Une promenade végétalisée de 55 km qui reliera Val-de-Fontenay et le parc des Guilands de Montreuil au parc des Buttes Chaumont (Paris 19e) en passant par une dizaine de villes de l’est parisien, tel sera le Grand Chemin, promis pour 2026. Montreuil a ouvert le 16 mai une série de réunions publiques sur sa création. Détails et réactions.
Rien que pour son territoire, Est ensemble a prévu environ 25 millions d’euros pour la création du “Grand chemin”. D’ici à 2026, la future boucle verte doit relier les neuf villes de l’intercommunalité (Bagnolet, Bobigny, Bondy, Le Pré Saint-Gervais, Les Lilas, Montreuil, Noisy-le-Sec, Pantin et Romainville), mais aussi Fontenay-sous-Bois, Rosny-sous-Bois et Paris.
Avec la hausse des températures, “la question que nous nous sommes posés est de savoir comment faire en sorte qu’il y ait des actes immédiats pour engager la transformation et nous permettre de vivre mieux“, explique Patrice Bessac, maire de Montreuil et président d’Est Ensemble.
“L’idée du projet est qu’il ne faut pas qu’on le fasse en 20 ans, ce n’est pas la bonne échelle. Si on en restait au budget alloué, si on fait comme d’habitude, on n’en finit pas et on se retrouve dans dix ans dans la même situation. Donc à Est Ensemble on a fait le choix d’engager tout de suite les travaux et la réalisation“, ajoute-t-il.
7 km de tracé à Montreuil
Pour créer ce parcours végétalisé, l’établissement public territorial veut “trouver de l’espace” sur les voiries existantes. “C’est un projet à la fois métropolitain, de coopération territoriale, mais aussi un projet de continuité écologique à l’échelle très locale qui va transformer le cadre de vie des habitants d’Est Ensemble. Pour cela on va s’attaquer à l’existant, on va chercher des leviers pour réorganiser l’espace public pour désimperméabiliser et planter“, décrit Emmanuelle Blondeau, architecte-urbaniste et paysagiste conceptrice de l’agence Ter, mandataire du projet au sein du groupement de maitrise d’œuvre composé également de la coopérative Cuesta, Indiggo et une Fabrique de la ville.
“On va essayer de changer radicalement le paysage des rues. L’idée c’est de passer d’un territoire organisé par la voiture à un espace rééquilibré pour faciliter les déplacements à pied, en poussette, en roller, en vélo, dans un cadre intégrant plus de nature“, résume-t-elle.
Consultation
A Montreuil, le circuit traversera 8 de ses 14 quartiers sur 7 km. Une quinzaine de rues vont être réaménagées dans ce but. “Pour que ce projet fonctionne, on a besoin de l’expertise des élus et des habitants. L’idée n’est pas de mettre une jardinière à un endroit. Dans quatre secteurs de la ville [ndlr, couvrant les huit quartiers concernés] on fera des réunions pour travailler rue par rue avec les conseils de quartier et les habitants sur le diagnostic de la situation actuelle. On va confronter ces idées aussi aux premières analyses faites par les bureaux d’études et les paysagistes pour commencer à poser, toujours de manière décentralisée, les premiers dessins sur ce que pourrait être la transformation de telle ou telle rue“, détaille Gaylord Le Chequer, premier adjoint en charge de l’urbanisme. “Les enjeux ne seront pas partout les mêmes. Dans les sous-sols, il y a parfois des trous: des galeries souterraines, des carrières; et parfois il y a des câbles partout, ce qui entraine des contraintes sur le type de plantations que l’on va pouvoir faire.“
La collectivité prévoit une consultation en deux temps. Une première période d’ateliers entre le 25 juin et le 3 juillet et une seconde entre le 25 septembre et le 2 octobre pour une restitution des schémas d’aménagement envisagés fin octobre. L’objectif est de lancer les travaux dès 2024 pour une livraison partielle en 2025-2026.”
