Formation | Ile-de-France | 03/04/2023
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La Cour des comptes presse l’Université de Créteil de mutualiser sa gestion et interroge sa réforme de l’accès aux études de médecine

La Cour des comptes presse l’Université de Créteil de mutualiser sa gestion et interroge sa réforme de l’accès aux études de médecine

Refus de la fusion avec l’Université de Marne la Vallée, gestion en silo des formations, bilan de la réforme des études de médecine, projets immobiliers… la Chambre régionale des comptes (CRC) a passé l’Université de Créteil (Upec) au tamis. Elle l’invite à rationaliser sa gestion. Le président de l’Upec, Jean-Luc Dubois Randé, défend sa stratégie et interpelle l’Etat sur ses “injonctions contradictoires”.

Pour la Chambre régionale des comptes (CRC), l’arrêt de la fusion entre Créteil et Marne-la-Vallée est un “échec”. Pour les administrateurs de l’université cristolienne, c’était un choix qui s’est affirmé lors de l’élection surprise d’un nouveau président, Olivier Montagne, en 2016.

Un changement de cap qui a donné lieu à une crise de gouvernance, rappelle la CRC. Pour rappel, en effet, le nouveau président avait démissionné pour raisons de santé en 2017, ouvrant une bataille de succession entre les tenants de stratégies différentes pour l’avenir de l’Upec. Une première élection n’avait pas permis d’élire un président (car le système de vote entre administrateurs universitaires exige une majorité très qualifiée), donnant lieu à de nouvelles élections générales, avant que ne soit élu l’ancien doyen de la fac de médecine, Jean-Luc Dubois-Randé. Pendant ce temps de flottement, l’Upec a loupé certains appels à projets d’investissement d’avenir (PIA), un mode de financement devenu stratégique pour les universités pour compléter, en mode projet, les dotations de l’État. À l’époque, ces appels à projets encourageaient fortement les fusions d’universités. Depuis, l’Upec a remporté un PIA avec son projet Erasme, basé sur sa nouvelle feuille de route, avec 21 millions d’euros à la clef. À noter, dans le même temps, une augmentation des effectifs, passés de 32 000 à 40 000 avec l’arrivée à la fac des baby-boomers de 2000.

Concrètement, cette feuille de route “d’université engagée” tente de concilier un ancrage local fort avec des positionnements pointus en recherche sur certaines filières en développant des partenariats avec d’autres universités ou écoles, en fonction des disciplines. Elle a par ailleurs développé une filière d’apprentissage avec un CFA (Centre de formation des apprentis) en propre et créé un vrai Sciences Po à Fontainebleau. C’est dans ce contexte que le président a été réélu en septembre 2022.

Mutualiser et piloter la gestion des facs

Pour la CRC, cette stratégie “doit s’appuyer sur un pilotage central renforcé, conjugué à une réduction des effectifs consacrés aux fonctions support”. La Chambre invite donc à mutualiser et moins travailler en silo d’une fac à l’autre. Elle s’interroge aussi sur le nombre d’enseignements proposés, qui peinent parfois à faire le plein. “14,2 % des enseignements comptent moins de dix étudiants inscrits en 2021-2022”, pointe la CRC qui regrette également “l’émiettement des unités de recherche, de tailles disparates”, invitant, là encore, à un meilleur “pilotage”.

La mise en œuvre de la réforme de médecine encore en rodage

Durant cette période, l’Upec a aussi dû mettre en œuvre la réforme des études de médecine, dont le drastique numerus clausus en fin de première année, instauré en 1971 et renforcé en 1977, a contribué à l’actuelle pénurie de médecins et aux départs à l’étranger pour se former. En termes de capacité de formation, l’Upec est ainsi passée d’un nombre de places en 2ème année de 175 à 280, soit une augmentation de 40%. Chaque université ayant une certaine marge de manœuvre pour appliquer cette réforme, l’Upec a pour sa part décidé de ne créer que des licences accès santé (LAS) pour faciliter les réorientations avec des passerelles en cas d’échec. Autre spécificité, elle a créé une LAS spécifiquement santé et 15 LAS disciplinaires, associant santé et une autre thématique. Objectif : diversifier les profils. Concrètement, “76 % des étudiants souhaitant intégrer la filière médecine se trouvent au sein de la LAS spécifiquement santé contre 24 % en LAS disciplinaire”, situe la CRC. Or, s’inquiète la Chambre, le taux de réussite en médecine est plus important dans les LAS disciplinaires (51,8% en 1ère année, 29% en 2ème) que dans la LAS santé (21,8% en 1ère année, 21,9% en 2ème). “Cette situation doit conduire l’Upec à s’interroger sur les dispositifs d’accompagnement mis en place pour ces étudiants, et (…) sur la cohérence entre de la capacité d’accueil en LAS « santé » sur Parcoursup au regard du nombre de places en médecine”, invite la Chambre.

“Echec” de la fusion : un “raccourci d’interprétation”

Dans sa réponse à l’analyse de la CRC, le président de l’université revient sur la question de la non-fusion avec Marne-la-Vallée, estimant que la Chambre fait un “raccourci d’interprétation”, en “supposant que la fusion aurait été un succès”, rappelant que, malgré le projet de fusion, “le jury n’avait pas répondu favorablement” à premier appel à projets d’investissement d’avenir (Isite en vague 1) et que, “c’est bien cet échec qui a créé un vrai scepticisme au sein de l’Upec, en plus de grandes réserves sur une approche plus « technostructure » que celle d’un projet scientifique commun.” Et de rappeler que l’Upec avait ensuite été exclue de la gouvernance le la Communauté des universités de l’Est parisien, bien qu’étant le plus gros établissement.

Concernant l’ancrage territorial, que la CRC estime insuffisamment développé dans l’Est parisien, le président indique que des investissements ont été effectués ces dernières années pour poursuivre l’ancrage local, notamment dans le cadre de partenariats.

Sur le plan immobilier, le président de l’Upec défend le projet de construction d’un bâtiment sur l’îlot Jacquart à Créteil. “Ce nouveau bâtiment permettrait de mettre fin au contrat de location de locaux onéreux, vétustes et inadaptés (7 000 m²) dans le bâtiment « Pyramide » à Créteil l’Échat occupés par l’UFR de Sciences de l’éducation, sciences sociales et STAPS, dont le loyer acquitté à un bailleur privé (2 M€ par an environ)”.

Plus d’élèves mais pas de financement à la hauteur

À propos du financement universitaire, Jean-Luc Dubois-Randé, estime qu’il y a des “injonctions contradictoires” à “augmenter les capacités d’accueil en licence tout en ne bénéficiant pas de financements à due concurrence.” Pour le patron de l’université, “le développement des ressources propres ne répondra que partiellement aux objectifs d’équilibre budgétaire, a fortiori dans une université multi-sites, dont la dispersion territoriale génère des coûts de gestion importants.” Il y a donc “une nécessité impérieuse de revoir à la hausse la subvention pour charges de service public (SCSP)”, insiste le président.

Voir le rapport de la Chambre régionale des comptes

Voir la réponse du président de l’Upec

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