Santé | Val-de-Marne | 16/07/2023
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Été en Val-de-Marne : hospitaliers et médecins de ville unis pour garantir l’accès aux soins

Été en Val-de-Marne : hospitaliers et médecins de ville unis pour garantir l’accès aux soins © CD

C’est dans cette salle de l’hôpital Mondor de Créteil (AP-HP) que sonnent les appels au 15 en Val-de-Marne. Ici, des écoutants proposent un premier aiguillage, des médecins prennent le relais, des ambulances sont commandées, des RDV médicaux proposés… Une mécanique hyper huilée, fruit d’un intense travail de coordination. L’enjeu est vital : garantir l’accès aux soins d’1,4 million d’habitants.

Alors que maladies et accidents ne prennent pas de vacances, assurer l’accès aux soins pendant l’été avec un nombre réduit de soignants est toujours en défi. Ce 28 juin, tout l’état-major de la santé en Val-de-Marne s’est donc réuni pour anticiper. Agence régionale de santé (ARS), Assurance Maladie (CPAM), Conseil de l’ordre des médecins (CDOM), médecins hospitaliers et libéraux impliqués dans le Samu (qui gère le 15), le SAS (Service d’accès au soins), le Sami (réseau d’accueil de garde)… Entre deux consultations, tout le monde est autour de la table, sandwich en main, pour un dernier briefing avant les deux mois d’été.

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Réunion entre les partenaires santé du Val-de-Marne, le 28 juin 2023

Pas de panique à bord. “On est plutôt optimistes pour cet été“, confie Eric Véchard, directeur de la délégation 94 de l’ARS, tout en reconnaissant que le système de santé reste fragile, sur le plan des ressources humaines. “On a fait le tour des services d’urgence du Val-de-Marne pendant quelques jours. Le mois d’août s’annonce plus tendu en termes d’effectif paramédical, mais la situation n’est pas dramatique, et elle est prévisible. Idem pour les transports, du côté de l’Atsu (Association qui gère le transport des services d’urgence), expose Eric Lecarpentier, chef du Samu 94. Pas de tension sur la demande en perspective. Au moins la tendance n’est-elle pas à la hausse dans les appels au 15. Ceux-ci sont en baisse de près de 10% entre le mois de juin 2022 et juin 2023.

Cela n’empêche pas d’anticiper. Car le mot d’ordre du ministère de la Santé, transmis sur toutes les ondes, est clair : “appelez le 15 avant d’aller aux urgences”. Soit, mais il va falloir du répondant.

Montée en puissance de la coordination entre médecine hospitalière et médecine de ville

Du côté du Samu, le service qui répond aux appels du 15 en Val-de-Marne, on est prêt. “On va intégrer six ARM (assistants de régulation médicale) le 20 juillet”, annonce Eric Lecarpentier, qui attend aussi de nouvelles autorisations de recrutement dans les semaines qui viennent.

Lire notre reportage : Une formation pour mieux gérer les appels des 8 Samu d’Ile-de-France

Au total, une cinquantaine d’ARM se relaient pour répondre aux appels du 15 dans une salle du CHU Mondor (photo de une). À leurs côtés, des médecins hospitaliers et libéraux, qui prennent le relais sur le plan médical et peuvent décider d’envoyer le Smur en cas d’urgence vitale. Lorsqu’il n’y a pas d’urgence, il peut désormais être proposé un rendez-vous médical rapide chez un médecin de ville. Dans ce cas, une personne dédiée prend le relais pour trouver un rendez-vous médical. Pour permettre cette gestion fluide, une structure associative, l’ARPSAS 94, financée par l’ARS, travaille en amont à contacter les médecins généralistes pour négocier avec eux des créneaux de soins non programmés et organiser les plannings. Expérimentée depuis le début de l’année, cette logistique, déployée progressivement au niveau national sous le vocable de Système d’accès aux soins (SAS), articule les filières hospitalières et libérales pour désengorger les urgences. Sur 14 000 dossiers de régulation, 80% relèvent, en effet, de la médecine générale. À la tête du SAS Val-de-Marne, un hospitalier, Eric Lecarpentier, et un médecin libéral, Charles Binetruy.

L’enjeu : “éviter le non recours aux soins”, insiste Éric Véchard, chiffrant à 30-40% la proportion de non recours aux soins lors des périodes de tension les plus aiguës.

