Société | Val-de-Marne | 12/10/2023
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Val-de-Marne : des familles solidaires accueillent des jeunes migrants, le temps qu’ils prennent leur envol

Val-de-Marne : des familles solidaires accueillent des jeunes migrants, le temps qu’ils prennent leur envol

Depuis 2018, l’association France Parrainages, dont l’objet principal est d’organiser des parrainages de proximité d’enfants en situation de fragilité sociale, expérimente en Val-de-Marne l’accueil de jeunes migrants isolés par des familles solidaires. Retour sur cette expérience unique.

C’est en 1947 que l’association France Parrainages, à l’époque dénommée Centre Français de Protection de l’Enfance, a été créée pour soutenir des orphelins de guerre français grâce à l’aide financière de familles de pays moins durement frappés. Aujourd’hui, l’association organise des parrainages d’enfants à l’étranger, avec le soutien de familles françaises, tout en développant le parrainage de proximité d’enfants dont la situation familiale est particulièrement fragile ou précaire. “L’idée est de créer un lien entre un enfant et un adulte qui ne fait pas partie de son écosystème habituel, à l’occasion de week-ends, de vacances scolaires”, explique Intissar Koussa, directrice des actions en France. “Nous travaillons notamment avec l’Aide sociale à l’enfance (Ase).” L’association intervient également auprès d’enfants en situation de handicap, pour permettre le répit parental. Parmi ses publics cible, figurent aussi les jeunes migrants mineurs et isolés (Mineurs non accompagnés, MNA). Des ados qui débarquent seuls en France, sans toujours avoir de la famille disponible pour les accueillir. Ils sont alors pris en charge par les départements pour qui cet afflux n’est pas toujours simple à gérer car certains territoires accueillent beaucoup de jeunes.

C’est dans ce contexte que l’association France Parrainages a mis sur pied un accompagnement de plus long cours pour ces jeunes migrants. “L’idée est partie des parrains qui se demandaient comment faire plus”, expose Intissar Koussa. “Nous avons donc réfléchi à un programme spécifique dédié aux mineurs non accompagnés, qui permettrait de l’accueil durable et permanent, par des parrains et des marraines. Les MNA ne sont, en effet, pas forcément prioritaires pour les placements en famille d’accueil. Or, ils expriment parfois le besoin de retrouver un accueil familial pour se structurer, s’insérer, s’intégrer, s’inclure”, motive la directrice des actions.

Accueil durable

Ainsi est né l’expérimentation Famille solidaire en 2018, en partenariat avec le conseil départemental du Val-de-Marne. Le principe est simple. Des familles bénévoles accueillent un jeune mineur non accompagné dans leur foyer durant un an, voire plus, pour lui offrir un cadre stable et bienveillant le temps qu’il prenne de la maturité pour repartir voler de ses propres ailes.

Conditions à remplir pour les familles : être majeur, avoir un casier judiciaire vierge, et passer les étapes d’évaluation de France Parrainages : un premier entretien à l’association, un deuxième sur le lieu de vie, avec également un professionnel de l’ASE, et un troisième avec le psychologue du programme. “Nous décidons ensuite en réunion pluridisciplinaire, détaille Intissar Koussa, précisant qu’il n’y a pas de discriminations sur l’orientation sexuelle non plus que sur le caractère monoparental d’un foyer. L’important est d’avoir envie de s’inscrire dans un programme de longue durée, de faire preuve de bienveillance, de compréhension, d’écoute, de disponibilité mentale. On leur demande de s’investir et d’accompagner le jeune comme si c’était un membre de leur famille.”

Pour Karine et Didier, un couple de jeunes retraités qui habitent Arcueil, les choses se sont passées dans un ordre différent. “L’un de nos fils, qui a une entreprise de charpente, avait pris un jeune en stage puis en apprentissage. Il souhaitait l’aider davantage et c’est en discutant avec lui que nous avons pensé que nous pourrions lui apporter une structure familiale”, explique Karine. Arrivé du Mali à l’âge de 14 ans, Mohamed avait alors 16 ans et il vivait en colocation après avoir été accueilli en foyer. “Mais cela se passait moyennement bien, il avait besoin de se poser quelque part.”

Le bon dosage pour accueillir chaleureusement sans être envahissant

C’est en cherchant un cadre pour pouvoir accueillir le jeune homme que la famille se tourne vers France Parrainages. “L’association nous a beaucoup aidé à trouver chacun nos marques, à accompagner Mohamed sans être trop intrusif, pour le laisser s’épanouir”, souligne Didier.

Trouver sa juste place, doser, ne pas couper le jeune des amis qu’il a pu se faire avant… voilà qui fait partie des sujets d’échanges réguliers avec les autres familles du département qui accueillent des jeunes migrants. “L’association nous a apporté une méthodologie, un parcours pour ne pas faire d’erreur et que le gamin se sente à l’aise. Elle nous a aussi aidé sur le plan administratif car obtenir puis renouveler une carte de séjour relève véritablement du parcours du combattant !”

Accueilli à 17 ans dans la famille, Mohamed en a désormais 18. Il a achevé son premier CAP et en a commencé un deuxième, en construction, toujours chez le même employeur. “Après, il envisage de prolonger sur un BTS”, indique Karine. “Il n’est plus dans le programme Famille solidaire mais nous l’apprécions et il est toujours chez nous. Nous hébergeons aussi un neveu de 20 ans qui fait ses études à Paris”

L’accueil reste également bénévole. “Il commence à gagner un peu d’argent donc il a pu payer son club de foot.” Idem pour le permis de conduire qu’il est en train de passer. Une autonomisation progressive, comme un enfant de la famille en somme.

“engagement citoyen”

Pour Karine et Didier, qui ont eu trois enfants et ont déjà quatre petits enfants, cet accueil relève d’un “engagement citoyen” qui leur est familier, même s’ils n’avaient jamais accueilli d’autre jeune auparavant. Didier travaillait dans une ressourcerie et Karine dans une Maison des solidarités. “Cela fait partie de nos valeurs, mais je suis pas sûre qu’on aurait franchi le pas si notre fils n’avait pas fait cette proposition”, note Karine.

“Le point qui m’inquiétait était le caractère de la personne que l’on héberge. Dans certaines familles, cela peut être compliqué, témoigne Didier. Mais Mohamed s’est incroyablement intégré, il fait plein de choses et les enfants et petits-enfants l’apprécient aussi.”

Pour l’heure, le programme Famille solidaire n’est déployé que dans le Val-de-Marne, en partenariat avec le département.

Pour en savoir plus sur le dispositif et candidater comme famille solidaire, voir la présentation du programme

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