Sur les 13 hectares de parcours qui traverse Montreuil, 10 hectares d’espaces publics seront requalifiés. Si l’objectif principal est la renaturation, il s’agit aussi de repenser les équipements pour accompagner les usages comme des rampes pour les personnes à mobilité réduite, des assises, de l’éclairage… Ce qui peut inclure de transformer des friches, des trottoirs larges, des placettes bitumés, souligne aussi l’équipe de l’agence Ter.
“Le projet est formidable, mais la ville n’est pas très propre”
Avec un tel cahier des charges, le projet de Grand chemin suscite un certain enthousiasme, et de l’intérêt. Près d’une centaine de personnes ont assisté à cette première réunion publique. “C’est une opportunité pour les habitants puisqu’on nous consulte“, souligne Audrey. Certains riverains de la future coulée verte ont d’ailleurs saisi l’occasion pour faire des suggestions : “Pourrait-on mettre des panneaux pour indiquer le nom des arbres?”, “il faut créer des voies cyclables où il n’y pas de risques de télescopage avec les voitures en s’inspirant du modèle des Pays-Bas.”
Mais le projet soulève aussi des inquiétudes. “Tout ce qu’on a entendu est très rassurant. Il y a une grande prise de conscience de nos élus sur l’urgence écologique. Le projet entoure Montreuil, mais au milieu, il y a une grande zone très habitée sans aucun parc”, pointe une habitante du quartier Signac proche de la future ligne du T1. “On demande à ce que projet soit revu en concertation.”
“Il y a un triangle vert rue Claude Bernard et une continuité est prévue le long du tramway. Plus de 60% des terrains vont permettre de générer plusieurs espaces verts de pleine terre“, réagit Gaylord Le Chequer qui rappelle qu’une réunion publique doit se tenir en septembre à ce sujet.
“Pouvez-vous nous apporter des garanties sur les arbres de la rue Pierre de Montreuil, sachant que 89 arbres ont été abattus par surprise avenue Gabriel Péri?” “Le projet est formidable, mais la ville n’est pas très propre”, pointe une habitante. “Une fois que tout sera végétalisée, comment se sera géré pour qu’il n’y ait pas de crottes de chien, de canettes..?” “J’adore le arbres, mais on a des problèmes de logements à Montreuil, est-ce que tout ça ne va pas faire augmenter le prix des loyers!“, gronde quant à lui un homme au fond de la salle.
“Montreuil fait partie des villes, désormais rares, qui font 37% de logements sociaux dans toutes les constructions nouvelles. À l’échelle d’Est Ensemble, nous avons décidé d’activer la loi Duflot sur l’encadrement des loyers. C’est une loi qui, à mon sens, est insuffisante, mais c’est ce qui existe. Il y a des villes juste à côté où il y a 5% de logements sociaux“, affirme Patrice Bessac.
“Le projet de Grand chemin est une excellente chose sur le papier. Le problème, c’est le passage du discours aux actes“, considère Choukri Yonis, conseillère municipale d’opposition (DVG). “On est malheureusement habitués à des surprises. J’ai donc des interrogations sur la manière dont ce projet s’articule avec d’autres projets de la ville comme, par exemple, celui d’un groupe scolaire de 24 classes dans la ZAC Boissière. C’est un équipement conséquent qui suppose des constructions? Donc j’attends de voir“, interroge l’élue.
Connu jusque-là sous le nom de “promenade des hauteurs”, le projet a changé de nom pour tenir compte de son extension géographique. Il était en effet limité au départ à 7 des 9 communes d’Est Ensemble. Son tracé court désormais sur 55 km (dont 36 km sur le territoire). La prochaine réunion publique sur le Grand chemin se tient mercredi à 19h00 à l’hôtel de ville de Bagnolet.
Bien vu : il y a de nombreuses stations de métro ou de tramways à proximité du parcours, qui permettent de moduler la distance de marche.
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