Menuisier agenceur depuis 30 ans dans le Val-de-Marne, Dan Hohota alerte sur les dangers des poussières de bois et a conçu une station de travail mobile pour s’en prémunir. Rencontre avec ce médaillé Lépine 2023, qui n’en est pas à son premier défi.
“Pour l’instant, ce n’est pas très médiatisé, mais c’est équivalent au scandale de l’amiante“, prophétise l’artisan. Pour le centre international de recherche sur le cancer (Circ), il ne fait aucun doute que les poussières de bois induisent des pathologies respiratoires et cutanées graves, comme la fibrose pulmonaire ou le cancer du sinus. “Pour vivre de l’artisanat, il faut rapidement travailler. On en néglige souvent la sécurité. Porter un masque huit heures par jour, c’est contraignant. Beaucoup n’allument pas non plus l’aspirateur pour gagner du temps sans penser aux dégâts sur la santé“, poursuit le menuisier agenceur qui a ouvert son premier atelier à Valenton avant de l’installer à Saint-Maur-des-Fossés.
Entre le développement de machines toujours plus puissantes (ponceuses, défonceuses, scies ou affleureuses) et l’afflux de bois agglomérés et mélaminés aux contenus non sourcés, les poussières deviennent pourtant redoutables. Pour Dan Hohota, pas question donc de s’y résoudre sans réagir.
De la Roumanie de Ceaușescu au concours Lépine
Né en Roumanie en 1961, Dan Hohota n’est pas du genre à se résigner, lui qui a traversé le Danube à la nage pour passer en Yougoslavie du temps du rideau de fer, avant de rejoindre l’Autriche, l’Allemagne et la France où il a demandé l’asile il y a quarante ans. À l’époque, il était mécanicien de courses automobiles pour la division compétition du constructeur Dacia qui collaborait déjà avec Renault. “J’ai pu travailler avec des ingénieurs français là-bas, mais comme nous ne pouvions pas quitter le pays, je suis parti“, motive-t-il. En France, le réfugié politique embauche chez Renault Sport où il prépare des voitures de course pour des rallyes. “Il y avait beaucoup de travail mais je ne gagnais pas suffisamment. Alors je me suis mis dans la menuiserie. Un copain à moi avait quelques boutiques à Paris, j’ai donc lancé ma société. Et, aujourd’hui, me voilà au concours Lépine avec ma machine“, relate-t-il, fier de son parcours.
Le menuisier est parti de sa propre expérience. “Les aspirateurs sont très bien, mais il est compliqué de les avoir toujours à portée de main. Les outils sont branchés un peu partout, les câbles électriques se perdent au sol, on risque le court-circuit, diagnostique le professionnel. J’ai donc créé une unité de travail mobile. Ainsi, l’aspirateur suit le mouvement des machines et l’on va plus vite qu’une personne qui ne se protège pas.”
La médaille, un levier pour changer d’échelle
Concrètement, la station se monte et se démonte en cinq minutes et offre une amplitude de 4 mètres. L’artisan a fait breveter son invention au niveau européen et international, mais, jusqu’à maintenant, il a répondu à des commandes individuelles et a fabriqué les produits lui-même à partir de bois, avec une machine-outil à commande numérique. En participant au concours Lépine cette année, Dan Hohota cherche des investisseurs ou un industriel pour passer à la production en série. “Il me faut trouver environ 300 000 euros pour créer les moules de toutes les pièces et proposer le produit dans les magasins spécialisés”, détaille-t-il.
À la clef, un marché “énorme”, estime le menuisier. “Sur le salon, les professionnels ont compris l’intérêt et j’ai reçu une dizaine de commandes à 500 euros“, témoigne-t-il. Le jury du concours Lépine a aussi apprécié l’innovation en lui attribuant pas moins qu’une médaille d’argent. Grâce aux discussions et contacts noués sur le salon, Dan Hohota, souhaite aussi concevoir des modèles plus petits pour amateurs avertis.
N'envoyez que des photos que vous avez prises vous-même, ou libres de tout droit. Les photos sont publiées sous votre responsabilité.