Justice | | 13/04/2023
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Les Hôpitaux de Saint-Maurice condamnés à 345 000 € d’indemnisation suite à la pendaison d’une patiente dans sa chambre

Les Hôpitaux de Saint-Maurice condamnés à 345 000 € d’indemnisation suite à la pendaison d’une patiente dans sa chambre

Le tribunal administratif de Melun a condamné les Hôpitaux de Saint-Maurice à verser 345 000 € de dédommagements à la famille d’une quinquagénaire qui s’était suicidée dans sa chambre d’hôpital en avril 2018. 

Le 26 avril 2018, cette mère de deux filles âgées de 18 et 21 ans avait fait l’objet d’une “mesure d’hospitalisation sous contrainte” en soins psychiatriques après une première tentative de suicide “par ingestion médicamenteuse”. À son arrivée, cette femme de 54 ans présentait “un risque suicidaire” ainsi qu’une “absence de critique de son passage à l’acte”, retrace le tribunal administratif de Melun dans un jugement en date du 28 mars 2023 qui vient d’être rendu public. L’équipe soignante avait d’ailleurs indiqué dans le dossier “la conduite à tenir”, à savoir le “retrait des objets dangereux” et la “surveillance des constantes et du comportement” de la mère de famille précisément en raison de son “risque suicidaire”.

Pas assez de précautions face à un état alarmant

Le médecin chargé de l’examiner avait à son tour, le lendemain, mentionné dans son dossier médical la nécessité d’assurer “une surveillance du comportement” pour les mêmes raisons, et avait “prescrit le retrait de tout objet dangereux”.  Le matin-même de son décès, la patiente avait également “évoqué des angoisses” auprès du psychiatre de garde, qui avait relevé “un vécu délirant persécuté interprétatif” et qu’elle “verbalisait de façon persistante des idées suicidaires”.

Pendaison avec le fil d’un chargeur de téléphone

La quinquagénaire s’était finalement donné la mort non pas avec des médicaments cette fois-ci, mais en se pendant à l’aide d’un chargeur téléphonique de téléphone portable qu’elle avait trouvé dans la chambre d’une autre patiente. Son décès avait été constaté après “une heure” de tentative vaine de la réanimer, relate le tribunal administratif de Melun.

La patiente se trouvait seule dans sa chambre, la personne hospitalisée dans la même chambre étant absente pour la fin de la semaine, alors qu’il avait été décidé une hospitalisation en chambre double afin de minimiser le risque de suicide, relèvent les juges. En outre, elle n’a pas été revue par le psychiatre de garde le 28 avril, et son traitement n’a pas été adapté alors qu’il n’est pas contesté que son état de santé s’était aggravé au cours de la journée, estiment les juges.

“S’il est constant que le câble (…) n’était pas le sien, son chargeur (…) ayant été consigné (…), elle a pu récupérer un câble dans une autre chambre dès lors qu’elle avait le droit de déambuler dans le service et que d’autres patients pouvaient conserver ce type d’objet”, explique encore le tribunal administratif de Melun.

Un expert mandaté dans ce dossier avait d’ailleurs estimé que l’état de santé de cette patiente “impliquait une surveillance renforcée” pour prévenir tout “risque suicidaire”. “Ce risque a pu être accru par l’annonce (…) de la poursuite de son hospitalisation à laquelle elle ne consentait pas”, relèvent les juges administratifs.

“Faute dans l’organisation et le fonctionnement du service”

Son compagnon, venu lui rendre visite dans l’après-midi, avait d’ailleurs “fait part de ses inquiétudes à l’équipe médicale”, poursuivent les magistrats. “L’insuffisante surveillance de la patiente (…) est constitutive d’une faute dans l’organisation et le fonctionnement du service de nature à engager la responsabilité des Hôpitaux de Saint-Maurice”, en déduisent-ils.

Sans contester le principe de sa “responsabilité pour faute”, l’établissement de santé mentale estimait pour sa part qu’une “perte de chance de 30 %” devait être retenue “compte tenu de l’état de santé” de la patiente, et proposait d’accorder une somme globale de 145 000 € à son compagnon et ses deux filles.

Mais “le suicide n’aurait pas eu lieu (…) si une surveillance renforcée, appropriée à son état de santé, avait été assurée” a balayé le tribunal administratif de Melun dans son jugement.

Les Hôpitaux de Saint-Maurice ont donc été condamnés à indemniser le “préjudice économique” et “le préjudice d’affection” du compagnon de la défunte et de ses deux filles, ainsi que les frais d’obsèques, pour un total de 345 000 €. L’établissement devra également prendre à sa charge les 3 300 € de frais expertise et 3 000 € pour les frais de justice de la famille. Il a jusqu’au 28 mai 2023 pour faire appel de ce jugement devant la cour administrative d’appel de Paris.

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