Le 11 janvier 2022, Theo, 28 ans, était retrouvé mort dans sa cellule de la prison de Fresnes où il demeurait en détention provisoire. Le paquet de Paris a ouvert une information judiciaire lundi pour homicide involontaire aggravé et non-assistance à personne en danger.
Le ministère public a précisé avoir transmis les investigations au magistrat instructeur, alors qu’elles étaient jusque-là conduites sous la forme d’une enquête préliminaire confiée au 3e district de police judiciaire (3e DPJ) qui avait déjà mené des “auditions et vérifications complémentaires”.
“La famille, avisée, aura la possibilité de se constituer partie civile”, a précisé le parquet.
Cette saisine est “un acte rare et une étape importante, dont on espère qu’elle permettra d’établir toutes les responsabilités à l’origine de ce drame”, ont réagi auprès de l’AFP Antoine Ory et Sidra Salim, les avocats de la famille de Theo Sanha.
Écroué le 2 décembre 2021, le jeune homme devait être jugé le 11 janvier 2022, le jour de sa mort, pour non-respect de Micas, un dispositif administratif assorti de mesures comparables à celles d’un contrôle judiciaire, et visant à prévenir des actes de terrorisme.
Des surveillants démunis face au profil psychiatrique du détenu
Son décès est survenu “dans un contexte de syndrome asphyxique aspécifique”, selon l’autopsie dont l’AFP a eu connaissance. D’après un rapport de l’Inspection générale de la justice (IGJ), rendu en mai 2022 et dont l’AFP a eu connaissance, Theo Sanha aurait nécessité une “réaction individuelle ou collective de prise en charge adaptée” et non une “gestion déshumanisée, ostensiblement distanciée et inadaptée”: Theo n’avait en face de lui “que des personnels en tenue d’intervention, camouflés derrière un bouclier”.
“Impressionnant physiquement”, il vivait “dénudé”, “urinant et déféquant sur ses effets personnels” et pouvait manger à même le sol ou parfois sous son lit, “vociférant ou produisant des bruits notamment d’animaux”.
Lors d’entretiens durant la mission, les agents se sont dit “démunis”, “perdus” ou “déroutés”, face à ce comportement, le décrivant comme “possédé”.
À la suite de ce rapport, un signalement a été émis et des investigations lancées, initialement à Créteil avant d’être dépaysées à Paris.
La famille de Theo Sanha avait en parallèle porté plainte contre X en novembre 2022, dénonçant “une série de dysfonctionnements directement imputables à la maison d’arrêt de Fresnes” au vu de la situation du jeune homme.
Avec six mentions sur son casier judiciaire notamment pour vols, recel et escroquerie, Theo Sanha suivait un traitement médical pour des problèmes cardiaques et était suivi par le psychiatre de la prison.
En 41 jours de détention, il a fait l’objet de 25 consultations médicales, dont cinq psychiatriques.
La plainte fustige un manque de rigueur des surveillants, l’un d’entre eux étant passé devant sa cellule “sans procéder à la vérification réglementaire” tôt le matin même de sa mort, “à un moment où il était peut-être encore en vie”.
Le parquet précise que “le rapport d’autopsie a exclu toute violence ou trace d’intervention d’un tiers”.
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