Saccage 2024, un collectif d’habitants de la Seine-Saint-Denis opposés à la tenue des Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024 en Seine-Saint-Denis, organisait ce mercredi un tour à vélo des sites du départements concernés par la compétition.
En vélo hollandais, vélo de course, ou même en Vélib, ils sont une cinquantaine à s’être donné rendez-vous ce mercredi soir, à deux pas du campus de l’université Paris-Nord de Bobigny. Au programme : le “Toxic tour”, un parcours d’une petite dizaine de kilomètres à travers la Seine-Saint-Denis, passant par différents sites concernés par les Jeux Olympiques et Paralympiques (JOP) de Paris 2024.
Aux manettes, “Saccage 2024”, un collectif d’habitants du département (non lié au mouvement “Saccage Paris”) formé en novembre 2020. Alors que le peloton avance, Arthur, un des membres, raconte la génèse du groupe : “À l’origine, nous nous sommes formés en opposition au “saccage” de certains sites, comme les Jardins d’Aubervilliers ou le Carrefour Pleyel à Saint-Denis. Mais, avec le temps, nous sommes arrivés à la conclusion que nous étions contre les JO en eux-mêmes, parce que ces destructions sont inhérentes à l’organisation d’un tel événement.” C’est aussi une opposition idéologique à la compétition qui anime les militants, bien ancrés à gauche. “Le slogan des Jeux Olympiques, c’est “Plus vite, plus haut, plus fort – ensemble”. Si le capitalisme devait avoir un slogan, ce serait ça !“, continue Arthur, les deux mains bien fermes sur son guidon.
Contre la gentrification
Première étape : l’aire des Vents du parc départemental Georges Valbon, à cheval entre La Courneuve, Le Bourget et Dugny. Dans cette étendue verte, qui accueillait jusqu’il y a deux ans la Fête de l’Humanité, se dressent désormais des logements de brique rouge, destinés à accueillir une partie du Village des Médias. Initialement porté à 4000, le nombre de journalistes attendus s’élève désormais à 1500.
Des constructions qui, critiquent les militants, auront nécessité le déclassement des 27 hectares l’aire des Vents d’« Espace Boisé Classé », « corridor écologique », « Espace Naturel Sensible ” à zone urbanisable. En 2021, une action en justice avait tenté de faire empêcher le projet, faisant notamment valoir la présence de plusieurs espèces animales sur le site, sans succès. Ces constructions ont beau être compensées par la dépollution du parc des essences, ancien terrain militaire de 13 hectares, le collectif y voit une perte nette d’espaces protégés.
Les militants s’inquiètent des conséquences écologiques et sociales de la construction du Village des médias.
Autre inquiétude : après la compétition, les bâtiments seront convertis en 1400 logements, gérés par un bailleur privé. 20% d’entre eux seront réservés à des logements sociaux : trop peu pour Saccage 2024, qui y voit une volonté “élitiste” de “changement de population”.
Privatisation des équipements publics
Deuxième étape, cinq kilomètres plus loin : le Centre Aquatique Olympique (CAO) de la porte de Paris, où se tiendront les épreuves de natation artistique, plongeon, ainsi que les qualifications de water-polo. “On nous promet une piscine pour les habitants de la Seine-Saint-Denis, mais la piscine passera en délégation de service public après les Jeux”, regrette Arthur devant le groupe.
“Ils disent qu’ils veulent apprendre à la Seine-Saint-Denis à nager, mais si c’était le cas, plusieurs petites piscines auraient été construites un peu partout sur le territoire”, argumente-t-il, casque fluo sur la tête. Au total, en plus du CAO de Saint-Denis, ce sont cinq piscines qui verront le jour dans le département à l’occasion de la compétition. Les villes de Sevran, Bagnolet et Pierrefitte récupéreront chacune un des trois bassins démontables utilisés à Nanterre, tandis qu’Aubervilliers et La Courneuve se doteront de bassins d’entraînement. Un enjeu crucial, dans le département le moins bien doté en équipements aquatiques d’Île-de-France, où 60% des élèves arrivent en classe de sixième sans savoir nager – contre 25% à l’échelle nationale.
Échangeur autoroutier à côté de l’école
À quelques coups de pédale, le groupe atteint son dernier arrêt : le carrefour Pleyel de Saint-Denis. À cet endroit, un échangeur autoroutier donnant accès à l’A86 va être agrandi, à proximité d’un groupe scolaire regroupant plus de 600 élèves.
“Le Village Olympique et les bureaux de la tour Pleyel auront des purificateurs d’air à l’intérieur, mais nous, on ne nous mettra un purificateur que dans la cour ! C’est un véritable scandale sanitaire !” dénonce Hamid Ouidir, président de la Fédération nationale des conseils de parents d’élèves des écoles laïques (FCPE) de Seine-Saint-Denis. Outre le danger représenté par la pollution, le parent d’élève dénonce le mépris des autorités : “En quatre ans, je n’ai pas vu un seul représentant de l’Autorité Régionale de Santé (ARS)”, affirme-t-il, alors que ses actions juridiques et ses appels au Président de la République n’ont pas porté leurs fruits. La mise en service des nouvelles bretelles d’échangeur devrait avoir lieur d’ici la fin de l’année, mais le militant reste infatigable : “On continuera”, prévient-il.
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