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L’hélicoptère, stationné au CHU Henri Mondor de Créteil

En Val-de-Marne : une longue tradition de coopération

“Cette philosophie n’est pas nouvelle pour nous mais elle s’est structurée avec le SAS”, pointe Eric Lecarpentier. Pionnier sur ce terrain, le Conseil de l’ordre du Val-de-Marne a créé un Sami, service d’accueil médical initial, dès 2002, pour accueillir les patients le soir à partir de 20 heures et le dimanche, rappelle son secrétaire général, Eric Gibert. Ce Sami, qui repose sur douze permanences tenues par des médecins libéraux dans le département, a accueilli 92 000 passages en 2022, chiffre le docteur Jean-Noël Lépront, son coordinateur. “L’équivalent d’un gros centre d’urgences”, compare le médecin. De fait, sur l’ensemble des services d’urgence du Val-de-Marne, le nombre total de passages sur une année est d’environ 500 0000. “15% de ces 92 000 sont passés par le 15, beaucoup viennent aussi spontanément”, et la moitié relèvent de la pédiatrie. Depuis janvier, le Sami de Champigny s’est même prolongé d’un Cami (Centre d’accueil médical initial), ouvert de 15h30 à 19h30, “pour désengorger le Sami”... Environ 200 patients y sont envoyés chaque mois.

L’échelon local pour répondre aux soins non programmés : les CPTS

Depuis quelques années, la coopération entre professionnels de santé a pris une autre dimension, encore plus locale, encouragée au niveau national dans le cadre des Communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS). Leur périmètre peut aller d’une seule grande ville, comme Champigny-sur-Marne et ses 75 000 habitants, à plusieurs communes. Ces communautés fédèrent non seulement les médecins mais aussi les kinés, infirmiers, établissements médico-sociaux, pharmacies. L’objectif est à la fois de répondre aux besoins de soins immédiats des habitants mais aussi de faire de la prévention et de travailler la dimension santé publique à l’échelle d’un territoire. Pour fonctionner, ces CPTS disposent d’un financement de l’Assurance Maladie de 150 000 à 450 000 euros par an en fonction de la population couverte, ce qui permet de recruter une personne pour coordonner, et de financer quelques investissements. À Champigny, c’est dans le cadre de la CPTS que le Cami a été ouvert. Par ailleurs, la CPTS de Champigny a mis en place une plate-forme téléphonique avec un numéro unique destiné aux Campinois, qui facilite les prises de rendez-vous relativement urgents. “Les médecins qui participent à la CPTS reçoivent un message et s’ils peuvent libérer un créneau, ils le font savoir”, explique Jean-Noël Lépront, coprésident de la CPTS campinoise. Des créneaux grappillés, notamment, sur les rendez-vous non honorés, “qui représentent 15% en moyenne”, chiffre le médecin.

À ce jour, 62% de la population du Val-de-Marne est couverte par une CPTS, indique Sandrine Roque directrice de l’accompagnement et de l’offre de soins de l’Assurance Maladie du Val-de-Marne (CPAM 94). La dernière en date, Octav, a été signée dans le sud Val-de-Marne fin juin.

Lire aussi : Santé en Val-de-Marne : comment les CPTS s’attaquent à la pénurie de médecins et bien au-delà

Articuler les échelons

“Nous faisons le pari de ce mode d’exercice coordonné entre les médecins porté par les CPTS”, insiste Sandrine Roque. Une approche de proximité, réactive et complémentaire du SAS, lequel s’appuie aussi sur les créneaux de soins non programmés des médecins en les incitant financièrement par une majoration de la consultation de 15 euros, poursuit la représentante de la CPAM, défendant une “réponse plurielle”.

Des cellules régionales pour la psychiatrie et de la maternité

À moyen terme, les partenaires santé du Val-de-Marne souhaitent également créer un SAS psychiatrie. En attendant, l’ARS Ile-de-France a mis en place une cellule régionale psy. De même, la cellule régionale de transferts à terme et post accouchement (TATEPA) dont le rôle est de faciliter l’orientation des femmes sur le point d’accoucher (ou qui viennent d’accoucher) a été réactivée, tout comme la cellule d’aide à la recherche de lits en néonatologie (CRAN). La cellule d’appui à l’inscription en maternité (AIMA) qui vise à ne pas laisser de femmes sans suivi de grossesse ou sans inscription en maternité, a pour sa part été pérennisée, indique l’ARS dans un communiqué.

Fluidifier le parcours des personnes très âgées

Pour éviter aux personnes très âgées un éprouvant passage aux urgences, les soignants tentent également d’organiser une orientation directe dans des services hospitaliers, particulièrement en gériatrie. Cela passe notamment par un numéro d’accès direct pour les admissions à destination des médecins coordonnateurs d’EHPAD et des médecins de ville, et une astreinte téléphonique pour obtenir l’avis d’un gériatre. À l’inverse, des accords ont aussi été passés début mai, avec quatre Ehpad du département, pour y transférer des patients de services hospitaliers afin de libérer des lits. “40 personnes ont déjà été transférées dans ce cadre”, détaille Eric Véchard.

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