Culture | | 01/12/2023
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Polémique sur la fresque effacée à Champigny-sur-Marne : pas d’accord sur le préjudice moral

Polémique sur la fresque effacée à Champigny-sur-Marne : pas d’accord sur le préjudice moral © Chloe Wary

L’affaire de la fresque de la bédéiste Chloé Wary, commandée puis effacée intégralement, n’a pas encore trouvé d’issue à l’amiable à Champigny-sur-Marne. Deux visions s’affrontent concernant le droit de l’autrice sur son travail.

Pour rappel des faits, la bédéiste Chloé Wary, qui raconte la vie des cités de banlieue avec vitalité et couleurs, avait réalisé une fresque de 23 mètres le long mur du parking Carnot, sur commande de la ville de Champigny-sur-Marne. Mais, l’œuvre, réalisée avec l’aide des habitants du quartier, notamment des jeunes du club de foot, a été effacée quelques jours après son inauguration, sans prévenir l’autrice. En cause : l’inscription “justice pour Nahel” sur un détail de la fresque. Un gros coup de blanco dont s’est émue l’artiste, prix du public au festival d’Angoulême de 2020.

Lire : La bédéiste Chloé Wary regrette l’effacement de sa fresque à Champigny-sur-Marne

Le 2 novembre, l’artiste et les représentants de la ville se sont rencontrés pour s’expliquer.

À cette occasion, la municipalité a motivé que la mention “justice pour Nahel” était de nature à troubler l’ordre public et qu’elle avait demandé l’effacement de cette phrase, mais uniquement de cette phrase. Selon la ville, la consigne a toutefois été mal comprise par le prestataire qui a tout passé à la peinture blanche, et est même revenu le lendemain pour effacer la signature, située sur le mur voisin.

Lors de cette réunion, les deux parties sont tombées d’accord pour que la fresque soit restaurée par l’artiste dans le cadre d’une nouvelle commande.

© Chloe Wary

Droit moral contre droit de propriété

Pour la bédéiste, toutefois, le préjudice moral lié à la suppression de son œuvre demeure, et doit être dédommagé en tant que tel, au titre du droit moral de l’autrice, indépendamment de la nouvelle commande de fresque. (Voir à ce sujet une jurisprudence sur une affaire qui s’est déroulée à Vitry-sur-Seine)

Une vision que ne partage pas la ville. “Il n’y a pas de préjudice moral envers Chloé Wary puisque nous la rémunérons pour refaire la fresque”, estime Laurent Jeanne, maire de la ville, rappelant que beaucoup de “street-artistes cherchent à être rémunérés pour leur travail.”

Carte blanche, ou pas ?

L’édile argue par ailleurs que l’artiste n’a pas respecté le contrat en ajoutant une mention politique, “Justice pour Nahel”, “de nature à troubler l’ordre public”, et “sans rapport avec la commande”.

“Il ne s’agissait pas d’une carte blanche, mais d’une commande de fresque sur le football féminin, en lien avec le thème de son album”, poursuit l’édile. “Nous avons l’habitude de travailler de cette manière. C’est ce que nous avons fait à la Maison pour tous en commandant une fresque sur le thème de Joséphine Baker (qui a donné son nom à l’équipement). La première esquisse qui nous avait été proposée était un peu triste et nous avons demandé à l’artiste une nouvelle proposition sur laquelle nous nous sommes accordés”, témoigne encore l’élu, estimant que, au final, “cette histoire a fait de la publicité” à son autrice.

Un cahier des charges que conteste Chloé Wary, qui écrit, dans son propre compte-rendu de réunion, avoir été “contactée par la médiathèque pour une carte blanche” et qu’il “n’a jamais été question de mettre le sport féminin en avant, même s’il s’agit d’une des thématiques fortes de son travail.”

Concernant la mention “Justice pour Nahel”, l’artiste pointe que celle-ci faisait 50 cm2 sur une fresque de 23 m x 1,80 m. Il s’agissait donc d’un détail, qui ne justifiait pas l’effacement intégral, et qu’elle aurait pu elle-même retravailler, après concertation avec la ville. “Rien n’est à la hauteur du préjudice, et le manque de considération n’est, hélas, plus à démontrer. Pourtant, il s’agit bien d’une censure, aussi involontaire et accidentelle soit-elle. Il y a urgence à activer les choses. Le protocole à l’amiable s’use à mesure que les réponses tardent à venir, prévient la dessinatrice. Mais l’énergie créative est bien là.”

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