Fin des amortisseurs mis en place lors de la crise sanitaire, inflation et crise énergétique consécutives à la guerre en Ukraine, difficultés pour emprunter… le temps n’est pas au beau fixe pour les entreprises, surtout les plus petites et fragiles. Point d’étape avec Philippe Jombard et Christian Fosse, président et vice-président du Tribunal de commerce du Val-de-Marne (TC94).
Pour l’heure, les chiffres 2023 ne sont pas définitifs, mais pour le président du TC94, la tendance est nette. Et la probabilité est réelle que le nombre de défaillances en 2023 dépasse celui de 2019, année de référence avant la crise sanitaire. Cette année-là, 734 liquidations judiciaires avaient été prononcées. En 2020 et 2021, marquées par la Covid et les confinements, le nombre avait diminué, à 505 puis 452, avant de remonter à 590 en 2022.
Effets cumulatifs
“La crise énergétique a touché de plein fouet des petites entreprises et commerces, rognant sur leurs marges. Dans le même temps, l’inflation a conduit les clients à effecteur des reports de dépenses”, résume Philippe Jombard. Boulangeries, restaurants, coiffeurs, petits agents immobiliers, sous-traitants de sous-traitants… la liste est longue des activités qui vacillent. “Baisse d’activité, baisse des marges, non-remboursement des prêts garantis par l’État (PGE), les effets sont cumulatifs”, ajoute Christian Fosse, vice-président du Tribunal de commerce. Gros temps également pour les startups. “Obtenir une troisième levée de fonds aujourd’hui est devenu quasi impossible“, témoigne le vice-président. Des entreprises innovantes, qui ont gagné des prix et avaient réussi leurs premières augmentations de capital, se retrouvent donc à la peine.
En parallèle, les services de l’État, qui avaient pour consigne de faire preuve d’une grande modération pendant la crise sanitaire lorsque les taxes n’étaient pas payées, ont retrouvé leur rythme et le Trésor a repris ses assignations.
Se faire aider avant qu’il ne soit trop tard
Face à cette situation, les juges consulaires appellent plus que jamais à “anticiper”, et venir frapper à la porte du tribunal avant que la situation ne se détériore encore plus. Il ne s’agit pas d’en attendre un miracle. L’argent ne tombe pas du ciel. Mais cela aide à regarder la situation, à prendre les décisions au bon moment et à se sentir moins seul face à l’échéance. “Nous analysons la situation et présentons les différentes solutions”, insiste Philippe Jombard. Procédure de sauvegarde, réaménagement de la dette si le carnet de commandes est prometteur, revente… des solutions existent avant le redressement ou la liquidation judiciaire.
“Les entreprises de taille moyenne, plus organisées, viennent davantage nous voir, mais pas les plus petites entreprises”, regrette le président du tribunal. Non-connaissance des possibilités d’accompagnement du tribunal, crainte de s’ouvrir de ses difficultés à cette instance, manque de temps de chefs et cheffes d’entreprise qui donnent toute leur énergie à essayer de s’en sortir. Autant de freins qui empêchent de la pousser la porte du Tribunal de Commerce en temps utile.
En pratique
Pour contacter le tribunal de commerce afin d’exposer des difficultés, envoyer un mail à : prevention@greffe-tc-creteil.fr
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