Economie | Ile-de-France | 29/07/2023
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L’été en Ile-de-France, une période creuse pour les livreurs des plateformes de restauration

L’été en Ile-de-France, une période creuse pour les livreurs des plateformes de restauration

À Saint-Ouen, devant une des dark kitchen de Deliveroo, les livreurs attendent les commandes, plus rares en cette période de congés d’été. Un accord pour une rémunération fixe horaire des livreurs a été passé en avril dernier, mais sa mise en application se fait attendre.

En cette fin de juillet, dans la rue Palouzié de Saint-Ouen, les allers-retours des sacs isothermes siglés Picard ou Deliveroo ont ralenti leur cadence. C’est dans cette rue calme du centre-ville que se trouve une des trois dark kitchen du géant de la livraison Deliveroo. Le Petit Cambodge, les pizzas Tripletta, les spécialités indonésiennes de Santosha… À l’intérieur, huit cuisines de chaînes de restaurants courus se partagent les locaux pour y préparer des plats exclusivement destinés à la livraison à domicile.

“Avant, je me faisais environ 80€ par jour. Maintenant, je me fais autour de 40€”

Casque de scooter sur la tête et sandales en plastique aux pieds, Ibrahim explique avoir vu son salaire baisser de moitié depuis le début des vacances scolaires. “Avant, je me faisais environ 80€ par jour. Maintenant, je me fais autour de 40€”, explique le vingtenaire, originaire de Côte d’Ivoire. Pour Jilub, venu du Bangladesh, c’est à peine mieux : en temps normal, pour huit à neuf heures de travail, il rapporte environ cent euros. Mais en ce moment, douze heures de livraisons ne lui rapportent qu’à peine cinquante ou soixante euros.

Une rémunération horaire qui se fait attendre

Une baisse de revenus qui s’ajoute à des coûts qui, eux, restent les mêmes. “Chaque jour, on paye entre 8 et 9€ d’essence, et on dépense minimum 10€ pour le déjeuner et le dîner. Donc il faut retirer environ 20€ sur l’argent qu’on se fait”, expliquent Bakari et Locce en anglais. Abbas, lui, observe que les conditions de rémunération se sont dégradées depuis qu’il a commencé en tant que livreur, il y a deux ans : “Il y a beaucoup plus de livreurs qu’avant. À Paris ou en banlieue, ils sont partout maintenant ! Donc il n’y a plus autant de bonus. Par exemple, auparavant, les livraisons étaient un peu mieux payées quand il pleuvait, ou quand on travaillait après minuit. Mais ils ont tout supprimé.”

En avril, un accord a pourtant été signé entre la Fédération Nationale des Auto-Entrepreneurs (FNAE), premier syndicat parmi les livreurs, et les plateformes de livraison. Il prévoit l’introduction d’une rémunération horaire de 11,75€ (calculée sur la base du temps de livraison et non du temps de connexion des livreurs, comme le dénoncent plusieurs syndicats ayant refusé de le ratifier) mais celle-ci n’est toujours pas entrée en application. Devant la dark kitchen, aucun des livreurs interrogés n’en a entendu parler.

Changer de job ?

Face à cette impasse, certains livreurs mettent le casque au placard pour l’été et changent de job. “Beaucoup vont faire de l’intérim pendant deux ou trois mois”, affirme Ibrahim. Lui a préféré continuer : “parce que je suis habitué !” sourit-il. Le grand gaillard pense parfois lui aussi à changer de travail, pour devenir préparateur de commande, “mais j’arrêterai après l’hiver, parce que l’hiver, on travaille beaucoup. Les gens restent chez eux.”

Pour beaucoup d’autres, la livraison reste la seule option. Nassim, 28 ans, est arrivé du Bangladesh il y a trois mois à peine. “Je ne parle pas français, et je n’ai pas de permis de séjour. Je ne peux pas trouver d’autre travail”, s’excuse-t-il presque, avant d’enfourcher son scooter.

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