscite la colère du maire.
“On nous parle de décentralisation! On nous parle de collaboration entre l’Etat et les villes! On nous parle de défense de l’environnement! Et en réponse on nous juge sans nous entendre!!!“, s’indigne Ludovic Toro, le maire centriste de Coubron, sur son compte Facebook.
En cause, la décision de l’Etat de rehausser la pénalité que paye la commune pour ne pas construire assez de logements de sociaux. La facture passe de 67 000 euros à 134 000 euros. C’est ce que l’on peut lire dans un courrier adressé par l’édile à ses administrés en date du 29 novembre.
8,81% de logements sociaux
Commune de 4 975 habitants, Coubron compte 2 046 logements en 2020, selon les dernières données de l’Insee. Au 1er janvier 2020, la Drihl (direction régionale et interdépartementale de l’hébergement et du logement) estime à 8,81% le nombre de ses logements sociaux. Un taux bien en dessous de la part des logements sociaux à l’échelle départementale (38,8%), mais surtout de l’objectif de 25% fixé par la loi solidarité et renouvellement urbains (SRU) du 13 décembre 2020. Cela est aussi le cas de huit autres communes considérées comme “carencées” en Seine-Saint-Denis.*
Chaque commune soumise à la loi SRU se voit notifier, tous les trois ans, un objectif “quantitatif” de production de logements sociaux en vue de rattraper son retard. Les communes doivent également atteindre un objectif “qualitatif” de répartition des logements produits : au moins 30% de PLAI (logement très social pour les plus précaires), et pas plus de 30% de PLS (logement intermédiaire) attribués aux locataires dont les revenus sont trop élevés pour pouvoir prétendre aux HLM.
Sur 1 031 communes soumises à la loi SRU en France, 646 communes n’ont pas atteint leur objectif quantitatif triennal en 2022. Pour combler ce retard, la loi 3DS a prolongé l’objectif de 25% de logements sociaux au-delà de 2025. Elle aménage également les objectifs à partir de la période 2022-2025 : les communes doivent désormais combler un tiers de leur retard lors de chaque période triennale. Les sanctions financières des communes carencées sont, par ailleurs, renforcées par l’instauration d’un taux de majoration “plancher” du prélèvement. Celui-ci ne peut être inférieur au rapport différentiel entre le nombre de logements sociaux non réalisés et l’objectif total de logements à atteindre. C’est le préfet qui prend un arrêté de carence, après avis du comité régional de l’habitat et de l’hébergement et de la commission nationale SRU.
“Préserver l’environnement“
“Certaines villes font indéniablement preuve de mauvaise volonté. En trois ans, 222 communes ont réalisé moins de 20% de leur objectif de production HLM. Elles sont deux fois plus nombreuses qu’en 2017-2019“, remarque la Fondation Abbé Pierre dans son “Palmarès SRU 2020-2022“. “Certaines affichent des résultats faméliques. En trois ans, certaines communes n’ont même réalisé aucun logement social” souligne-t-elle, pointant le cas, entre autres, de Coubron, dont l’objectif était de produire 135 logements sociaux.
“Nous avons décidé de préserver l’environnement et nous l’assumons“, justifie dans sa lettre Ludovic Toro. “Nous avons sanctuarisé 70% de la ville de Coubron en terrains agricoles et/ou naturels, désormais inconstructibles à tout jamais !“, détaille-t-il, mettant en avant la contribution de la commune à la diminution de l’empreinte carbone. Une partie du territoire de la commune est aussi classée en zone Natura 2000.
“Etat aveugle“
“Mais tout en haut, il existe des services qui brillent par leur incompétence et leur absence de connaissance des dossiers! (…) vous les faiseurs de sanctions, je vous rappelle que l’État a validé ces zones non constructibles et vous nous condamnez pour cela!“, fustige l’édile.
“Cet État aveugle veut construire et construire sans se soucier de l’environnement, sans se soucier de la capacité des villes à financer la réalisation et le fonctionnement d’équipements publics tels que les écoles, les crèches, la voirie, les infrastructures sportives et culturelles…“, poursuit-il.
Ludovic Toro dénonce “une condamnation financière inacceptable et injuste” face à laquelle, affirme-t-il, “nous ne nous laisserons pas faire.” Il reproche par ailleurs à l’État d’attribuer à la commune “l’une des plus faibles dotations financières du département“… “une inégalité que je ne cesse de dénoncer !“, clame-t-il. Ces dotations atteignent un total de 427 804 euros en 2023, dont une dotation de solidarité rurale de 79 687 euros pour laquelle Coubron est éligible pour la première fois en 2023.
Lire Finances locales : détail des dotations de l’État 2023 en Seine-Saint-Denis, ville par ville
* Neuf villes de Seine-Saint-Denis sont considérés comme “carencées” ou “déficitaires“: Coubron, Gagny, Gournay-sur-Marne, Livry-Gargan, Montfermeil, Neuilly-Plaisance, Les Pavillons-sous-Bois, Le Raincy et Vaujours.
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