Annoncé lundi par les maires PS des deux communes à leur majorité municipale, le projet de fusion de Saint-Denis et de Pierrefitte-sur-Seine a pris tout le monde de cours. L’opération vise à créer une ville de 140 000 habitants, la plus grande d’Ile-de-France, d’ici au premier janvier 2025.
Annoncé lundi par les deux édiles, ce projet de fusion ferait de Pierrefitte-sur-seine une commune déléguée de la nouvelle. Inattendu, le cas n’est certes pas rare en France, entre le 2 janvier 2022 et le 1er janvier 2023, 18 communes ont ainsi été regroupées en huit communes nouvelles, selon l’Insee. Mais il concerne généralement des communes plus petites.
Vers une fusion avant le 1er janvier 2025
Dans une lettre aux agents de Saint-Denis qu’il devait rencontrer ce mercredi après-midi, Mathieu Hanotin explique la nécessité “de revoir l’échelle de notre action publique locale” pour poursuivre “l’action volontariste” entreprise depuis son élection en juillet 2020, en raison du “contexte incertain” et de “contraintes budgétaires toujours plus fortes”.
L’édile détaille le calendrier : adoption d’un vœu en conseil municipal en avril “pour lancer la démarche administrative de création et de travail sur les politiques publiques et les organisations pour une création de la nouvelle commune avant la fin de l’année 2024 et une entrée en vigueur au 1er janvier 2025.” Tous les agents y seront alors rattachés. Mathieu Hanotin précise, enfin, que la loi prévoit 2 à 12 ans pour faire converger les impôts locaux.
Pierrefitte va-t-il devenir une “annexe” de Saint-Denis ?
En attendant la formalisation du projet lors d’un conseil municipal extraordinaire prévu le 20 avril dans les deux communes, les élus d’opposition, prévenus mardi, font part de leur surprise. “Le maire nous a expliqué que la ville stagne et que la cour des comptes fait toujours le même bilan : celui d’une ville pauvre qui ne peut réaliser les investissements souhaités. Pour que la situation change, il faut donc, selon lui, révolutionner les choses avec la fusion“, explique Romain Potel, élu d’opposition (SE) à Pierrefitte-sur-Seine. “Mais il y a une contradiction entre l’urgence que semble mettre en avant le maire et la satisfaction de la majorité lors du vote du budget“, pointe Romain Potel, pour qui l’organisation d’un référendum local est “incontournable“.
Lors du vote du budget de Pierrefitte-sur-Seine le 23 mars dernier, certes avec une augmentation d’impôt pour la première fois depuis 2007, pour boucler les dépenses d’énergie, la question n’avait nullement été évoquée. “Il va falloir réfléchir à des solutions dans des villes comme les nôtres, pour que ce type de situation ne perdure pas“, avait simplement pointé le maire, Michel Fourcade.
De son côté, Farid Aid, élu d’opposition PCF, insiste sur l’identité de Pierrefitte-sur-Seine, à laquelle “les habitants sont attachés.” Et de craindre que Pierrefitte ne devienne une “annexe” de Saint-Denis. L’élu, qui a fait une déclaration sur sa page Facebook, y partage sa colère, concluant par un “Pierrefitte n’est pas à vendre”.
Une décision en “catimini”, non présentée lors des municipales
Même étonnement à Saint-Denis. “On a l’impression que c’est fait en catimini. Ce projet n’a jamais été présenté, ni lors de la campagne des élections municipales, ni lors de ces trois dernières années. Il est donc évident qu’il faudra organiser un referendum“, pointe Sofia Boutrih, conseillère municipale PCF d’opposition à Saint-Denis, qui remet en cause l’urgence de l’opération.
Sur le fond, elle critique l’argument avancé pour motiver le projet. “On fait valoir la situation financière très dégradée dans laquelle se trouve Pierrefitte et les avantages pour les deux villes. Certes, une telle fusion-association, comme elle est présentée, obtiendrait davantage de dotations de l’Etat pour éponger la dette de Pierrefitte, mais quel sera le coût de cette mutualisation ? Comment seront poursuivies les politiques actuelles comme la cantine gratuite ?“, interroge-t-elle.
L’élue questionne aussi le sens de cette fusion, au sein de la métropole parisienne. “Quel est l’intérêt d’une fusion-association, telle qu’elle est présentée, quand on a un outil de solidarité aussi fort que Plaine Commune [l’établissement public territorial auquel appartiennent Saint-Denis et Pierrefitte-sur-Seine]? D’autres villes du territoire connaissent aussi des difficultés financières : va-t-on les fusionner pour autant ?” D’autres questions restent aussi en suspens, souligne l’élue, comme le statut des agents d’une ville, élus dans l’autre commune.
Plus virulent, Bally Bagayoko, chef de file de la France insoumise à Saint-Denis, dénonce de son côté, “un déni de démocratie, un crachat au visage des électeurs” et une opération “purement électoraliste“, tout en appelant les habitants à s’opposer à ce projet.
Pétition contre la fusion
En attendant les conseils municipaux du 20 avril, un collectif Stop fusion Pierrefitte- Saint-Denis a lancé une pétition sur Change.org, qui a obtenu pour l’instant quelques centaines de signatures.
(Les réponses des maires des deux villes complèteront cet article dès qu’ils auront donné suite à nos sollicitations)
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