Justice | Val-de-Marne | 25/01/2023
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L’ex-président du Val-de-Marne demande la relaxe, le parquet requiert prison avec sursis

L’ex-président du Val-de-Marne demande la relaxe, le parquet requiert prison avec sursis © CD

L’ancien président du Val-de-Marne et son directeur de cabinet ont plaidé la relaxe ce mercredi au tribunal correctionnel de Paris. La vieille, les procureurs financiers ont requis des peines de prison avec sursis ainsi qu’une peine d’inéligibilité pour l’ancien président et sénateur communiste. Après le 94, la justice s’intéresse aux collaborateurs d’élus d’autres collectivités.

Les débats se sont clos mercredi soir par les réquisitions. Les deux procureurs financiers ont demandé 8 mois de prison avec sursis et 10 000 euros d’amende pour Christian Favier et son directeur de cabinet, ainsi qu’une peine d’inéligibilité de deux ans pour l’ancien président du conseil départemental et sénateur communiste. Pour le parquet national financier, une trentaine d’emplois administratifs de collaborateurs d’élus réunis au sein du service de la questure entre 2011 et 2017 étaient en réalité des emplois de cabinet. Les juges se sont appuyés sur l’enquête des gendarmes de la section de recherche pour affirmer que les prévenus avaient détourné ces postes de fonctionnaires au profit du cabinet, dont le nombre d’emplois est fixé à 10 collaborateurs.

Lire : Assistants d’élus du Val-de-Marne : Christian Favier défend des emplois de support

Le seul débat sérieux a porté sur la nature du travail de ces collaborateurs d’élus et qu’il n’en découle aucun préjudice pour la collectivité

Au regard de la peine maximale encourue pour le détournement de fonds publics fixée à 10 ans de prison et un million d’amende, les deux prévenus ont été relativement épargnés par le parquet national financier qui a rappelé plusieurs fois durant l’audience qu’il n’y avait ni emploi fictif, ni enrichissement personnel, seulement un détournement d’emploi. Pourtant, Christian Favier et Frédéric Houx, ainsi que leurs avocats, ont manifesté leur choc ce mercredi lors des plaidoiries. “Je m’interroge sur les raisons réelles de ma poursuite devant un tribunal correctionnel alors que le seul débat sérieux a porté sur la nature du travail de ces collaborateurs d’élus et qu’il n’en découle aucun préjudice pour la collectivité. Bien au contraire, leur travail a grandement facilité le travail de notre institution. J’ajoute, qu’à aucun moment, l’opposition départementale n’a émis la moindre remarque sur ce point pendant mes vingt années de présidence. Comment dans ces conditions, dois-je accepter d’être sanctionné, alors que j’ai mis en œuvre sans délai et avant que la procédure judiciaire ne soit engagée, la recommandation de la chambre régionale des comptes en supprimant la questure. Je suis donc profondément blessé de voir ainsi entaché mon honneur, à l’issue d’un engagement de 44 ans au service des concitoyens. 44 ans sans qu’une seule fois, ma probité n’ait été mise en cause. Au regard de ces éléments je vous demande ma relaxe“, s’est exprimé l’ex-président.

Frédéric Houx, l’ex-directeur de cabinet, a également partagé sa stupéfaction. “J’ai travaillé 30 ans au département et j’ai cherché en permanence à respecter la loi, à faire en sorte que prévale l’intérêt général, que les décisions prises par l’exécutif soient les mieux mises en œuvre possible. Je n’ai jamais eu le sentiment d’enfreindre la loi. Je suis blessé d’entendre des choses pareilles. Je considère n’avoir jamais franchi la ligne jaune et vous demande de me relaxer“.

La vie n’est pas cloisonnée

Durant les deux premiers jours d’audience, les procureurs financiers et les juges de la 32e chambre du tribunal correctionnel ont confronté Christian Favier et Frédéric Houx aux conditions d’embauche de la trentaine de collaborateurs d’élus, à leurs missions et à leurs liens hiérarchiques. Contrairement aux collaborateurs de cabinet qui sont librement choisis par le président du conseil départemental pour l’épauler dans ses décisions politiques pour la durée de son mandat, les collaborateurs d’élus sont des fonctionnaires employés à des fonctions support. Dans les faits, les agents administratifs participent à la prise de décision politique puisqu’ils nourrissent la réflexion des élus de grâce à leur expertise. Pour les avocats de Christian Favier, les collaborateurs d’élu du conseil départemental du Val-de-Marne étaient des agents administratifs comme n’importe quels autrse et se distinguaient ainsi des collaborateurs de cabinet. “Parce qu’il s’agissait de démontrer que ces emplois de la questure étaient des emplois de cabinet, les gendarmes se sont échinés, épuisés à comparer ces deux missions. Mais, il faut bien comprendre que cette mission est impossible parce que l’article 5 de la loi de 1987 précise que les missions du collaborateur de cabinet sont libres. Comment voulez-vous comparer quelques chose avec un référentiel qui n’existe pas? Il faut faire l’inverse, comparer les missions et fonctions des agents de la questure avec celles d’un agent administratif“, a expliqué Matthieu Hénon, leur avocat. “Si l’on saisit 4 ans de vos mails, est-ce que dedans, vous êtes sûr qu’il n’y a pas un peu de privé, parler de politique, souhaiter un bon anniversaire à un élu. On ne peut pas en déduire que vous êtes un membre du cabinet. C’est ce qu’ont fait les gendarmes. Ils ont picoré. La vie n’est pas cloisonnée. (…) J’attire l’attention du tribunal parce que l’on a un bruit de fond dans ce procès, celui du – tous pourris – il prépare l’arrivée des extrêmes. A force, de tordre le droit pour trouver les moyens de poursuivre deux honnêtes hommes, des règles du code pénal, des élus, vous ne rendez pas service à la République. Je veux que vous soyez intolérants pour ceux qui volent l’argent public, pour ceux qui se servent mais les honnêtes gens, ceux qui respectent la loi, on ne peut pas les déferrer devant ce tribunal”, a ajouté Didier Seban.

La Cour des comptes s’intéresse à d’autres collectivités

Depuis 2018 et l’ouverture de l’enquête préliminaire pour détournement de fonds publics au sujet des collaborateurs d’élus en Val-de-Marne, la Cour des Comptes s’intéresse à d’autres collectivités. Le conseil régional d’Île-de-France et d’Auvergne-Rhône-Alpes sont notamment dans le collimateur de la justice et scrutent avec attention l’issue de ce premier procès pénal. L’avocat Didier Seban en a fait usage dans sa plaidoirie. “Dans le cadre de ses missions de contrôle, la Cour des Comptes s’intéresse désormais à ces emplois. Elle a mené des contrôles sur tout un tas de collectivités. Et on lit dans la presse que le parquet poursuivrait ses investigations sur les régions Île-de-France et Auvergne-Rhône-Alpes. On comprend l’intérêt du parquet, une ancienne candidate à la présidence de la République et un futur candidat. Ça vaut le coup de venir appuyer sur le Val-de-Marne pour essayer de créer une jurisprudence !”.

Le jugement a été mis en délibéré jusqu’au 23 mars.

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